Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes.



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Möbius


France / 2013

27.02.2013
 



LES ENCHAÎNÉS





Eric Rochant à l’âme chevillé au corps. Animé par la passion du cinéma, indispensable disposition pour mettre en scène l’une de ces innombrables histoires impossibles, romanesques et troubles à la fois, le réalisateur d’Un monde sans pitié (1989, déjà) n’a donc pas abdiqué malgré douze ans d’errance et deux films médiocres au compteur (Total Western, L’école pour tous).

Un petit parfum de mystère entourait le retour de l’enfant prodige du cinéma français amplifié par ce titre, Möbius, en référence au ruban de Möbius qui ne possède qu’une seule face. Au-delà de l’attente et d’un casting alléchant avec, dans les rôles-titres, un duo glamour très moderne – Cécile de France et Jean Dujardin –, la proposition tient la route, guidée, entre autre, par la rigueur d’une mise en scène sobre, référentielle, jamais tape à l’œil. Rochant prend son temps pour installer sa petite musique sur fond d’enjeux politico-financier internationaux. Il savoure son retour, se prête au genre – façon La taupe et non Jason Bourne – et introduit ses personnages principaux en deux plans similaires dans un même mouvement de caméra extérieur / intérieur très Hitchcockien. L’invitation est maline, presque évidente, psychologiquement affirmée et donne le ton de ce vrai film d’espionnage aux élans passionnels.

Car sous ses airs complexes aux multiples ramifications où des espions russes, dirigés par Moïse / Jean Dujardin, abordent incognito Alice (Cécile de France), brillante analyste financière travaillant à Monaco, afin qu’elle récupère des données sur un oligarque russe (Tim Roth) pour le compte du FSB (Anciennement KGB), Möbius développe une histoire d’amour plutôt enivrante puisqu’interdite. Elle scellera, d’ailleurs, le sort de ceux qui s’y perdent.

Tout d’abord il y a la rencontre. Filmée dans une boîte de nuit de la Côte d’Azur, celle-ci, malgré le brouhaha clinquant d’un tel lieu, est magique, se compose par un effet de miroir saisissant dans le silence des regards qui se croisent. Rochant n’a rien perdu de sa classe. L’idylle peut alors s’installer pour ne plus quitter l’âme des spectateurs. Les deux acteurs construisent avec brio une relation à fleur de peau marquée par l’urgence d’une situation tendue où chaque force en présence s’épie, s’écoute, s’observe.

En effet, Eric Rochant n’abandonne jamais son fil conducteur. Au contraire, il le poétise en brisant les chaînes du code du bon espion. Le réalisateur, en les cernant de toute part, crée du trouble, joue sur ce désir réciproque étouffé par un monde clos où le mensonge règne en maître. Comment ne pas penser au cinéma d’Hitchcock et surtout au film Les enchaînés avec Cary Grant et Ingrid Bergman (1948). Car rien n’est dû au hasard. Et surtout pas l’environnement dans lequel évoluent Alice et Moïse. Comme Hitchcock, Rochant ne dissocie pas le contexte d’une situation donnée aux actes, voire aux conséquences, des êtres sous influence.

Vous l’aurez compris, il ne faut pas attendre de Möbius autre chose que la mise en place d’une menace ténue, tapie dans l’ombre, enserrant nos deux amants devenus sourds au vacarme d’agences secrètes au service d’états fous. L’absence d’action ne desserre jamais la tension, palpable dans chaque plan, à mesure que le dénouement approche.

Et puis, il y a Cécile de France. Elle irradie l’écran au point où elle volerait la vedette à l’« oscarisé » Jean Dujardin. Ses orgasmes raisonnent encore de la passion d’un amour impossible suspendu dans l’espace d’une chambre, rempart bien fragile face au monde dans lequel ils se sont emmurés.
 
geoffroy

 
 
 
 

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