Production: 3B Productions, Arte France Cinéma, CRRAV
Réalisation: Bruno Dumont
(La Vie de Jésus)
Scénario: Bruno Dumont
Photo: Yves Cape
Musique: Richard Cuvillier
Montage: Guy Lecorne (148 mn)

Casting:
-Avec Emmanuel Schotté, Séverine Caneele, Philippe Tullier, Ghislain Ghesquière

 

 

 
L'HumanitéCannes 99
Extrait du scénario (avec 00h00.com)
L'Humanité 
France /1999/ Sortie France le 27 octobre 1999 
 
L'Humanité
 
Pharaon de Winter est policier dans une petite ville du Nord. Il supporte toutes les souffrances de l'humanité.
Mais un crime pédophile détruit l'équilibre de la région.
Dumont justifie son titre ainsi : "Préparation d'un film sur l'amour de l'humanité, le penchant vers les autres, l'inclination, la sympathie universelle. L'épreuve du mal est obligée, dans la conquête du bien, sa certitude : c'est la bataille."
 
   C'est le second film de Bruno Dumont. Son premier, radical et épuré, La Vie de Jésus, a récolté de nombreux prix: Prix Jean Vigo, Prix de la Critique à Chicago, meilleur film international à Sao Paulo, Film espoir aux European Film Awards, Palmier d'Or à Valence.
Il a auparavant réalisé 40 films courts, documentaires et pubs. L'Humanité a remporté un double Prix d'Interprétation à Cannes, ainsi que le Grand Prix du Jury. Totalement contesté et même incendié par la critique (entre racisme provincial et intolérance cinéphile), il semblerait que certains journalistes soient devenus plus indulgents avec les mois passant.
Entre temps, Séverine Caneele a été licenciée de son travail (pour avoir exhibé son sexe au cinéma).
Pour info, le personnage principal Pharaon de Winter doit son nom à un peintre de Bailleul (Nord de la France) né en 1849. Portraits, famille, religion, il est issu de l'école des Rambrandt et Rubens. On peut y admirer quelques toiles dans la scène du Musée.
 
 
   DIFFERENCES

L'ennui selon Saint Dumont. Tel est le sous titre du film, qui navigue entre Bresson et Tarkovsky. Le film est inexorablement lent, long, lassant. Il sera donc très facile de souligner les défauts de cet Humanité. Mais il faudra aussi rendre justice à ces personnages qui ne méritaient pas les moqueries d'une presse intolérante. Ce malaise du spectateur ne peut que nous faire réfléchir à ce que l'image lui montre.

Dumont a prolongé les excès de son précédent film. de la baise crue. Des sexes de femmes en gros plans. Une laideur du paysage. Aucun esthétisme. La musique est rare. Et le scénario mal aboutit. Radical, sans concession, l'oeuvre frôle les Pialat les plus épurés et les Rivette les moins stylisés. Il manque cependant l'humour d'un Poirier, ou le charme d'un Zonca. Ceci pour vous donner une idée.

Ce naturalisme - ce campagnardisme même -, ce crime (hélas) banalisé (par l'image même qu'ne fait Dumont), ce manque d'émotion rendent le film distant, froid, et désintéressant. D'autant qu'on ne peut se raccrocher à aucun des personnages. Ils sont tellement réels que la magie du cinéma n'opère pas. Quant à l'intrigue (une enquête policière), elle transforme le film en oeuvre involontairement risible.

L'Humanité c'est un policier, paumé, désespéré, presque pathétique, intègre mais pas doué, un peu demeuré; un homme qui aime tout le monde, qui est un néant intellectuel, qui souffre de chaque malheur. Ce flic pas comme les autres a perdu femme et enfant. Il est lui-même un grand enfant, symbolisant la naïveté (l'utopie?) du film.

Le film est tout sauf cynique. L'impression que Dumont croque la vie amèrement. C'est un film anti-cons, qui pardonne tout à tous. Dumont fait de son personnage un martyr incompris, sans le glorifier, et donc sans le défendre. Son regard clinique et observateur aurait pu retenir notre attention, si son film ne durait pas aussi longtemps, si un rythme avait existé, si les plans inutiles avaient été coupés, et si la mise en scène l'avait moins joué "temps réel".

Il pousse un cri. Il exhibe la folie du monde, et la tendresse humaine. Serait-on névrosés à ce pont là? ce manque d'affection est-il si flagrant? Au delà de ce que l'on voit, il y a ce que Dumont essaie de nous montrer. On est partagé entre l'admiration d'un cinéma niais, épuré, un film d'auteur qui ne pense pas au spectateur, et le rire face à un message totalement décalé.

L'Humanité aurait du nous faire prendre conscience de notre souffrance. Au lieu de cela, à force de trop vouloir se marginaliser, Dumont nous fait souffrir. On prend pitié si on est humain, ou on se moque.

- Vincy