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   spécial Cannes
 
 
 
Production: LUMEN FILMS - PARADIS FILMS (France) - ORLY FILMS (France) - PANDORA FILMS (Allemagne) - BIM DISTRIBUZIONE (Italie)
Réalisation: Amos KOLLEK
Scénario & dialogues: Amos KOLLEK
Images: Jean-Marc FABRE
Décors: Stacey TANNER
Musique: David CARBONARA
Montage: Sheri BYLANDER
Durée : 98 mn

Interprétation:
Anna THOMSON (Bella)
Jamie HARRIS (Bruno)
Louise LASSER (Emily)
Robert MODICA (Paul)
Austin PENDLETON (George)
 

  Fast food, fast women
2000 / Etats-Unis / Sélection officielle / Compétition / présenté le 15 mai
 
Bella va avoir trente-cinq ans; elle est serveuse dans un restaurant new yorkais. Côté coeur, elle vit depuis longtemps une histoire sans lendemain avec un homme marié, quand elle rencontre Bruno, un chauffeur de taxi écrivain en devenir, qui vient de redevenir papa. La serveuse rêve de famille idéale mais a peur de se déclarer. Autour d'elle gravitent, des personnages avec un présent amoureux tout aussi compliqué. Des clients, des vieux hommes, s'interrogent sur leurs dernières années à venir, et sur leurs désirs inassouvis.
 
 
Amos KOLLEK, cinéaste israëlien né en 1947 à Jérusalem, diplômé en psycho et philo, a déjà réalisé une 10 films, publié cinq ouvrages (dont un de référence sur Eastwood) et écrit de nombreux articles pour divers journaux (dont the NY Times, Die Zeit).
C'est avec Sue Perdue dans Manhattan (1997, son huitième long) que les spectateurs français le découvrent vraiment, ainsi que son actrice principale, la mystérieuse et fantasque Anna Thomson. Anna Thomson y incarne Sue, une jeune femme solitaire qui va peu à peu perdre le contact avec la vie et refuser l'amour, même si celui-ci peut la sauver. Le tandem se retrouve pour Fiona (1998), un film très sombre où Amos Kollek entraîne son actrice dans les bas-fond de New-York à la rencontre de prostituées. Le ton est plus léger pour Fast food, Fast Women. Anna Thomson, actrice au physique et au parcours étonnants a prouvé qu'elle peut passer du registre très noir à la comédie grâce au dernier film de François Ozon, Gouttes d'eau sur pierre brûlante. Elle a tourné par ailleurs avec Eastwood, Cimino, Stone, Michael Bay, Tony Scott, Adrian Lyne...
Le reste du casting est composé de Jamie Harris (le fils de Richard) qu'on a vu chez Menges, Sherida, Pradal... de la woodyalleniéenne Louise Lasser (Happiness, Requiem for a dream), et de Victor Argo (qu'on reverra dans The Yards de James Gray).
 
LA VIE EST BELLA

Kollek collectionne les personnages bizarroïdes : une serveuse de bar ex yuppie avec des airs de blanche neige trash, une pûte qui bégaie, in écrivain chauffeur de taxi qui déculotte toutes les fesses qui bougent, ou encore un vieux monsieur timide qui n’ose pas avouer son amour à une femme rencontrée par petites annoncesÉ tous, dans ce milieu urbain sans nom et sans caractère, cherchent l’âme sÏur, le bonheur, en surmontant leurs propres peurs.
Fast Food Fast Women, c’est le contraire de Fast Fuck Fast Love. Les comportements étranges et beaux de ses vies désoeuvrées délivrent chacune d’entre elles de leurs prisons, de leurs névroses.
Ecrit comme cela, on pourrait croire à un de ces drames sentimentaux aux dialogues prise-de-tête. Mais en fait, le film est une comédie, mélangeant les mÏurs et les bons mots. Avec un sens certain de la dérision, une écriture subtile et légère qui ne masque en rien la profondeur des blessures, le cinéaste quitte un peu ses territoires explorés pour voguer vers un cinéma grand public.
La réussite de FFFW est sans doute dans l’accumulation de scènes " sucrées-salées " sur les maladresses de chacun, de personnages si loins et si proches, de réparties qui fusent et nous font exploser de rire. La déjantée Anna Thomson, ni belle ni laide, ni jeune ni vieille, occupe merveilleusement l’espace que lui donne son réalisateur. A la fois naïve et fonceuse, innocente et lucide, ce rôle de serveuse instable en quête de stabilité (familiale), lui va à ravir tellement elle fait des ravages, naturellement.
En bombe sexuelle, et pseudo BB (animaux inclus), elle ne fait que symboliser la femme comme pur objet de fantasme et de défoulement masculin. Très sexué, voir d’apparence sexiste, le film est en réalité un hymne à la femme. Les hommes y sont mateurs, soumis, lâches, passifs qu’ils soient un jeune père n’assumant rien et surtout pas l’engagement, un vieil homme qui ne sait plus avouer ses sentiments, un autre qui n’ose pas draguer une prostituée, ou encore ce mari qui trompe sa femme depuis des années et mène en bateau sa maîtresse.
La sexualité y est un plat qu’on mange crû et qui obsède les vieillards comme le jeunes. Qu’elle soit marginale ou romantique, elle est au cÏur des tourments et des bonheurs de chacun. C’est un sujet sans tabous qui véhiculent toutes sortes d’appréhensions personnelles comme le vieillissement, le rapport à l’autre, le don de soi.
FFFW est une comédie dans l’air du temps, admirablement écrite (ce qui confirme la force des indépendants américains dans le domaine), et filmée avec un style indéniable.
La dernière partie est un modèle d’allégories invraisemblables et pourtant cohérentes que seul le cinéma peut oser. Le matérialisme qui soutient le film philosophiquement, tant l’argent qui contribue au bonheur, que le corps monnayé pour de l’argent, s’avère un mal nécessaire pour obtenir ce que l’on veut.
Il restera le courage et la folie de son héroïne, le charmant Bruno et un réalisateur qui confirme tout son talent à travers une histoire magique et hilarante, un miroir à notre détresse et à nos espoirs. En un mot, brillant.

Vincy  

 
 
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