Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes.



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Je suis une légende (I Am Legend)


USA / 2007

19.12.2007
 



SEUL AU MONDE, OU PRESQUE





"-Ils sont en état de dé-évolution. Il n'y a plus aucun signe du comportement humain typique"

Il y a deux manières de regarder Je suis une légende. Comme un bon gros divertissement à grand spectacle et légers frissons ou comme l'adaptation d'un roman à thèses considéré comme un monument de la science fiction traditionnelle. Dans le premier cas, on n'est pas tellement déçu, ni surpris, puisque l'on a droit au minimum syndical : la reconstitution d'un New York réinvesti par la nature est convaincante, les mutants sont hideux et effrayants, de grands flots d'émotion se déversent à chaque flash-back, accompagnés comme il se doit par force musique tonitruante, et le Bien est prêt à tous les sacrifices pour triompher du Mal. Dans la seconde hypothèse, on est juste outré par le véritable saccage réalisé par les différents scénaristes s'étant acharnés sur l'œuvre de Richard Matheson.

Ceux-ci ont soigneusement gommés toutes les aspérités qui ont fait de l'original un livre sombre et profond sur la nature humaine : plus d'expéditions punitives et catharsiques pour assassiner les mutants dans leur sommeil, plus la moindre référence humoristique aux légendes antiques sur les vampires (remplacés on ne sait pourquoi par des zombies ayant régressé à un stade extrêmement primitif), plus aucune description de la contamination progressive et traumatique de tous les résistants. Même le fait que la femme de Robert Neville ait été elle-même touchée par le virus a été modifié pour une mort accidentelle plus "propre" et mélodramatique. Finalement, le seul élément que le film ait conservé est l'immense impression de routine qui se dégage du quotidien du héros : horaires calés sur le soleil, tournée qui le mène aux mêmes endroits chaque jour, activités dérisoires et immense solitude. C'est aussi là que se situe la seule force du film : l'interprétation de Will Smith, presque disproportionnée dans son côté dramatique comparé à la minceur du script aux étapes prévisibles.

Les séquences d'exposition, le mettant en scène dans un New York désert et abandonné, sont d'ailleurs plutôt réussies. On ressent le vide vertigineux qui se dégage de ces longues artères vides et silencieuses, ainsi que l'impression d'écrasement créée par les buildings en ruine. Le travail sur le son (gazouillis d'oiseaux et résonance du moindre bruit de pas) est également assez impressionnant. Dommage que certains passages censés alléger l'ensemble, et révéler l'extrême vulnérabilité du personnage principal, frôlent le ridicule. Ainsi, on ne parvient pas à être touché quand Robert Neville s'entoure de mannequins de silicone à qui il prétend faire la conversation, ni lorsqu'il traite son chien comme s'il s'agissait de sa fille.

En reformatant l'histoire originelle, Francis Lawrence et son équipe l'ont tout simplement vidée de tout sens. Ils n' obtiennent au final qu'un énième blockbuster dégoulinant de bons sentiments et de sens du devoi où l'intrigue se résume à un nouveau combat pour la survie de l'espèce. A ce compte-là, même le titre est dévoyé (il évoque dans le roman le renversement de situation entre vampires et êtres humains), et toute l'originalité de l'approche de Matheson noyée dans un amas de clichés et de stéréotypes directement tirés des pires films du genre. Non seulement on n'a guère peur et l'on n'est jamais horrifié, mais en plus la dimension sociale et symbolique de l'intrigue est réduite à néant. Soit une négation absolue du film de zombies… ô combien révélatrice !

Car ce qui ressort de Je suis une légende, c'est qu'une fois encore l'Amérique a besoin de pouvoir compter sur un héros prêt à tout pour la sauver. Autrement dit, de croire en l'avenir et de garder espoir, même quand tout invite au pessimisme le plus noir. L'indéfectible mythe du Sauveur capable de rendre aux hommes leur Humanité a encore de beaux jours devant lui... A la fois infantile, touchant et un peu révulsant. D'autant qu'au final on peut s'inquiéter : la vision d'une Amérique recluse dans une ville fortifiée éloignée des "zombies". Incapable de maîtriser le progrès, impuissante à contenir les menaces "fantômes", la science a le dernier mot, mais toujours au nom d'une vision religieuse ou mystique (seon l'interprétation). Finalementle blokbuster trop peu profond, sans aucune asprité pou nous faire partager ce qui aurait du être une expérience palpitante et angoissante.
 
MpM

 
 
 
 

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