Un été italien : langueur et subtilité dans un Winterbottom mineur

Posté par MpM, le 14 avril 2009, dans Critiques, Films.

Un été italien"Il y a une différence entre changer d’appart' et changer de pays."

L'histoire : Suite à la mort accidentelle de sa femme, Joe (Colin Firth) décide de partir à Gênes avec ses deux filles pour y commencer une nouvelle vie. L’aînée se fait vite de nouveaux amis, mais la petite voit partout le fantôme de sa mère…

Ce que l'on en pense : Michael Winterbottom a le chic pour alterner adaptations littéraires prestigieuses (Jude l’obscur, Redemption), faux documentaires hyper-réalistes (In this world) et biopics décalés (24 hour party people, Un cœur invaincu), aussi ne l’attendait-on pas forcément dans le registre du drame familial intimiste. Et le fait est que cet Eté italien (Genova en version originale) ne fera pas forcément date dans sa filmographie.

L’aspect formel n’est pas en cause, qui réaffirme une nouvelle fois la fluidité de sa mise en scène : fausse caméra subjective portée à l’épaule et suivant les personnages dans le dédale des ruelles génoises labyrinthiques, refus du gros plan lacrymal, sens de l’ellipse. Chaque séquence va droit au but, captant tantôt l’ambiance de cette ville étrangère où le moindre passant semble inquiétant, tantôt les relations complexes qui lient les trois membres de la famille. Fidèle à lui-même, Winterbottom refuse les facilités scénaristiques comme les grosses ficelles émotionnelles, et il évite à peu près tous les écueils, des grandes scènes d’explications mélodramatiques à la révélation de quelque drame secret. Son propos est simplement d’observer la reconstruction d’une famille amputée de l’un de ses membres, les rapports qui peuvent exister entre un père et ses filles, la sensation de parenthèse quand on repart à zéro en un lieu inconnu, avant que la "vraie vie" ne reprenne son cours.

C’est subtil, mais peut-être trop. A force de tout effleurer, de s’arrêter systématiquement avant toute confrontation violente, il finit par donner l’impression de ne pas savoir quelle direction choisir entre la chronique réaliste et le récit fantastique métaphorique. Ainsi, chaque fois que l’intrigue semble atteindre un point déterminant, elle retombe immédiatement dans cette espèce de langueur italienne qui engloutit tout. Le spectateur, lui, a presque envie de secouer les personnages pour qu’ils affrontent enfin leurs problèmes et se décident à régler frontalement leurs conflits. D’accord pour une approche ténue de la question du deuil, de la culpabilité et du ressentiment, mais encore faudrait-il approcher quelque chose. Là, Winterbottom donne surtout l’impression de suggérer une situation insupportable puis d’y apporter artificiellement un dénouement facile, sans jamais prendre la peine de réellement faire parcourir à ses personnages le chemin entre les deux.

Tags liés à cet article : , , , , , , , .

exprimez-vous
Exprimez-vous

Vous devez être connecté pour publier un commentaire.