Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes.



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En bonne compagnie (In Good Company)


USA / 2004

11.05.2005
 



AMERICAN LIE





"- Vous êtes surexcité. Vous êtes passé du moka au Crack?"

Le film de Paul Weitz, s'il pêche par sa forme décidément trop convenue, poursuit le chemin engagé par About a boy, son précédent film. Avec une comédie populaire, dans un cadre moderne, il revient aux basiques de la comédie américaine : quiproquos, message social, inversion des rôles. Le divertissement est plaisant, soigné, les comédiens charment, et le tour est plutôt bien joué. On reprochera peut-être une vision simpliste (quoique) de l'hydre capitaliste. Tout comme les personnages sembleront peut-être un peu caricaturaux, et disons plutôt déjà vus.
En Bonne Compagnie s'intéresse à la folie des hommes, de celle qui leur fait perdre les pédales : l'amour, l'argent, le pouvoir. L'ego phénoménal se transforme en ennemi intérieur. La reconnaissance devient un vice au détriment de l'intelligence, de l'essence même d'un travail. Dans ce monde où l'on sourit tout le temps, naturellement, et en fait, artificiellement, les gens sont terrifiés, morts de trouille, et ne sont plus jugés sur leurs seules compétences. Ce paradoxe dessine un contour très noir à une comédie romantique plutôt légère. En apparences.
En revanche, ce qui n'est pas maquillé c'est l'irresponsabilité, l'immoralité du jeune boss. Ils ne savent que vendre, compter, éliminer, rentabiliser. Ils ne cherchent jamais à rendre le monde meilleur ou ne pensent jamais à long terme. Le contraste avec la relation amoureuse, qui le rend meilleur et qui le contraint à réfléchir sur la durée, est flagrant.
Le film met en scène une série d'oppositions ; le jeune requin et le vieux loup, l'intello émancipée et le manager doué, les réalistes et le rêveur, le baratin et le discours direct. Le petit et le vieux con en clair. Et sans déconneurs. Car ici, c'est une critique et un éloge mélangés du schéma parental qui est sur le grill. Aujourd'hui, on se marie sans aimer, on s'achète une Ferrari sans savoir conduire, on dirige une équipe sans avoir d'expérience professionnelle. Mais, là où le film échoue dans son devoir d'impertinence, c'est dans cette façon naïve et idéaliste de voir le couple de Dennis Quaid, genre Duracell : longue durée et sans anicroches. Il n'y a pas de remise en question et Paul Weitz ne veut pas s'attaquer au mythe du baby boomer bosseur. C'est regrettable. La charge devient du coup trop unilatérale, troip subjective. même si elle amène une jolie morale à cette histoire qui ne se finit pas par un happy end niaiseux. C'est déjà ça.
Le film a l'immense avantage d'être porté par un trio d'acteur en état de grâce, sans oublier des seconds rôles marquants. Les deux (beaux) mecs, semblant solide et finalement très fragiles, pour ne pas dire paniqués, sont liés par la ravissante Scarlett Johansson, idoine.
Pas évident pourtant, entre la somme de jargons débiles et le nombre de sous histoires, d'y faire sa place. Les cadrages et les décors accentuent une forme de dramaturgie humaine (et déshumanisante). Car si le film s'avère banal dans son registre romanesque, sa manière de décortiquer l'entreprise est un point de vue loin du libéralisme ambiant. En Bonne compagnie explique même comment le système se tire une balle dans le pieds et prépare sa corde. Jamais le jeune ("prématurément vieux") n'imagine qu'il pourrait être viré un jour. Au nom de quoi? Jamais il ne se dit qu'il aurait intérêt à s'allier avec une personne dotée d'une expérience et ainsi recevoir son savoir.
Louons donc une comédie classique et agréable d'émettre un propos mordant sur les dictatures contemporaines : une multinationale, ses synergies, sa convergence, ses actionnaires. Bien sur quelques déviations inutiles nous semblent un peu mal venues. Mais l'ensemble est cohérent, éclairant, sans prétention. Entre Le Couperet et un Extravagant Monsieur Deeds, on retient essentiellement l'humiliation produite sur des travailleurs, cols blancs ou bleus, peu importe. On frissonne quand Malcom MacDowell, loin d'Orange Mécanique, vante les Fusions Messianniques. Le rebelle est devenu magnat. Triste raccourci filmographique qui résume 30 ans d'évolution fatidique du capitalisme. Quaid, en bon citoyen, jouera les gauchistes. Ce n'est pas la moindre de ses qualités. Même si l'ironie ne nous échappera pas... Mais restons surpris d'entendre dans un film hollywoodien ceci :"Tout ça est si arbitraire. Je me sens exploité." Nul n'est irremplaçable... Mais ce film qui défend avant tout le salarié et trouve un peu de compassion pour ces jeune yuppies incultes est une forme romancée et moins âpre qu'un documentaire comme The Corporation. Au final, la conclusion se rejoint : il faut faire voir ce film aux DRH, patrons, actionnaires... Le début de la transmission, de l'apprentissage commence là.
 
vincy

 
 
 
 

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