Production : The Con
Distribution : Diaphana
Réalisation : Morgan Spurlock
Montage : Stela Gueorguieva, Julie Lombardi
Image : Scott Ambrozy
directeur artistique : Joe the artist
musique : Steve Horowitz, Michael Parrish Durée : 98 mn

Casting :

Morgan Spurlock : Morgan Spurlock, le cobaye
Alexandra Jamieson : Alex, copine du réalisateur
Dr. David Satcher : ancien ministre de la santé
Tommy Thompson : Secrétaire d'Etat à la santé
John Robbins : auteur de Diet for a New America

 

 
INTERVIEW de Moirgan Spurlock
Site officiel
  (c) Ecran Noir 96-04
Super Size Me 
USA / 2004 / Sortie France le 30 juin 2004 
 
 
Morgan Spurlock est Américain, grand, mince, bien portant. Il a une copine, chef de cuisine végétalienne.
Tandis que deux gamines décident de porter plainte contre Mc Do, le roi du hamburger, le symbole du Fast Food, il s'interroge : cette cuisine typiquement américain est-elle néfaste pour les citoyens?
Il prend sa caméra et interroge les consommateurs. Il commence à découvrir que ce type de nourriture est partout, que tout le monde semble accro, et que l'obésité devient un vrai poids financier dans les dépenses publiques.
Il se transforme en cobaye et tente l'impossible : manger trois fois par jour chez Mc Do, pendant un mois. Le résultat sera monstrueux.
 
   30 000 Mc Do dans le monde (dont un démonté par José Bové).1000 et quelques en France, d'Epernon aux Champs Elysées. sans compter les Quick, Pizza Hut, Kentucky Fried Chicken, ... 46 millions d'individus dans le monde mangent chez Mc Do chaque jour - soit 43% du marché. C'est davantage que d'Espagnols sur la planète. Le menu Super Size de Mc Do (aujourd'hui retiré de la vente) pesait 5000 calories. C'est plus qu'un dîner de réveillon!
Après 70 ans de service (à domicile, sans quitter sa voiture, ou juste en bas de chez soi), les effets sont considérables. L'obésité tue 400 000 américains chaque jour, presqu'autant que le tabac. Cela a un coût : 120 milliards de $ en aides sociales, 75 milliards de $ en dépenses médicales. 2 adultes sur 3 sont victimes d'obésité aux Etats Unis (principalement au Texas, à Miami, Chicago, dans les zones industrielles délaissées) et 9 millions d'enfants souffrent de problèmes de surpoids. Le signal d'alarme a été tiré cette année en Europe. Présent en France depuis 20 ans, la chaîne sert un million de repas quotidiennement sur 753 communes. Créateur d'emploi, gros client des agriculteurs, c'est aussi un annonceur de premier choix. La preuve : depuis quelques semaines, le conglomérat publie des pleines pages dans les quotidiens avec cette accroche : "Question nutrition, jusqu'où faudra-t-il aller pour bousculer les idées reçues?". Et ainsi de vanter que Mc Do vend des salades de fruits de puis 93, de l'eau minérale depuis 94, des yaourts Danone depuis 97... Pour finir ainsi : "manger doit rester un plaisir". Gasp. La guerre est lancée. Partout où Super Size Me, McDonald's dépasse les limites.
Si l'obésité touche aussi en europe les classes socialées défavorisées. 20% des adultes français ont des problèmes de surpoids. le phénomène se répand dans tout le continent mais aussi en Chine, en Amérique du Sud... Ce problème est facteur de rejet social (culte du corps oblige), d'hypertension, de menaces cardiaques, de diabète, d'impuissance, d'hépatites, de cancers, d'essoufflement, de douleurs lombaires... Souvent elle est causée apr une alimentation de plus en plus sucrée et un manque d'exercice.
Bien sûr l'expérience de Spurlock semble excessive. Mais elle est symptomatique. Si lui concentre son expérience sur 30 jours, les autres consommateurs étalent ça sur des années. Et la politique de salade Mc Do ne suffira pas puisque leurs sauces sont ultra caloriques, et leur quantité pantagruélique.
Avec juste 300 000 $, Morgan Spurlock a tiré le gros lot puisque le docmentaire cartonne partout où il passe. En 8 semaines aux USA, le documentaire s'est incrusté dans le Top 15 et a rapporté avec moin de 200 salles près de 10 millions de $. Primé comme meilleur réalisateur à Sundance au début de l'année, aidé par la compagnie d'assurances de son ex femme pour la couverture médicale, le film bénéficie d'une bonne étoile, jusqu'à monopoliser 80 écrans en France, en pleine documania.
C'est pourtant le premier long métrage du documentariste. Il avait réalisé, auparavant, des pubs, des clips, des émissions de TV. Il aussi écrit une pièce (The Phoenix) et lancé un programme pour le web (I bet you will) avant d'être adapté pour MTV.

