Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes.



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Adieu Cuba (The Lost City)


USA / 2005

09.08.06
 








ANDY FIDELE


« La fin justifie les moyens»(Che Guevara)


Andy Garcia réalise avec Adieu Cuba son premier long-métrage pour le cinéma. Un projet ambitieux : celui d’aborder la révolution cubaine plus sérieusement que ne l’avaient fait jusque là les rares films hollywoodiens (comme Havana de Sydney Pollack) ayant osé s’attaquer à cette page d’histoire trouble et meurtrie. On peut d’ores et déjà lui en attribué le courage. Cependant, cet hommage à la bravoure des combattants (des deux bords) n'est pas la hauteur de l'Histoire. Ce film marche trop sur les traces de Casablanca, dans lequel Humphrey Bogart, propriétaire de night-club, tombe amoureux de la belle Ingrid Bergman pendant la Seconde Guerre mondiale. Adieu Cuba n'en est qu'une pâle copie. Malgré toute la passion, l’intelligence et la sincérité qui se dégage des images, il compose un chant d’amour maladroit, voire un peu bancal, qui aurait gagné à être resserré.
Ayant rêvé, imaginé et écrit mentalement ce film pendant près de deux décennies, on pouvait penser que trop d’enthousiasme a tué l’essence même de l’oeuvre, qui pêche par sa longueur. Il s’éparpille dans des scènes inutilement longues et des intrigues secondaires ayant du mal à trouver leur sens au milieu du fatras. Le récit s’attarde sur les déchirements familiaux provoqués par l’arrivée d’un nouveau pouvoir et finalement, laisse les personnages sans réelle consistance.
Est-ce une volonté du réalisateur que de ne pas vouloir se compromettre politiquement en allant trop loin? On ne pourra s’empêcher de penser que le cinéaste a voulu faire une critique acerbe (procédé très à la mode en ce moment à Hollywood), dirigée à la fois sur le régime de Batista et sur la révolution castriste, mais qu’il n’a jamais fait pencher la balance d’un côté ou de l’autre. Il accuse les deux camps d'être responsable de son impuissance. Garcia n’essaie pas d’imposer une vision tranchée mais de rétablir une certaine vérité politique, à l’aide de preuves avérées tout en se voulant juste (par exemple en démythifiant le Che). Un parti pris un peu réducteur, voire absent. Trop hollywoodien dans sa forme (on parle anglais et non espagnol), le film souffre de son individualisme : le scénario opte pour une famille plutôt que pour le peuple en guise d'identification. Les images d’archives distillées à doses homéopathiques n’ont pas la force explicite suffisante.


Le récit révolutionnaire est jalonné d’une inévitable histoire d’amour à la David Lean, où ce dernier est déchiré entre sa passion pour la lutte et les sentiments qu’il éprouve pour sa muse (Dr Jivago). La « veuve de la révolution » personnifie une métaphore filée, celle d’un pays qui perd son identité dans une lutte pour la liberté, d’un changement inévitable et surtout d’un amour impossible. Inès Sastre exprime avec beauté cette évolution nationale, tantôt éprise de l’homme qui l’a séduite, tantôt dévouée pour le pays qu’elle chérit. Quant à Andy Garcia, on ne peut lui reprocher de se donner le beau rôle, celui d’un homme généreux, qui fait ce qu’il peut pour aider ceux qu’il aime et qui n’est pas sans rappeler Le Parrain, à l’influence et au pouvoir immense. Il a énormément de difficulté à se sortir de cette image coppolienne...
En revanche, les talentueux Bill Murray et Dustin Hoffman, pourtant mis en tête d’affiche, semblent ne jouer qu’un faire valoir sans grande utilité pour le récit. Manière de solidifier le projet pour rassurer les financiers? Le premier, sous les traits d’un écrivain loufoque, apparaît comme un clown sorti de sa boite magique, n’ayant aucun rôle apparent si ce n’est d’apporter quelques traits d’humour – pas forcément drôle. Le second, incarne un patron de la mafia et ne reste à l’écran qu’une dizaine de minutes dans tout le film.
Un travail de photographie minutieux et une mise en scène soignée, où les couleurs des costumes, les décors naturels et les scènes de révolution prennent une intensité palpable rendent le film agréable à voir, et un peu désuet. La juxtaposition rapide des plans mélangeant danse, musique et moments cruciaux, donne tout le sens dramatique et un rythme apparemment endiablé, à l'image de ce que l'on imagine d'un pays latin en révolte. Ils contrebalancent les plans interminables de scènes d’amour, usant avec peu de retenue de gros plans façon publicité pour savon à petit budget.
Et pourtant, de nombreux symboles et figures métaphoriques se succèdent tout au long de la pellicule - héritage hispano-baroque – même si, parfois, elles sont un peu grotesques (comme l’entrée d’une colombe dans le palais au moment où celui-ci va être pris d’assaut par les révolutionnaires).
La musique se mue en personnage à part entière. Elle représente l’essence du monde de Fico et sa lente disparition (le saxophone est un instrument impérialiste) reflète la fin d’un mode de vie. L’élégance traditionnelle et le romantisme de la Danzon, le caractère enjoué et la séduction du Mambo et du Cha-cha-cha, le drame et le conflit de la Rumba, les congas des rythmes afro-cubains et les mystérieuses percussions de la Santeria ravissent l’oreille du spectateur autant qu’ils donnent vie et réconfort au peuple cubain.


L’histoire d’Adieu Cuba confirme que les mauvais départs conduisent aux pires fins, surtotu quand elle en a les moyens. Un certain idéalisme qui contrebalancera les horreurs de notre époque : il y a encore des acteurs Hollywood qui croient aux vertus de l'évasion par de belles images, des femmes glamour et de jolies mélodies.
 
Marie

 
 
 
 

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