Sara Forestier
Sara Forestier. Elle trouve que son nom est passe-partout, alors elle emprunte celui de Bahia BenMahmoud pour Le nom des gens. Rencontre avec une actrice nature et généreuse.



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 (c) Ecran Noir 96 - 24



De passage à Paris, le réalisateur de 20th Century Women nous a accordé un peu de son temps. Accessible, engagé et jovial, Mike Mills nous parle de cet hymne à la femme et à une époque, tout en étant un film très personnel. Rencontre...
Ecran noir: Comment avez-vous imaginé le scénario de 20th Century Women? Est-ce une histoire personnelle?




Mike Mills:
Oui c'est une histoire personnelle en effet. Il s'agit de la biographie de ma mère. Elle était extravagante et voulait être pilote. D'ailleurs Annette Bening porte les bijoux de ma mère. Mais ce n'est pas ma mère non plus, c'est Annette Bening et elle est tout de même différente aussi bien du côté du corps que de l'âme.
Pourtant, je peux faire plusieurs versions de ma mère et capter le moment sans que cela soit elle mais capter juste ce moment. Ensuite le personnage de Greta (Gerwig, ndlr), Abbie, vient de ma sœur. Elle est partie à New-York où elle y est devenue punk et a exploré sa sexualité avant de revenir à la maison pour soigner son cancer. Concernant le personnage d'Elle (Fanning, ndlr), Julie, elle est un micmac de toutes les femmes que j'ai pu connaître et qui ont grimpé à ma fenêtre (rires). C'est donc une histoire très personnelle mais l'idée était de faire un film pour les gens donc il fallait modifier certaines choses.


Ecran Noir: Durant le visionnage du film, nous sentons le pouvoir énorme de la femme. Vouliez-vous dédicacer votre œuvre à l'Amérique d'aujourd'hui? Je pense à la marche des femmes qui a eu lieu le mois dernier par exemple...
Mike Mills:
J'ai écris le scénario en 2011 donc je ne savais pas encore pour Trump et toutes ces choses (rires) mais déjà à ce moment-là, le film avait pour objectif de donner du respect aux femmes. Mon film précédent était au sujet de mon père qui était homosexuel (Beginners, 2011): en tant qu'homme blanc et hétéro, j'ai trouvé que ma position était historiquement ruinée (rires). Il y en a des histoires à propos d'hommes, mais je ne sais pas comment on peut faire, de nos jours, une histoire intéressante et forte à propos d'un homme blanc et hétérosexuel. Je pense qu'on peut le faire d'une certaine manière, mais j'étais très heureux d'écrire à propos de mon père gay, d'avoir un homosexuel au centre de mon premier film, puis d'avoir des femmes au centre de mon deuxième film. Bien avant Trump, ce film portait un message... Mais d'une certaine façon ce n'est pas voulu car c'est ma vie. J'aime mon père et je sais en parler. Puis ma famille est aussi composée de ma mère et de deux sœurs plus âgées qui ont le pouvoir dans la famille. Donc mon féminisme et cette idée de féminisme fait partie de ma vie.


Ecran Noir: Notre scène favorite du film est celle sur la menstruation. Il s'agit d'une véritable partie de ping-pong verbale, comment se passe le tournage pour une scène comme celle-ci?
Mike Mills:
C'était vraiment très drôle et ça a pris du temps. Une scène à table comme celle-ci où vous regardez quelqu'un et que quelqu'un vous regarde vous oblige à changer la position des caméras à plusieurs reprises. Il y avait environ douze positions différentes et cela a pris six heures pour tourner juste cette scène. N'empêche c'était très drôle. Greta a suivi le texte tout en ajoutant tout de même certaines choses puis Billy (Crudup, ndlr) a fait de même et j'adore quand les acteurs jouent avec mes répliques. Lorsque Billy dit "on ne fait pas l'amour à un vagin mais on fait l'amour à une femme entière", c'est une improvisation. Lorsque Greta parle de vagin qui a ses règles c'est une improvisation.
Le jour du tournage, il faisait très très chaud, tout le monde transpirait et cela a ajouté de la fatigue à Greta, ce qui était parfait pour cette scène. Mais il faut savoir aussi que cette scène vient de ma femme. Ma femme est une femme fière de ses menstruations et il y avait une histoire drôle dans sa famille: lorsqu'elle avait 12 ans, son frère, bien plus vieux, lui a demandé de parler avec fierté de ses règles. Du coup j'ai repris l'idée.


Ecran Noir: La musique est très présente dans le film et d'ailleurs vous avez longtemps tourné des clips musicaux. Seriez-vous intéressé par une comédie musicale?
Mike Mills:
Oui, d'ailleurs j'y pense de plus en plus. J'adore les clips musicaux, c'étaient mes films d'école. Mes clips vidéos racontent tous une histoire, il n'y a pas juste un plan sur le groupe qui joue mais ils racontent une histoire, comme des mini-films. J'aime lorsque quelque chose se passe, c'est très éducatif. Donc oui, je pense très sérieusement à faire une comédie musicale, ce sera sans doute mon prochain projet. J'ai d'ailleurs vu La La Land et j'ai beaucoup aimé.


   Cynthia