Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes.



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Le cheval de Turin (The turin horse - A Torinói Ló)


/ 2010

30.11.2011
 



LE CRÉPUSCULE DES HOMMES





"L'invité le plus inquiétant se tient à notre porte."

S’il ne devait rester qu’un seul film, à regarder encore et encore jusqu’à la fin des temps, ce serait ce Cheval de Turin, dernier film annoncé de Bela Tarr (on imagine mal le génie hongrois revenant sur sa décision), et œuvre-somme à la beauté bouleversante et vertigineuse. A l’opposée de toute narration traditionnelle, on y suit le quotidien austère et répétitif d'un vieil homme et de sa fille, filmé dans un noir et blanc riche en contrastes et en clairs-obscurs, et découpé en six journées qui semblent former une anti-genèse menant l’Humanité à sa fin. Dans des plans séquences épurés et virtuoses, le cinéaste capte le rythme de l’existence dans ce qu’elle a de plus dépouillé : habillement, cuisine, repas. A peine une parole est-elle échangée, dans cette plaine battue sans répit par le vent, où la musique lancinante et hypnotique de Mihaly Vig est la seule concession à la fiction.

Le spectateur, lui, est hypnotisé par ces gestes minuscules à l’importance capitale, qui ouvrent à la conscience de chaque moment. Il retient son souffle, sidéré par le contraste entre la rigueur formelle du film et le déferlement sensoriel qui en découle. L’humanité livrée à elle-même, dans un élan contradictoire de destruction et de vie, seulement troublé par deux rencontres à portée aussi métaphysique que prophétique. Et que dire du cheval, qui refuse d’abord de sortir, puis de s’alimenter, corps tout entier tendu dans une renonciation qui porte à lui seul cet "insoutenable poids de la vie" mentionné par Bela Tarr.

On est ébloui (mais aussi effrayé) par la radicalité du cinéaste qui confère à son film un statut d'expérience sensorielle et esthétique touchant à l’essence même du cinéma. Mais doit-on encore employer le terme "cinéma" quand l’art pratiqué par le maître hongrois frôle l’absolu du doigt ? Bela Tarr semble inventer une autre dimension artistique qui laisse l’être humain dans un état de flottement, presque de léthargie, qui même lorsqu’il confine à l’ennui, est d’une beauté douloureuse. Il est tout simplement impossible de passer à côté de cette œuvre fulgurante et essentielle, qui offre l’expérience rare d’un violent choc esthétique, métaphysique et existentiel.
 
MpM

 
 
 
 

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