Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes.



Ailleurs
Calamity, une enfance de Martha Jane Cannary
Effacer l'historique
Ema
Enorme
La daronne
Lux Æterna
Peninsula
Petit pays
Rocks
Tenet
Un pays qui se tient sage



J'ai perdu mon corps
Les misérables
The Irishman
Marriage Story
Les filles du Docteur March
L'extraordinaire voyage de Marona
1917
Jojo Rabbit
L'odyssée de Choum
La dernière vie de Simon
Notre-Dame du Nil
Uncut Gems
Un divan à Tunis
Le cas Richard Jewell
Dark Waters
La communion



Les deux papes
Les siffleurs
Les enfants du temps
Je ne rêve que de vous
La Llorana
Scandale
Bad Boys For Life
Cuban Network
La Voie de la justice
Les traducteurs
Revenir
Un jour si blanc
Birds of Prey et la fantabuleuse histoire de Harley Quinn
La fille au bracelet
Jinpa, un conte tibétain
L'appel de la forêt
Lettre à Franco
Wet Season
Judy
Lara Jenkins
En avant
De Gaulle






 (c) Ecran Noir 96 - 24


  



Donnez votre avis...


Nombre de votes : 28

 
Sympathy for Lady Vengeance


Corée du Sud / 2005

16.11.05
 



LA VENGEANCE AU DOUX VISAGE





''C’est le kidnappeur qui kidnappe l’enfant de la kidnappeuse !''

On dit de la vengeance qu’elle est un plat qui se mange froid. Pour les héros de Park Chan-wook, elle mijoterait de préférence au bain-marie. Passé la surprise Sympathy for Mister Vengeance et la claque Old boy (Grand Prix à Cannes en 2004), on pouvait légitiment craindre de ce réalisateur de génie, une surenchère tant visuelle que thématique pour clore une trilogie magnifiquement entamée en 2002. Il n’en est rien. Si Lady Vengeance reprend les thèmes récurrents aux deux premiers ''épisodes'', il apparaît néanmoins comme le plus ''soft'' de tous. Mais pas le moins marquant. Malin, Park Chan-Wook opte pour un personnage féminin installant irrémédiablement un incroyable sentiment de gêne et de malaise même chez les esprits les plus conciliants. Si les deux héros masculins de Mister Vengeance et d’Old Boy étaient les victimes d’un système ou de la sournoiserie toute humaine, Geum-ja, elle, apparaîtrait en comparaison, comme un monstre hautement déglingué. Le meurtre d’un enfant ne peut-être que le plus odieux des gestes. Les toutes premières séquences développant le crime innommable imputé à la jeune femme vont effectivement dans ce sens.

Mais chez Park Chan-wook rien n’est moins sûr. Surtout depuis Old boy. Se jouant brillamment du public, le réalisateur laisse planer le doute quant au véritable sens de son histoire et à la personnalité de son héroïne. Tantôt angélique et tantôt démoniaque, Geum-ja reste une énigme pour tout un chacun. Son apparence physique ajoutant encore au mystère : lumineuse et souriante derrière les barreaux, sombre et froide dans la ville (Yeong-ae Lee, inoubliable). La mise en scène de Park Chan-Wook d’ordinaire si électrique et flamboyante se fait ici plus discrète. En apparence. La première demi-heure du film en est l’exemple même. Usant d’un art du montage aussi cassant que subtil, le réalisateur prend le temps qu’il faut pour présenter ses personnages, leur passé, leur présent comme leur futur. Tandis que Geum-ja elle, continue de tirer les ficelles et de préparer son coup. Mais quel coup d’ailleurs ? Car si Park Chan-wook sème ci et là quelques indices propres à stimuler notre imagination, il reste étonnement discret quant à la nature réelle de Geum-ja. Coupable ? Innocente ? Coupable et innocente à la fois ? Rien ne filtre. Au public d’en décider.

Mais la véritable nature de Park Chan-Wook reprend ses droits et Lady Vengeance s’emballe. Les morceaux du puzzle jusque-là dispersés aux quatre coins de l’écran, se joignent pour dévoiler le terrible secret. L’apparition du personnage de Min-sik Choi (Dae-su Oh dans Old boy) sonnant comme le point de départ du grand déballage. L’atmosphère se fait plus sombre et plus insoutenable. La violence calculée du cinéma de Park Chan-wook n’en est pas pour autant une violence conciliante. Moins frappante que dans Old boy, elle en est presque plus dérangeante. Parce qu’il ne se refuse à montrer l’ ''immontrable'', Park Chan-Wook contraint le spectateur à imaginer les atrocités commises hors cadre. Ce n’est pas là la seule ''épreuve'' infligée au spectateur. Dans le décor tout symbolique d’une école abandonnée, se joue l’ultime drame. Au méchant d’y expier ses pêchés. Et aux victimes d’y obtenir réparation. Le malaise est évident, palpable. Pour Park Chan-wook, l’intolérable se passe de commentaires, mais pas pour autant d’humour. Nous rions avant de nous rétracter de nous être si humainement laissés aller. Face à la vengeance implacable qui se joue devant lui, le spectateur épousera les sentiments de tous les protagonistes, la ''victime'' comme les bourreaux. Avant d’endosser à nouveau son rôle de simple spectateur. A ce titre, la ''leçon'' concoctée par Park Chan-wook n’en n’est que plus géniale. Il n’est pas interdit pourtant de ressentir un air de déjà-vu. Old boy avait sans doute déjà dit l’essentiel. Et Park Chan-Wook en est le premier conscient. Le message moralisateur dont il fait parfois preuve (la séquence finale, trop longue, en étant l’exemple parfait) risque d’animer ses détracteurs et d’indisposer bon nombre de spectateurs. Rien pourtant qui n’appelle à la vengeance. Ce film imparfait mais inoubliable ne mérite pas un tel excès. Au contraire.
 
jean-françois

 
 
 
 

haut