Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes.



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Les chemins de la liberté (The Way Back)


USA / 2011

26.01.2011
 



LA TRES GRANDE EVASION





«- Je crois que tu as déjà tué. Tu fais trop de prières pour un homme innocent. »

Peter Weir a un talent de conteur indéniable. Qu’il nous embarque dans la télé réalité ou sur les océans violents, dans le traumatisme d’un survivant ou une salle de classe, dans une communauté d’un autre temps ou dans un coup d’état violent, le cinéaste a toujours eu ce flair de mêler son sens du romanesque à un genre particulier : drame, comédie romantique, thriller, aventures. Weir aime voyager (et nous évader), filmer des environnements exotiques, transporter les personnages et les spectateurs au bout de leurs limites. Les chemins de la liberté ne fait pas exception.

Ce long périple, qui s’inspire de faits historiques mais pas de vies réelles, captive plus par le dépassement des individus que par le dépaysement. On a déjà vu la Sibérie mieux filmée, le désert plus cinétique, l’Himalaya moins pittoresque. Honnêtement, la direction artistique est à la hauteur, sachant que le tournage a planté ses caméras en Bulgarie et au Maroc, et qu’on ne se rend jamais compte du subterfuge. Film à budget moyen (même pas 30 millions de $), produit indépendamment, Weir a réussi des prouesses pour rendre crédible cette aventure transfrontalière qui nous emmène de la Russie à l’Inde, en passant par la Mongolie et la Chine.

Mais là où Weir nous transporte le plus mieux c’est dans la dimension humaine de cette épopée. Si les personnages ne sont pas assez approfondis, ou semblent parfois caricaturaux, il les pousse tellement dans leurs retranchements physiques et mentaux qu’ils en deviennent, non pas héroïques, mais humains tant leur souffrance, leur épuisement, leur défi nous paraissent terriblement touchants.

Les chemins de la liberté est une œuvre inégale. À la fois classique dans sa narration (on croise toutes les vedettes dès l’arrivée au goulag) et authentiquement dramatique (la fin victorieuse a un goût morbide), le film n’exploite pas toutes ses possibilités (l’environnement naturel notamment) mais n’hésite pas à nous confronter à l’effroi d’une telle audace (des milliers de kilomètres à pieds dans un milieu hostile).

Weir fait quelques choix étonnants. L’évasion du goulag est furtive, à peine visible. Comme si elle n’avait aucun intérêt. La prison n’est pas seulement le camp enfermé par ses barbelés et ses miradors : ce sont aussi les 13 millions de kilomètres carrés autour. Aussi tout le film est une évasion, interminable, mais pas ennuyeuse, et fatale pour beaucoup. La musique, affreuse au début, prend ses marques. Les comédiens, peu charismatiques dans la première demi heure, comme fonctionnant par automatismes, insufflent des subtilités et des contrastes dans leurs personnages. Une fois le lac Baïkal atteint, le groupe a son équilibre, comme si l’élément féminin surgit de nulle part, apportait l’ingrédient manquant à une recette de cuisine qu’on espère délicieuse. On les sent se libérer, au sens figuré comme au au sens propre, et le film, à ce moment là, découle vers une œuvre moins hollywoodienne. La reconstitution de la Russie trop peu crédible laisse place à des décors plus allégoriques où les tourments humains nous fascinent plus.

Ce retour à l’état primitif, sauvage, cette survie permanente qui conduit à des pensées ou des actes atroces permet à ce voyage d’être un peu plus passionnant. La série B qui aurait pu être kitsch se mue en une oeuvre singulière, presque mystique. La traversée du désert est flippante. Les visages sont brulés. Les morts nous hantent. Les pieds saignent. Hormis un village, les rails du transsibérien et quelques mongols, la solitude est palpable.

Hélas, Weir rate le final chinois et tibétain, série accélérée de cartes postales où les personnages n’ont plus rien à se dire. Il boucle son film de manière un peu précipitée et la dernière moitié du voyage occupe à peine 20 minutes du film. Manque de moyens, Scénario un peu bâclé ? On le regrette d’autant plus qu’il était parvenu à surmonter tous les obstacles érigés au début en transformant son film en une véritable expédition tragique. En délaissant ainsi ses survivants et les spectateurs, il désamorce l’intensité espérée d’un final épique, libérateur et salutaire.
 
vincy

 
 
 
 

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