Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes.



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Inland Empire


USA / 2006

07.02.2006
 





Le livre Bye Bye Bahia


MA FEMME EST UNE ACTRICE

« Un remake ? Je n’avais pas accepté un remake… »

Une femme dans la tourmente, telle est l’accroche épurée qui pourrait effectivement résumer ce nouveau long métrage de David Lynch, absent des grands écrans depuis quelques années déjà. De la part du maître, le sujet n’a rien de très surprenant au premier abord. Rares ont été en effet les personnages habilités à couler des jours paisibles sur l’ensemble de sa filmographie. De même le cadre deviendrait presque familier puisque le réalisateur avait déjà fait dernièrement de l’univers hollywoodien son terrain d’étude pour Mullholland Drive. Choix somme toute naturel si on considère que le haut lieu du cinéma californien cristallise toutes ses obsessions schizophréniques en faisant cohabiter de façon contrastée des réalités multiples : strass et paillettes du showbizness et misère profonde régnant sur Hollywood Boulevard notamment, une des artères les plus mal famées de la ville. Idem, Inland Empire se focalisera cette fois encore sur le destin d’une actrice, soit la personne providentielle pour développer un dédoublement de personnalité par la seule pratique de son métier. Autant de bis repetita qui sembleraient indiquer sinon que Lynch ne se renouvelle pas, en tout cas qu’il a trouvé les éléments idéals et définitifs pour pousser ses hypothèses sensorielles au plus près de leurs limites, bien au-delà des portes qu’il se gardait de franchir en laissant planer le mystère. Préservant ses thématiques, c’est son cinéma qu’il remettra du coup en question, ne trahissant pas sa réputation d’homme d’image en perpétuel apprentissage. Libéré des chaînes de la Panavision, de l’Eastman Kodak et des plateaux encombrés, le cinéaste s’adonnera aux joies du bricolage numérique de pointe sans perte de qualité photographique majeure. La bénéficiaire principale de cette émancipation sera Laura Dern. Lynch se focalise sur la comédienne au plus près, captant tous ses changements d’état, confrontant, dans une confusion audacieuse de miroirs multiples aux reflets infinis, la femme, l’interprète à la ville et son rôle en gestation jusqu’à faire exploser toute frontière identifiable.

Si Lynch avait jusqu'alors l'habitude d'observer ses protagonistes en déséquilibre sur les bords d'un précipice insondable, il créait une rupture avec l'ordre en plantant avant tout des décors familiers, en utilisant sciemment même des balises populaires (la série télé). En quête d'abstraction, il ne s’attardera désormais que fort peu sur les préliminaires, pour ne plus filmer que la chute dans le vide, telle une gigantesque odyssée dans laquelle le temps et la logique s’effacent. Un pari risqué et sans véritable rampe (scénaristique), qui tourne rapidement au patchwork hasardeux (intuitif ?). Certes le voyage réserve quelques fulgurances remarquables, mais il accumule aussi des redondances et des associations peu heureuses quand le conteur tente de lier au sein du film les derniers travaux (préparatoires) en date du créateur (Rabbits, Darkened Room) en une gigantesque compile peu digeste. Traiter le centre de la folie libère tous les partis pris mais n’autorise pas tous les excès expérimentaux, car le format fondamental du film impose une certaine contrainte de lecture indépassable, à commencer par le timing. Il faudra en effet trois heures de déroulement de bobine pour que Laura Dern / Nikki Grace / Susan Blue parvienne(nt) au bout du rouleau. Une durée bien réelle et peu relative qui tend à diluer les meilleurs effets pour tirer la fiction vers la pure performance artistique (juste une peinture qui bouge ?). L’art était au service du cinéma de Lynch, les rôles paraissent désormais inversés.

Il demeure néanmoins qu’avec Inland Empire, David Lynch, ivre d’innovation, peut se féliciter, à un âge où certains prennent leur retraite, de revendiquer encore, face à l’industrie cinématographique, son statut de créatif, libre et indépendant. A défaut de livrer un chef d’½uvre frôlant une perfection narrative à laquelle il nous avait habituée, il préférera se mettre en danger en concédant un brouillon foisonnant, décomplexé et parfois un peu assommant par manque de sélectivité. Tâtonnant, Lynch n’en perd pas pour autant son sens légendaire de la dérision et le numéro musical incongru en générique de clôture sera du coup interprété comme un mot d’excuse à l’adresse des fans les plus pointilleux sur la rigueur. On l’attend déjà au prochain tournant…
 
PETSSSsss-

 
 
 
 

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