Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes.



Ailleurs
Calamity, une enfance de Martha Jane Cannary
Effacer l'historique
Ema
Enorme
La daronne
Lux Æterna
Peninsula
Petit pays
Rocks
Tenet
Un pays qui se tient sage



J'ai perdu mon corps
Les misérables
The Irishman
Marriage Story
Les filles du Docteur March
L'extraordinaire voyage de Marona
1917
Jojo Rabbit
L'odyssée de Choum
La dernière vie de Simon
Notre-Dame du Nil
Uncut Gems
Un divan à Tunis
Le cas Richard Jewell
Dark Waters
La communion



Les deux papes
Les siffleurs
Les enfants du temps
Je ne rêve que de vous
La Llorana
Scandale
Bad Boys For Life
Cuban Network
La Voie de la justice
Les traducteurs
Revenir
Un jour si blanc
Birds of Prey et la fantabuleuse histoire de Harley Quinn
La fille au bracelet
Jinpa, un conte tibétain
L'appel de la forêt
Lettre à Franco
Wet Season
Judy
Lara Jenkins
En avant
De Gaulle






 (c) Ecran Noir 96 - 24


  



Donnez votre avis...


Nombre de votes : 17

 
Captive


/ 2011

19.09.2012
 



CAMÉRA EMBARQUÉE





"Pourquoi vous êtes encore là ?! Ne nous blâmez pas. Blâmez votre gouvernement."

Brillante Mendoza est un excellent metteur en scène. De Kinatay à Lola, personne ne lui conteste cette qualité rare de donner un réalisme saisissant aux scènes d'action les plus complexes, ou de filmer les scènes les plus anodines avec une force dramatique intense. A chaque nouveau film du prodige philippin, on se régale de ses plans réglés au millimètre et de la virtuosité de ses mouvements de caméra à l’épaule. En revanche, on a pu être plusieurs fois déçus par des scénarios trop minces, étirés en longueur, voire bancals. Avec Captive, on retrouve comme un condensé de ces caractéristiques propres au cinéaste.

Dans un premier temps, on est donc une nouvelle fois séduit par la justesse avec laquelle il sait où placer sa caméra, et comment lui faire accompagner l’action au plus près. Plusieurs séquences illustrent son sens inné du découpage, comme celle du siège de l’hôpital, qui donne au spectateur l’impression d’être lui-même au cœur de l’action. On tient là un élément essentiel du cinéma de Mendoza : inclure celui qui regarde jusqu’à lui faire partager au sens propre tout ce que subissent les personnages.

Or, c’est cette volonté de placer le spectateur dans la situation quotidienne des otages qui amène dans un second temps à déplorer la construction répétitive et peu captivante de son récit. Assez rapidement, on assiste en effet à une alternance de marches dans la jungle et de fusillades filmées avec le plus de réalisme possible, et donc très peu spectaculaires. Au lieu de progresser vers un paroxysme narratif (comme dans la plupart des films d’action classiques), le film semble au bout d'un moment se contenter de répéter en boucle les mêmes situations. Logique, puisque le cinéaste refuse tout artifice scénaristique (suspense, rebondissement, progression dramatique…) pour coller à une forme de naturalisme minimaliste et austère qui lui permet de flirter (comme toujours) avec le documentaire. Toutefois, sur un plan purement narratif, cela finit par donner l’impression que le film tourne en rond, s’enfonçant dans son récit comme les personnages dans la jungle, et peinant à justifier sa durée (plus de 2h). Au final, Mendoza semble incapable de transformer son intention de départ en geste cinématographique cohérent.

De la même manière, le réalisateur ne fait que survoler les relations pourtant passionnantes que l’effet de huis clos permettait de tisser entre les différents protagonistes. L’entraide et les dissensions entre les otages, et surtout l’interdépendance entre otages et terroristes (qui sont contraints de faire cause commune s’ils veulent survivre), auraient pu apporter un second niveau de lecture au film. Mais comme toujours, Mendoza reste à distance, tel un observateur extérieur qui refuse d’aller au-delà du simple témoignage. Même la construction du film, qui se veut choral, essaie d’éviter toute identification avec l’un ou l’autre des protagonistes. Une volonté pour le coup largement contrebalancée par la présence d’Isabelle Huppert qui est incapable de s’effacer derrière son personnage, et lui donne un relief finalement disproportionné.

Reste qu'en réalisant ce film inspiré de faits réels, Brillante Mendoza revendique son désir de prendre ses responsabilités de cinéaste. "En tant que réalisateur, nous sommes d'une certaine manière responsables de ce qui se passe autour de nous", déclarait-il lors de la conférence de presse qui suivait la projection du film à Berlin. "On ne devrait pas s'attarder sur le fait d'être un artiste ou d'être nous-mêmes et s'en contenter. De nombreuses choses se passent autour de nous et ce sont des histoires qui ont besoin d'être racontées comme elles ont eu lieu." A ce titre, Captive est pour le cinéaste un formidable moyen de rappeler, sans prendre parti, que non seulement la prise d'otages de 2001 n'a pas fait avancer la cause politique qu'elle était censée défendre, mais surtout que, depuis, le kidnapping lucratif est devenu monnaie courante dans le sud du pays, sans que personne ne semble pouvoir y faire grand chose...
 
MpM

 
 
 
 

haut