 
 
LE CONTE DU VENTRE PLEIN

"- Il y a un cheveux long et gras dans mon sundae."

"Nourris-moi!!!" hurlait la plante carnivore dans La Petite Boutique des Horreurs. Super Size Me n'est jamais que l'explication élaborée de ce phénomène étrange où des êtres humains sont en fringale permanente jusqu'à devenir obèses. Si ce documentaire est percutant, c'est bien qu'il punch au bon endroit : dans l'estomac, mais aussi dans nos têtes. L'agression contre McDo n'est qu'une illustration du propos. A l'instar de Moore qui choisissait General Motors pour parler de désindustrialisation, Nike pour les délocalisations et Charlton Heston pour l'armement des citoyens. Dans ce pays qui se vante d'avoir tout de plus grand et de plus gros, les individus commencent à souffrir de cette surenchère pas seulement consumériste mais aussi alimentaire. McDo est l'un des accusés, aux côtés de compagnies américaines mais aussi européennes (Sodexho, Nestlé, ...). Le phénomène est devenu mondial. L'obésité est devenu un réel handicap. Une maladie qui va tuer plus que le tabac, qui va empêcher notre civilisation de bouger, qui va coûter une fortune aux systèmes de santé. Et Morgan Spurlock filme ainsi un Mc Do situé... dans un hôpital!
Car il ne manque pas d'humour ce documentaire qu'il faut absolument prendre au sérieux. Des petites animations pour nous distraire et des images suffisamment ironiques pour nous faire sourire... jaune. Notamment quand vous constaterez que la moitié des interviewés ont eux-mêmes un problème de gras dans le bide. Une sauce de rock en musique et le documentaire vise clairement un public très large, se chargeant du mélange ardu entre pédagogie, encyclopédie et comédie. Super Size Me est surtout très bien construit dans on argumentaire, n'oubliant ni les explications médicales, ni les propos politiques (incisifs), ni les anecdotes personnelles qui permettent l'identification du spectateur aux victimes de la "malbouffe". Impossible de résumer tous les enjeux, ni même les dangers de ce système. Mais le documentaire vaut des dizaines d'actions maladroites et primaires de José Bové.
Car Morgan Spurlock y laisse sa peau. D'une certaine manière. Voici un Américain qui n'a rien d'un top model, grand, mince, mais pas bodybuildé ni anorexique. 84 kilos au début. 97 kilos trente jours plus tard. Clairement, avec un Michael Moore, nous n'aurions pas pu voir la différence. Ici, flagrante, elle refroidit le plus chaud des partisans de fast food (il y en a?). Car le documentariste ne fait pas qu'interviewer, il sert de cobaye scientifique (jusqu'au toucher rectal!). Et nous offre une leçon de diététique hallucinante dans un pays à la fois obsédé par le culte du corps et coupable d'obésité massive. Et en quelques séquences tout nous est expliqué : le lien avec la pauvreté, l'absence d'exercices physiques, la manipulation sur les enfants, les menus à la cantine scolaire, et la taille des proportions servies. Des citoyens qui connaissent par coeur les slogans publicitaires de McDo mais pas la devise américaine. Des gamins qui reconnaissent Ronald MacDonald's mais pas le Christ, des McDo qui offrent des aires de jeux dans des zones défavorisées, des aliments bourrés de sucre pour nous rendre accros, des sodas de 2 litres (8 cuillères à sucre pure)... Qui a besoin de tant boire, de tant manger?
Tout cela vous fait gerber? Ne culpabilisez pas, le documentariste en vomit lui-même parfois. Pourquoi harcèle-t-on les fumeurs et oblige-t-on les gens à manger n'importe quoi et n'importe comment? Signal d'alarme qui n'hésite pas à pointer toutes les contradictions économiques, politiques (au passage on égratigne un peu Bush, ça fait du bien), sociales, et culturelles d'une civilisation malade d'elle-même, le documentaire ne cherche pas une morale. Les résultats suffisent à parler d'eux même. L'alimentation a un effet sur la concentration, le comportement, la sexualité, l'état psychologique de chacun. En 21 jours de fast food, Morgan Spurlock a réussi à terrifier ses médecins. Sa santé était atteinte. Combien d'années faudra-t-il à nos pays pour réagir et mettre au pas ces conglomérats alimentaires pour notre bien à tous? En éduquant les enfants par exemple, en limitant les quantités servies dans ce genre de "restaurants", en augmentant le nombre d'heures de sport...
Face aux grands mensonges de M Do, à leur malaise face à cette agression cinématographique (et salutaire), le spectateur se délecte, réjoui de voir David ayant pu mettre Goliath K.O.

- Vincy