Sara Forestier
Sara Forestier. Elle trouve que son nom est passe-partout, alors elle emprunte celui de Bahia BenMahmoud pour Le nom des gens. Rencontre avec une actrice nature et généreuse.



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 (c) Ecran Noir 96 - 24



D'origine cambodgienne, Hong Khaou était à Dinard pour présenter son dernier film Lilting, avec Ben Whishaw. A presque 40 ans, le cinéaste tourne là son premier long métrage; où il explore son thème fétiche l'homosexualité. Primé à Sundance, le film fait le tour des festivals depuis 9 mois.
Ecran Noir : Lilting est fort de deux éléments délicats à traiter avec déjà une histoire d’amour entre deux jeunes hommes et en plus un personnage asiatique qui parle seulement en chinois, on peut se douter que cela représente presque deux obstacles pour que le film soit facilement produit ?




Hong Khaou : En effet c’est quelque chose qui n’est pas tellement habituel au cinéma. Quand on écrit une histoire on l’écrit d’abord avec son cœur, en étant aussi sincère que possible. C’est d’abord la rencontre entre deux personnes différentes qui aiment le même homme, mais de manière différente. Il y a sa mère qui est asiatique et il y a son compagnon qui est homosexuel. C’est à priori difficile comme projet mais il ne fallait pas nier un des personnages pour le changer en un autre plus commun. Cette histoire est plutôt unique avec ces deux genres de personnages à priori pas habituels au cinéma, mais c’est l’histoire que je voulais raconter.

EN : Le film joue à avec le présent et le passé de manière très subtile pour proposer une narration très particulière…
Hong Khaou : Dans le scénario il y a cette structure d’allers-retours entre le présent et le passé qui sont liés dans la progression du récit. Je pense que mon but principal était la communication qui évolue entre la dame Pei-Pei Cheng  et le garçon Ben Whishaw. La caméra glisse parfois du passé au présent dans une même séquence de dialogues pour qu’on voit à l’image la présence ou l’absence de tel personnage. Cette manière de filmer et d’organiser le montage  implique une réflexion sur le chagrin, sur le chagrin qui consume soi et autour de soi.

EN : Récemment la MPAA, qui organise la classification des films selon l’âge autorisé ou pas, a interdit au moins de 17 ans le film Love is Strange de Ira Sachs et cette mesure a fait polémique comme une restriction qui vise une histoire d’amour entre deux hommes, Lilting déjà passé par le festival de Sundance rencontre-t-il ce genre de problème aux Etats-Unis ?
Hong Khaou : J’ai entendu parler de cette polémique, le film de Ira Sachs ne contient absolument rien qui soit à caractère sexuel ou violent, et cette interdiction semble injuste. En fait Love is Strange est dans un circuit commercial qui fait que c’est une sortie aux USA de la part d’un gros distributeur (Sony Pictures Classics), et donc soumis à l’avis de la MPAA. Moi mon film n’est pas comparable en terme de nombre d’écrans pour sa sortie, je crois qu’il n’est pas assez mainstream parce qu’il y a dedans deux langues différentes qui sont parlées, c’est plus une sortie dans les Art House (équivalent aux salles Arts et Essais). N’importe quel film où le langage n’est pas en américain mais dans une autre langue n’est pas considéré comme film commercial aux Etats-Unis, et donc la MPAA ne s’en occupe pas vraiment. Par contre au Royaume-Uni le certificat de notre film est un avertissement interdit aux moins de 15 ans, mais le motif est celui des jurons comme les mots ‘fuck’ ou ‘fucking cunt’, mais par pour le motif de deux hommes ensemble dans un lit. C’est assez courant en Angleterre qu'il y a ait ce genre d’avertissement à cause de gros mots ou d’insultes, mais ce n’est pas un souci.

EN : Lilting vient tout juste de gagner ici à Dinard le Prix coup de cœur-La règle du jeu remis par une association d’exploitants de salles qui s’engagent à programmer le film dans leurs salles
Hong Khaou : Je pense que c’est le meilleur prix qu’on pouvait recevoir. Quand tu fais un film tu souhaites que le plus de monde possible aille le voir. C’est idéal qu’un circuit de salles donne un signal de potentiel commercial à notre film pour sa diffusion. Ce prix permet au film d’avoir une présence peut-être plus importante dans les cinémas en France.

EN : Le Festival britannique de Dinard fête ses 25 ans, parmi les 25 films qui ont été récompensés du Hitchcock d’or lequel serait ton favori ?
Hong Khaou : Oh, il y a tellement de bons films dans cette liste… J’aime beaucoup Le Géant égoïste, Dead Man Shoes, Bloody Sunday, Boy A, ils seraient mes favoris. Si je dois en dire un seul je dirais Le Géant égoïste que j’aime vraiment énormément, mais aussi pour une autre raison. Sa réalisatrice Clio Barnard a joué un rôle de mentor pour moi, elle m’a donné quelques conseils sur mon scénario et aussi son avis sur le montage.


   kristofy