Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes.



Ailleurs
Calamity, une enfance de Martha Jane Cannary
Effacer l'historique
Ema
Enorme
La daronne
Lux Æterna
Peninsula
Petit pays
Rocks
Tenet
Un pays qui se tient sage



J'ai perdu mon corps
Les misérables
The Irishman
Marriage Story
Les filles du Docteur March
L'extraordinaire voyage de Marona
1917
Jojo Rabbit
L'odyssée de Choum
La dernière vie de Simon
Notre-Dame du Nil
Uncut Gems
Un divan à Tunis
Le cas Richard Jewell
Dark Waters
La communion



Les deux papes
Les siffleurs
Les enfants du temps
Je ne rêve que de vous
La Llorana
Scandale
Bad Boys For Life
Cuban Network
La Voie de la justice
Les traducteurs
Revenir
Un jour si blanc
Birds of Prey et la fantabuleuse histoire de Harley Quinn
La fille au bracelet
Jinpa, un conte tibétain
L'appel de la forêt
Lettre à Franco
Wet Season
Judy
Lara Jenkins
En avant
De Gaulle






 (c) Ecran Noir 96 - 24


  



Donnez votre avis...


Nombre de votes : 33

 
The Limits of Control


USA / 2009

02.12.2009
 



AN AMERICAN TOURIST





« - Vous ne parlez pas l’espagnol, n’est-ce pas ?»

Une errance. Rimbaud est invoqué dès la première image. Un point de non-retour où il faut savoir se laisser embarquer dans un voyage itinérant, un thriller abstrait, une forme de cinéma surréaliste, aux limites de l’absurde.
Comme dans Broken Flowers, The Limits of Control est une route ponctuée de visages. Ce sont ces visages qui forment le voyage. Mais Jarmusch ne revisite pas la comédie romantique. Il a préféré le polar. Un peu Hitchockien sur les bords. Le prétexte n’a aucune importance, le suspens tient à un fil, conducteur, le personnage principal et ses rencontres. De Mcguffins en Mcguffins, on file vers une destination inconnue, porté par la musique expérimentale, sensorielle, de Boris.
Il échange Bill Murray le flegmatique contre Isaach de Bankolé l’élégant. Héros qui a de l’allure. Cousin pas très éloigné de Ghost Dog. Tout aussi mutique ou presque, le charisme est physique. Le magnifique Bankolé observe le monde et ne se détourne pas de sa cible. Il n’a que trois fonctions : regarder un tableau dans un musée, boire deux expressos dans deux tasses séparées, avaler les messages cryptés cachés dans les boîtes d’allumettes qu’on lui fournit. Le mystère reste entier. Il n’y a rien à comprendre ou à expliquer. Bankolé écoute Schubert, pratique le tai-chi, et change de costumes en soie à chaque étape. Un personnage charismatique à l’ancienne. « No guns. No mobiles. No sex. » L’anti-thriller.

Lumière !
Cela ennuiera certains par sa langueur, captivera les autres par son pouvoir hypnotique. Il y a toute la trame d’un film qui a pour héros un tueur-à-gages. Mais l’enrobage s’adresse davantage aux amateurs de Godard et d’Antonioni. « - Tu aimes mes fesses ?» demande Paz de la Huerta, décidément à l’aise en tenue d’Eve (à l’instar de son rôle exhib dans Soudain le vide de Noé) malgré ses seins asymétriques. « Oui » répond impassible et distant Bankoolé. «- Tu n’aimes pas le sexe ? » « Jamais quand je travaille. »
Il y a une fascination à se laisse hypnotiser par ces séquences purement cinématographiques tant rien n’est réaliste. « Rien n’est vrai. Tout est imaginaire. » Même l’Espagne qui lui sert de décor est un reflet déformé de l’Amérique des Westerns et des polars urbains. Une Madrid de gratte-ciel, des autoroutes, des trains, des étendues sauvages et désolées, … la lumière omniprésente, jusque dans l’avion… d’Air Lumière.
Cette mise en abime d’un genre se nourrit en effet de références (Welles est cité comme un parrain), de vieux films et de rêves. Chaque comédien illustre cette fantasmagorie, à en devenir des objets fétichistes de l’image : le cowboy mexicain, la femme fatale (Tilda immaculée), la chauffeuse étrangère…

Jeux de rôles
Les comédiens dégagent une telle présence qu’ils impriment nos regards, les habitent voire les hantent. Toujours ce côté physique dans ce film, contrairement à l’aspect psychologique du précédent. Car les dialogues ne répondront pas à nos interrogations.
Il ne faut pas manquer la première séquence, presque « tarantinienne », où Descas traduit par Stévenin va énoncer la plupart des phrases entendues ou lues dans le scénario. Elles s’égrainent tout au long du jeu de piste, qui est aussi un jeu de rôles. Tout comme les objets réapparaissent et font surgir les séquences passées. Le reflet, subjectivité et inexactitude, est le miroir d’une réalité arbitraire. Le seul monde réel qui existe est celui que notre tueur-à-gages doit éliminer : des hommes en noir, avec armes, hélicoptère, caméras de surveillance. Pour résister, il y aura les poètes, les savants, les artistes, les bohémiens. Ces gens qu’il rencontre, qu’il contemple.

« Ce qu’est vraiment le monde » ? Une vie, un voyage qui, finalement, ne sert qu’à s’ennuyer, se cultiver, se laisser aller. Que des choses non productives et inutiles. Jarmusch signe une œuvre utopique sur la liberté absolue.
 
vincy

 
 
 
 

haut