Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes.



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Watchmen, les gardiens


USA / 2009

04.03.2009
 



DU SUPER HÉROS AU SURHOMME, ET DU SURHOMME A L’HOMME





"L’existence de la vie est un phénomène largement surestimé."

Enfin, l’attente est comblée, l’adaptation graphique la plus attendue depuis bien longtemps déboule sur nos écrans pour un spectacle de près de trois heures. Le résultat ? Une œuvre boulimique dans son désir de transcrire les fameux Watchmen à l’écran qui, si elle a parfois tendance à s’égarer (le film gagnerait en intensité en ne dépassant pas les 2h20), n’en demeure pas moins un spectacle total fidèle au matériau d’origine et relevant la plupart des défis imposés.

Le leitmotiv des Gardiens

Seul roman graphique à avoir été cité dans la revue Time magazine parmi les "100 Meilleurs romans de langue anglaise de 1923 à nos jours", l’aventure Watchmen est un sujet complexe, existant sur plusieurs niveaux où tour à tour le Temps, l’Histoire et le concept de super héros s’imbriquent et se désagrègent. Lors de sa sortie, outre ses qualités graphiques, la particularité du roman fut de présenter des super héros plus humains que surhumains aux prises avec leurs névroses et leurs échecs. Excepté le Dr Manhattan, scientifique victime d’un accident dont le corps explose en une myriade de particules mais qui parvient à se recomposer chimiquement et à décomposer la matière jusqu’au niveau subatomique, aucun des super héros en question ne détient de super pouvoirs. Seule une soif bien personnelle de justice les anime et les pousse à endosser les masques de Gardiens de la folie humaine.
L’intrigue se déroule donc dans une Amérique alternative de 1985 où des super héros masqués font partie de la vie quotidienne et où l'Horloge de l'Apocalypse - symbole de la tension entre les Etats-Unis et l'Union Soviétique - indique en permanence minuit moins cinq. Un monde caché donc, habité par la peur et la paranoïa, où Nixon est prêt à riposter, où la Cité est le théâtre de la déliquescence de l’humanité, et où la question du Bien et du Mal s’immisce dans chaque décision. Cette thématique sera d’ailleurs résumée à travers cette question taguée sur le mur d’une impasse au début du film : "Who watches the Watchmen ?"

Du papier à l’écran

Cette vision singulière du justicier, ancrée dans les années 80, était particulièrement difficile à mettre en images de par la simultanéité des intrigues (les six Watchmen ont tous autant d’importance), les allers-retours historiques (le livre couvre près de cinquante ans d’histoire) et les procédés métafictionnels du roman. Enfin il était hors de question d’actualiser le roman mais bien de le filmer "en l’état" afin de ne rien perdre de l’essence originelle et de son contexte historique. Et sur la plupart de ces tableaux, Snyder réussit l’impossible, virevoltant entre les portraits psychologiques de ses héros, mention à Rorschach avec son masque noir et blanc aux stries mouvantes qui traîne derrière lui toute sa haine de la bassesse humaine, la peinture d’une Amérique en proie au danger du nucléaire, la narration diffractée et les coloris très "pulp" des décors et des costumes. Autant d’éléments que le réalisateur embrasse par une mise en scène assez transparente, s’efforçant de la rendre la plus intelligible possible afin de créer les ponts nécessaires entre chaque soubassement de l’histoire. En terme de lisibilité, les séquences de combats sont d’ailleurs parfaitement chorégraphiées, bluffantes de la violence sourde et stylisée que l’on trouvait déjà dans 300.
Et si le roman Watchmen regorgeait de défis narratifs et techniques, l’un des plus difficiles était de parvenir à mettre en image l’univers du Dr Manhattan. C’est sans compter sur le talent du bonhomme. Sans vouloir trop en dire, les visions dantesques et la force idéologique qu’offrent les séquences avec le Dr Manhattan valent à elles seules le déplacement. A la fois démiurge involontaire et monstre omnipotent, il incarne toute la fureur visionnaire et la complexité thématique du roman du haut de son Palais de Verre.

"L’existence de la vie est un phénomène largement surestimé." dit-il. Peut-être, mais "elle mérite qu’on se batte pour elle". Cet échange condense à lui seul toute la problématique et la richesse des Watchmen.
 
Denis

 
 
 
 

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