Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes.



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Les aventures de Tintin - le secret de la Licorne (The Adventures of Tintin)


USA / 2011

26.10.2011
 



LE JEUNE HOMME QUI VOULAIT EN SAVOIR TROP





«- Je connais ces eaux comme les verrues du visage de ma mère. »

Pour un francophone, voir Tintin en anglais (Tinetine en v.o., ce qui dévirilise encore plus cet asexué) relèverait presque de l’hérésie. Oublions ce détail linguistique, les expressions colorées d’Haddock dans la langue de Shakespeare, les Dupont/Dupont transformés en Thomson/Thompson, Moulinsart rebaptisé Marlinspike. Cela reste Tintin, par Spielberg et Jackson.

C’est peut-être la chance du héros de Hergé : ne pas être le Tintin que l’on connaît tous, mais celui d’une vision forcément déformante, mais loin d’être désagréable. Assumons : le divertissement est spectaculaire, redoutablement efficace. Spielberg a trouvé un cousin européen à Indiana Jones, et a reproduit le schéma de Attrape moi si tu peux à un film grand public (comprendre qui plaire de 7 à 37 ans, les plus âgés toujours un peu réacs, regretteront les BD de leur enfance). Le générique (qui multiplie les clins d’œil à tous les albums de la série) est d’ailleurs un écho à la comédie policière avec DiCaprio. Tintin, dans la première partie du film, est un malin constamment traqué. Les rôles s’inverseront par la suite : il deviendra le poursuivant. Comme pour les Indiana Jones, Spielberg a opté pour un scénario en deux temps : une première moitié investigatrice, plus bavarde, parfois très explicative, une enquête triviale ; et une seconde partie basée sur l’action, les rebondissements, où les situations s’enchaînent, une aventure extrême.

Et s’il insère beaucoup d’Hergé dans le film (jusqu’au dessinateur lui-même qui fait le portrait du reporter dans l’introduction du film), s’il n’oublie pas ses références cinématographiques (Hitchcock, Hawks, …), le réalisateur intègre beaucoup de ses précédents films et de ses obsessions pour s’approprier l’œuvre. On y retrouve des Dents de la mer, de 1941, de La Guerre des mondes, des Indiana Jones évidemment… A cela s’ajoute des fantasmes de cinéma (les films de pirates par exemple).

Mais au delà de cette analyse cinétique (et il faudrait revoir plan par plan certaines séquences époustouflantes comme la traversée de l’émirat nord-africain, qui est autant une ode aux délires en cascades de Buster Keaton qu’un monstrueux savoir-faire du découpage, il faut peut-être juste jugé l’essentiel. On peut toujours critiquer ce Tintin sur ce pêché originel qui a été de le faire adapter par des Américains (mais qu’y a –t-il d’étrange puisque c’est l’une des BD les plus « mondialisées » ?), le film est, au final, une prouesse visuelle, qui s’ajoute à un spectacle bluffant.

Cela ne surmonte pas tous les défauts du scénario (un humour un peu écrasé, un décollage un peu poussif de l’histoire) mais ça ne gâche rien au plaisir enfantin que le film procure. Le film est aussi intrépide que son héros. Et l’on sent bien l’esprit ludique qui a animé Spielberg et Jackson à reconstituer maquettes et décors comme s’il s’agissait de modélisme dans son garage. Techniquement, le relief donne une dimension spatiale qui justifie l’usage du 3D. Les personnages, qui ont gagné en finesse avec un dessin plus réaliste, profitent d’une « performance capture » en parfaite adéquation avec le projet. Haddock est celui qui bénéficie le mieux de cette transposition à l’écran.

Le réalisateur s’amuse avec ses gags loufoques, une action débridée, une soif d’excentricités (pour ne pas dire d’exotisme). Mais il est quand même un peu dommage que cela prenne du autant de temps à décoller (au sens propre du terme, puisque le film prend toute son ampleur dès la fuite en hydroglisseur). C’était peut être une gageure de vouloir mélanger autant d’histoires – "Le secret de la Licorne" au centre, avec un bout de "Crabe au pinces d’or" et un morceau du "Trésor de Rakham le Rouge" - pour en faire un premier épisode d’une éventuelle trilogie. L’ensemble a une certaine classe, comme la musique complexe et précise de John Williams. Sans être un chef d’œuvre, c’est sans doute la première fois qu’une BD européenne réussi son passage au grand écran. Spielberg a juste perdu la petite magie qui lui permettait de divertir de manière insouciante. La technologie employée exigeait un perfectionnisme absolu, ce qui enlève sans doute la dose de charme qui l’aurait rendu complètement envoûtant.
 
vincy

 
 
 
 

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