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FINAL FANTASY
Les Créatures de l'esprit
USA / 2001
Sortie en France le 15 août 2001

Fiche technique :
Production : SquareSoft
Réalisation : Hironobu Sakaguchi
scénario : Hironobu Sakaguchi, Al Reinert, Jeff Vintar Lumières : Angela M. Eliasz
Directeur de l'animation : Kevin Bjorke
Musique : Elliot Goldenthal
Durée : ?

CASTING :

Ming-Na (Aki) - Alec Baldwin (Grey) - Steve Buscemi (Neil) - Donald Sutherland (Dr. Sid) - James Wood (General Hein)

En l'an de grâce 2065, un conflit mondial s'abat sur la terre, opposant les hommes à une cruelle race extraterrestre venue exterminer toute vie humaine. Le docteur Aki Ross, une jeune et brillante scientifique déjà infectée par un alien, est sur le point de découvrir le secret des envahisseurs et le moyen de les combattre.
Aux côtés de son meilleur ami, Grey Edwards, et avec l'aide militaire de l'escadron "Deep Eyes", Aki n'a que très peu de temps pour tenter de sauver sa peau et celle de ses semblables puisque le Général Hein projette d'anéantir les extraterrestres à l'aide d'une attaque massive de missiles, quitte à détruire la terre..
Si "Final Fantasy" voit le jour aujourd'hui sur grand écran, et si la saga des jeux du même nom ont fait rêver des millions de joueurs depuis bientôt quinze ans, c'est avant tout par la volonté d'un homme : Hironobu Sakaguchi, créateur du jeu initial et grand réalisateur du long-métrage.
Histoire d'une épopée, d'un défi, d'une vie.
En 1983, la société japonaise Denyuûsha développe une filiale du nom de Square, attelée à concevoir des jeux vidéos pour PC. Sakaguchi entre alors dans l'entreprise comme programmeur.
Jusqu'en 1987, Square est au plus bas, ses jeux ne remportent pas le succès escompté par la compagnie mère et les bénéfices sont rares. Néanmoins, une collaboration avec la firme Nintendo arrive à point nommée et permet à Square de concevoir des jeux pour la NES, la console star des années 80. Après quelques essais une fois encore peu fructueux, Sakaguchi décide de réfléchir à la création d'un jeu qui répondrait aux principes des RPG (Role Playing Game), tout en sachant pertinemment qu'en cas d'échec, ce jeu serait sans doute le dernier de Square. C'est dans cette logique que ce nouveau venu se nommera "Final Fantasy" et se vendra à plus de 520.000 exemplaires sur le territoire nippon dans une véritable euphorie qui signe le commencement d'une véritable nouvelle ère pour le jeu vidéo. De 85 à 95, Sakaguchi va diriger les six épisodes suivants, toujours pour Nintendo, avec pour principe d'innover pour chaque nouveau jeu avec un nouvel univers et de nouveaux personnages. Ce travail nécessitant à chaque fois plus de moyens financiers et une équipe technique toujours plus importante, Square va devenir un des géants mondiaux de la conception de jeu. Sakaguchi devient directeur de projet et occupe tous les fronts puisqu'il est à la fois un expert de la programmation, un scénariste hors pair et un dessinateur particulièrement doué.

C'est ainsi que chaque nouveau monde insufflé par le talent créatif de Sakaguchi renferme son lot de créatures imaginaires en tout genre et de magie, dans une atmosphère toujours teintée d'héroïc fantasy et de philosophie orientale. Pour le septième épisode, Square délaisse Nintendo pour s'accaparer toute la puissance de la Playstation de Sony. C'est ainsi que le nouvel épisode propose un univers en trois dimensions. Hironobu Sakaguchi se lance également dans ce qui deviendra le trait d'union entre le jeu et le film qui va sortir cet été : les séquences cinématiques. Grâce aux progrès des images de synthèse et l'acquisition de nombreuses stations Silicon Graphics, Square va proposer des petits films intermédiaires entre les actions du jeu d'une beauté saisissante, où rien n'est laissé au hasard par Sakaguchi, propulsé directeur en recherche et développement et producteur. Après les succès dans le monde entier du huitième et du neuvième épisode, Sakaguchi s'est impliqué pendant plus de quatre ans sur le développement et la réalisation du film qui concentre tout son savoir faire en matière scénaristique et visuelle. Devant James Cameron qui voulait être le premier à réaliser un film avec des acteurs digitaux (le projet "Avatar", finalement abandonné), Sakaguchi vient de lancer une machine qui révolutionne le septième art et à laquelle il faut porter toute son attention.

