Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes.



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Touch of Pink (Un soupçon de rose)


Royaume Uni / 2004

13.10.04
 



ELLE ET LUI, ET LUI





"- Il est étranger... Il devrait être un peu étrange, non?"

Enième déclinaison du coming out douloureux dans un environnement traditionnaliste, Touch of Pink est un mix entre plusieurs scénarios déjà lus, déjà vus. D'une part cette communauté indo-pakistanaise musulmane qui perpétue les rites et sauve les apparences à tout prix, de l'autre une génération plus intégrée, prête à tous les compromis mais souhaitant vivre plus librement. Cette confrontation (ce conflit même) est un ressort banal dans le cinéma britannique dpeuis quelques années, de Fish & Chips à Joue-la comme Beckham. Ici il faut ajouter deux ingrédients : l'homosexualité du protagoniste principal et l'absence du père, ou disons la présence mystique d'un père virtuel. Cary Grant.
Notez que ça aurait pu être un extra-terrestre, mais la mère avait foutu le ver dans la pomme en traînant son gamin au cinéma pour voir des mélos et comédies romantiques avec Doris Day et donc Grant. Le film aurait presque gagner à reprendre les codes de ce cinéma à l'instar de l'extraordinaire Loin du paradis ou du très drôle Bye Bye Love, qui flirtaient avec ce cinéma de studio des années 50, jusqu'à lui rendre hommage en le magnifiant. Ici, le traitement est plus classique, même si l'onirisme de cette présence posthume de la star donne un cachet particulier à ce scénario on ne peut plus conventionnel (et qui finira bien évidemment comme dans les contes de fée).
Car si la vérité semble bonne à dire (on a des doutes) la réalité ne semble pas bonne à filmer. Ce Soupçon de rose verse facilement dans l'eau du même nom. Rien de catastrophique. Car il y a une dose de cruauté bienvenue : un amant volage (assumé), une mère indigne (avouée), une tante matérialiste (revendiquée), un cousin prêt à se marier (mais hypocrite), une star défunte narcissique et arrogante (fière de l'être). Le héros a un souci : il ne sait pas qui il doit être (un homme marié qui baise avec des mecs ou un homme qui aime un homme).
Piégé entre une mère belle, mytho, seule et un amant généreux, séducteur, sans amis (sauf ses ex innombrables), le héros paraît presque fade. L'envolée du film coïncide avec le duo mère/amant en promenade dans Londres. Les deux acteurs (Suleka Mathew et Kristen Holden Ried sont épatants) offrent là le plus beau moment de cette histoire. Car les deux sont vénéneux à leur manière, antipathiques ou sympathiques, ils sont charmeurs et résistent surtout à leur égoïsme. Fierté et préjudice! L'effet ciseau est fatal à Jimi Mistry, qui a beau pouvoir se permettre "le chic négligé" vanté par Cary Grant, n'a rien d'attirant, d'aimant. Tout comme il est difficile de croire que Kyle MacLahan puisse être Cary Grant, malgré la tonne de maquillage. Il manque dans la diction, dans le sourire, dans le regard, cette perversité, ce pétillement, cette ironie qui lui était unique. Un Jude Law aurait peut-être mieux fait l'affaire.
Sinon c'est évidemment charmant, agréable, euphorique, tolérant, romantique, prude. Un vrai retour en arrière. Si ce n'est la vision mondialisée de ce monde décolonisé. Toronto et Londres en villes d'accueil (l'une mortelle, l'autre fun) servent de décor à cette immigration en mutation. Etranger dans son propre clan, le personnage d'Alim subit tous les chaos de cette métamorphose où la religion et l'appartenance ethnique a moins d'importance que sa propre liberté. C'est aussi un plaidoyer pour le coming out. C'est là toute la limite du film. Autant il est crédible sur cette vision allégorique d'un garçon qui s'est choisi pour père un ami imaginaire, autant nous savons que peu de mères acceptent aussi facilement ce choix amoureux de leur fils.
Le film est ainsi déséquilibré, entre dialogues percutants (en se moquant gentiment des gays addicts aux abdos) et lourdeurs narratives. Grant est tantôt trop présent tantôt très absent. Il manque un soupçon de subtilité, d'originalité, de noirceur pour que le film nous emporte à l'instar d'un Garçon d'honneur, bien meilleur dans le même style. Les baisers sont fougueux mais les colères semblent factices, trop théâtrales. Ca ne gâche en rien l'a priori sur ce film idéal pour passer une soirée bollywood queer avec obligation de prévoir les kiss cool si vous ne voulez pas que Cary Grant vous sorte que votre haleine est pire que celle d'Irene Dunne. C'était ce mordant qu'on aurait aimé voir, entendre, sentir.
 
vincy

 
 
 
 

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