Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes.



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Lost in La Mancha


Royaume Uni / 2001

16.07.03
 



LA VALSE DES PANTINS





«- Vous comprenez mon anglais ? C’est un grand jour pour moi.» (Jean Rochefort)

D’entrée de jeu, la motivation majeure qui doit pousser le spectateur lambda à rompre avec ses habitudes cinéphiliques essentiellement portées sur le divertissement biodégradable pour découvrir ce journal de tournage serait de l’ordre de la bonne action. Car non, le destin veut qu’il ne soit pas possible de visionner L’homme qui a tué Don Quichotte, traitement avorté du classique de Cervantes par l’iconoclaste Terry Gilliam. Reste qu’en plus de laisser une trace de la débauche d’énergie dépensée (pour ne pas évoquer le capital économique), ce un-making off, comme l’ont surnommé ses auteurs, serait susceptible de par l’écho qu’il rencontre, de prouver la viabilité du projet aux yeux des producteurs et autres agents d’assurance frileux désormais propriétaires, faute de mieux, du projet. Car au travers des trop rares plans dévoilés dans Lost in la Mancha et qui font figure de bande annonce incomplète, naît une envie frustrante d’en découvrir plus. De par son casting épatant, ses options artistiques éblouissantes et son parti pris scénaristique original, tout porte à croire que l’avortement ampute la filmo de l’ex Monty Python d’un nouveau chef d’œuvre après avoir privé le public d’un sacré bon moment. Pendant que tant de navets incommensurables et ciblés se montent sur le coin d’une nappe d’un restaurant à la mode de Beverly Hills, soyez persuasifs, montrez quel spectacle vous exigez et réservez un accueil triomphal au documentaire de Keith Fulton et Louis Pepe.
Les deux acolytes n’ont par ailleurs pas ménagé leurs efforts pour que cet hommage ne lèse pas le propriétaire du ticket d’entrée. Il faudrait remonter jusqu’ Au cœur des ténèbres pour se remémorer une démonstration qui expose avec une telle force la complexité épuisante tout comme l’aspect périlleux de l’élaboration d’un long métrage. Rythmée par la succession des tuiles qui s’abattent - avec une constance digne de la pire malédiction d’une momie égyptienne - sur l’équipe plongée dans le désarroi (Johnny Depp goguenard pointant l’oreille : «Joli son, si ce n’est pas les F-16, c’est le tonnerre…»), l’odyssée tragique des moulins à vent hispaniques ne connaît pas de temps morts. L’opportunité de traverser la tempête en compagnie de Terry Gilliam peut se voir comme un privilège. L’homme est talentueux, donc forcément intéressant à contempler en pleine besogne, mais il se caractérise surtout par à son tempérament fantasque de créateur dans toute sa splendeur, tantôt enfant qui ne peut résister à jouer avec les ustensiles de la production, tantôt maestro qui se fait un devoir de communiquer ses idées voire d’en chaparder. Gonflé par ses chimères, entouré de ses croquis, il est évident au départ que le film est dans sa tête. Vision éléphantesque qui ne peut se concrétiser qu’au prix d’une dépense d’énergie folle d’une équipe qui pourtant reste tributaire de données bassement matérielles. Car Lost in la Mancha met en évidence le fait que le septième art germe de la fantaisie pure (dans le meilleur des cas) mais rappelle aussi qu’il reste une industrie onéreuse qui nécessite de bien aligner les sphères du boulier sur une base raisonnable.
La réflexion se portera un peu plus loin. Gilliam représente l’archétype du réalisateur – auteur gourmand. Au delà des différents artistiques (Brazil), il n’en est pas à sa première catastrophe budgétaire (Les aventures du Baron de Münchausen) ; sa réputation éveille désormais la méfiance. Le fait est que le cinéaste trouve la quintessence de son expression dans une débauche de moyens propres à imager son univers délirant. Trop singulier pour satisfaire les fortunés hollywoodiens (ses derniers exploits américains se résument à 3 budgets modestes pour un seul échec avec Las Vegas Parano) Gilliam se voit désormais mis à l’index dans sa patrie lorsqu’il s’agit d’entreprendre un blockbuster, généralement réservé aux valeurs sures et peu audacieuses. L’échec dans l’aboutissement de ce présent film exposera la limite du mode de production européen. Les reins trop fragiles pour supporter l’imprévisible, le constat veut qu’il ne parvienne pas à représenter une alternative pour que l’incorrigible génie puisse combler le vide sidéral du cinéma de divertissement non décérébré et en capacité d’innover. Bref une tragédie palpitante qui ne pousse pas à l’optimisme…
 
petsss

 
 
 
 

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