Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes.



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La Neuvaine


Canada / 2005


 



PROCHE DE SAINTE ANNE





"- Est-ce que vous allez mieux qu'hier?
- Oui.
- Mais vous n'allez pas bien.
- Non, pas bien.
- Votre âme est dans l'angoisse...?
"

Une femme dévastée. Un destin mis sur pause. Un accident de la vie. Une conscience dans la noirceur. Il faut reconstruire.
A l'instar de 20h17 rue Darling, qui traitait aussi de l'anéantissement, Bernard Emond cherche des réponses au milieu d'un fatras de doutes. Dans La Neuvaine, il tente une dialectique impossible entre la foi et la science, l'espoir et la raison, cherchant quelle énergie fait avancer nos moteurs, en cas de panne. Et ici, l'essence c'est justement une forme de sagesse. Ou celui qui croit se met à s'interroger sur ses certitudes. Et celle qui ne sait plus se donne la chance de ne pas pouvoir tout expliquer. Dans les deux cas, c'est la confrontation avec la mort - accidentelle ou naturelle - qui sert de sujet.
Philosophiquement, La Neuvaine est un film fascinant et intelligent. Où le curé et la médecin se regarde en chien de faïence, mais savent s'entendre à défaut de s'écouter. Cinématographiquement, il est tout aussi réfléchi.
Chaque étape du scénario, chaque détail des personnages nous embarquent vers cette résolution : se résigner face au hasard, être libre de ses actes. "- Vous croyez au destin? - Non nous sommes libres. - Alors nous sommes responsables."

Grâce à deux acteurs exceptionnels, jamais caricaturaux ni dans le rôle de la femme perdue ni dans celui du jeune homme simple, et un décor somptueux (en aval de Québec), pas loin du bien nommé Cap Tourmente, le cinéaste tire profit de tous ses atouts. Impossible de croire en Dieu, ni de penser que la médecine peut tout; d'ailleurs la médecin est incapable de se guérir de son mal être. Mais il faut bien quelque chose pour tenir, survivre, accepter. Et la résolution tient dans ce couple, ce duo incroyable entre une dépressive agnostique suicidaire et un jeune illuminé naïf, qui créé une alchimie propre au cinéma : sans honte des sentiments et sans obscénité. A défait d'espérance ou de machines, il existe, il persiste une sorte de générosité, de solidarité, qui donnent au film son caractère. De l'humanisme.
Cette quête d'innocence dans cette relation improbable se noue au bord du fleuve, un jour de suicide. Vaincre le mal, le diable, mais pas la mort. Alors, c'est difficile de mettre fin à sa vie. Surtout qu'elle arrive bien assez tôt comme ça. Personne ne peut-être sauvé dans cette histoire. Hymne à la vie, de ses oies éternelles dans leurs flux migratoires à la photo vieillie des ancêtres du garçon, il s'agit aussi d'un éloge aux racines. Nous ne faisons que passer. Il faut juste passer le relais, avec ses valeurs quand elles sont bonnes. Et dans les deux cas, le médecin comme le "gamin" essaient de faire le bien. La plus belle séquence est sans aucun doute celle où la médecin définit précisément ce qu'est une belle mort, loin des hôpitaux.
A l'image cela donne peu de plans inutiles, des personnages au centre de l'image, des cadrages étudiés : une église trop grande, trop factice, trop kitsch, des paysages à contempler, un automne permanent, des chambres mal éclairées. Une image terne, entre gris et marrons, presque réaliste. Ce sont deux visages remplis d'émotions contrastant avec deux corps presque immobiles. C'est, enfin, une narration éclatée en trois temps : la voix off qui raconte le passé, ce fait divers qui la hante en flash backs, et cette errance vers l'inconnu. Finalement, la femme qui a perdu son fils et l'orphelin, c'est une rencontre évidente.
Ils ne se verront peut-être plus. Il n'y a pas d'adieux. Pas de happy end. Juste une neuvaine qui s'achève. Neuf jours de la vie d'une femme qui doit trouver sa place entre sa vocation, son métier, son avenir. Universel, le film est un bel essai sur notre perte de repères dans un monde de plus en plus individualiste, de moins en moins spirituel. Une observation méticuleuse et bien écrite sur le comportement de chacun face à notre issue à tous. Sans drame superflu, sans larmes manipulées. Avec une retenue et une décence qui rendent le film digne de bout en bout.
 
vincy

 
 
 
 

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