Intitulé "Final Fantasy : les créatures de l'esprit", le long-métrage prend le contre-pied de l'héroïc fantasy et des univers lointains pour nous ramener sur notre bonne vieille terre en l'an 2065. La planète bleue est alors assiégée par des extraterrestres belliqueux qui rêvent d'éradiquer l'espèce humaine. La jolie Aki Ross, docteur de son état, semble détenir une solution pour défendre ses contemporains, laquelle serait enfermée dans les rêves, l'imaginaire et la magie.
Comme l'histoire ne correspond en rien à ce que les fans pouvaient attendre de cette adaptation au cinéma, ils crient au scandale, et surtout à la trahison de la part de Sakaguchi, qui est pourtant le meilleur garant de l'esprit du jeu. Pour ne pas froisser les producteurs américains et japonais, Square a déménagé ses locaux à Hawaï, dans un immense immeuble High-Tech d'Honolulu où furent placés les studios dans lesquels les séquences furent jouées par de vrais acteurs sur un immense échiquier sur lequel l'ordinateur se base pour calculer les mouvements des personnages. Notons d'ailleurs que des dizaines de logiciels ont dû être mis au point pendant un an et demi pour exécuter dans un parfait réalisme toutes les étapes de l'animation.

Pour apporter la touche d'humanité à ce tissu de synthèse, Final Fantasy bénéficie d'un casting impressionnant pour les voix de doublage, avec entre autres Ming-Na Wen (la voix de Mulan), Alec Baldwin, James Wood et Steve Buscemi. Avec un budget qui est passé de 70 à 140 millions de dollars, le film n'aura pas suite comme l'aurait espéré Square, préférant limiter les risques, et qui va dorénavant s'orienter sur la création d'effets spéciaux pour les films d'autres productions.

NOUVELLE REALITE

Un frisson parcourt ma nuque. Juste une sensation. La chaleur estivale à la sortie de la salle me jette au visage cette autre réalité, bruyante et colorée. Quelle réalité ?
D'accord, première remarque, "Final Fantasy" est la meilleure adaptation de jeu vidéo qui ait vu le jour jusqu'à présent, mais très honnêtement, le sentiment vague et intense qui vous envahit à la sortie du film est loin de ces considérations. Une seule chose vous brouille l'esprit, c'est cette incroyable sensation de magie, de joie, et de peur également. Une expérience. Un tournant. Hironobu Sakaguchi vient de redéfinir le cinéma, en donnant vie à un mutant génial et magnifiquement articulé qui renverse avec un fracas pourtant silencieux les tablettes de lois du septième art. Non content de révolutionner l'aspect technique des images de synthèse, puisque celles-ci sont enfin parfaitement crédibles, il nous sert sur un plateau argenté un scénario de SF passionnant, à la croisée de l'action futuriste et de la fable philosophique et mystique. Pour cela, le réalisateur a établi la bonne recette. "Final Fantasy" n'est justement pas l'adaptation fidèle du jeu du même nom, car, s'il n'oublie pas les affinités avec un monde transcendantal et la puissance d'une certaine forme de magie, la notion d'Héroïc Fantasy a totalement disparu et l'action se déroule sur Terre.
"Final Fantasy" est la seule franchise qui n'en est pas une puisque son créateur, Sakaguchi, disposa d'une liberté inégalable pour traiter comme il l'entendait le projet qui lui tenait le plus à coeur : ouvrir une nouvelle voie. Tant pis pour les aficionados du jeu initial et les râleurs de tous poils qui s'insurgent contre cette dénaturation du jeu vidéo qui les a fait rêver, et tant mieux pour le cinéphile qui a bien le droit de rêver lui aussi. C'est pour cette même raison que "Final Fantasy" est un film unique, qu'on déposséderait volontiers de la notation " film tiré de..", qui s'applique à "Tomb Raider" et bien d'autres avant lui, lesquels obéissent tous corps et âmes au respect "financier" du jeu par lequel ils sont nés, trop effrayés à l'idée d'explorer des voies nouvelles et dénaturer ainsi l'espace réservé aux moutons qui lâchent enfin leurs manettes pour se replonger dans l'univers de leur jeu favori sur grand écran. La revanche du cinéma sur le jeu vidéo en quelque sorte.
Avant d'être un exploit technique, un exemple de virtuosité et d'intelligence conceptuelle, "Final Fantasy" est avant tout un vrai film de cinéma, qui marie amoureusement les recettes du film de genre, populaire et efficace, aux caractéristiques audacieuses du film d'auteur, composé avec talent par de grands acteurs.
Vrais ou faux, quelle importance...

Romain-

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