Sara Forestier
Sara Forestier. Elle trouve que son nom est passe-partout, alors elle emprunte celui de Bahia BenMahmoud pour Le nom des gens. Rencontre avec une actrice nature et généreuse.



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Primé à Berlin (Ours d’argent de la meilleure actrice pour Charlotte Rampling et du meilleur acteur pour Tom Courtenay), nommé aux Oscar (catégorie meilleure actrice), 45 ans d’Andrew Haigh (Week-end) met en scène un couple en plein préparatif de son 45e anniversaire de mariage et qui se retrouve soudain confronté à une profonde remise en questions.

Un drame intime, spectaculaire par la finesse de ses émotions, qui a joliment fait la clôture du festival du film britannique de Dinard où nous avons eu l’occasion de rencontrer son acteur principal. Sir Tom Courtenay, 78 ans, et une belle carrière cinématographique comme théâtrale à son actif, s’est confié sur ce rôle subtil de vieil homme bouleversé par les souvenirs de son passé.

EN : Avez-vous l’impression que c’était plus compliqué à votre époque qu’aujourd’hui d’être un jeune acteur prometteur ?

TC : Non, je ne crois pas. C’est juste que mon cas était vraiment particulier. C’était inhabituel d’être découvert ainsi, même à l’école d’art dramatique. Cela n’arrive pas à tout le monde. A l’époque, on était plus intéressé par le long-terme que par le court-terme. Moi, je voulais vraiment jouer au théâtre, et je l’ai fait d’ailleurs. J’ai presque recommencé à zéro après mes premiers films, et je suis retourné au théâtre. J’ai tourné le dos au cinéma. Mais plus maintenant, maintenant j’aime le cinéma ! C’est devenu une plaisanterie : maintenant c’est trop tard, je suis trop vieux !

EN : Avez-vous l’impression qu’on vous propose des rôles plus intéressants aujourd’hui ?

TC : Vous avez, les gens demandent toujours : "qu’est-ce que vous faîtes après ?". Je n’en ai pas la moindre idée ! Et j’en suis assez content, car en tant qu’acteur on s’y habitue. Si plus personne ne veut de vous, c’est comme ça, ça ne me dérange pas. Je joue dans une série télévisée où j’ai un beau rôle, et puis bien sûr il y a eu 45 ans. On est allé partout avec ce film. C’est bien suffisant !

EN : Pour en revenir au film, les personnages sont âgés, mais des personnes plus jeunes peuvent aussi ressentir cela, cette impression qu’une partie de leur vie est déjà derrière…

TC : Oui, absolument ! D’ailleurs Andrew [Haigh] n’est pas vieux, il a une quarantaine d’années. Il dit qu’il en marre que les gens lui posent la question, mais moi je lui ai demandé comment il pouvait savoir. Comment il pouvait parler pour moi, pour quelqu’un de mon âge ! Parce que c’est très puissant ce qu’il fait vivre à mon personnage.

EN : Il y a aussi la notion de ce qui aurait pu être…

TC : Il y a un poème très célèbre du poète américain Robert Frost qui s’appelle The Road not taken et qui parle de deux routes qui vont dans des directions opposées…

EN : Quelle que soit la voie que l’on choisit, on se dit que l’autre aurait peut-être été mieux…

TC : Oui, c’est la vie ! C’est naturel. Votre grande Edith Piaf disait "je ne regrette rien", mais pourquoi pas ? C’est très naturel d’avoir des regrets. C’est humain. Et c’est la même chose pour le fait de regarder en arrière. C’est la seule direction que l’on peut regarder. Normalement, j’ai un avion pour Londres cet après-midi, mais on ne peut jamais être sûr. Par contre, je peux me souvenir de ce qui s’est passé hier soir… On peut regarder en arrière seulement. Pas en avant.




   MpM

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