Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes.



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Pollock


USA / 2000

10.09.2003
 



POTS, LOQUE





"- Je me sens comme une palourde sans coquille."

De Basquiat à Frida, de Picasso à Bacon, les artistes turbulents semblent séduire le cinéma. Pollock ne pouvait échapper à la tendance. Mais bien plus que le photographie d'un peintre avant-gardiste, nous assistons à un portrait, celui d'un comédie au summum de son art, dévoilant ses méthodes, et cherchant surtout l'inspiration, l'essence même de son travail, le trait commun entre deux créateurs. L'identification n'est pas physique, elle est invisible, entre deux personnalités qui ne parlent pas le même langage mais exprime une détresse identique, un regard désabusé sur la gloire, une envie de dépasser les frontières.
En cela Pollock, le film, est bien supérieur à ses homologues sus-cités. Et si de grands films comme Goya (Saura), Van Gogh (Pialat), Chihwaseon (Kwon-Taek) ou La Belle Noiseuse (Rivette) ont offert une vision sublimée d'un peintre, le premier film d'Ed Harris mérite les louanges pour sa précision et sa noirceur (loin d'être occultée).
Evidemment, à force de se concentrer sur son personnage, le cinéaste oublie parfois la fluidité de son histoire, le rythme de son montage, le sens de certaines scènes. Nous nous perdons dans la contemplation d'un fantôme égaré, passablement détruit par l'alcool et rongé par un véritable désir de reconnaissance. Pas facile d'arriver après "cet enculé de Picasso". Ed Harris prend ainsi son temps pour filmer ses comédiens, et lui-même, sans narcissisme ostentatoire. Parfois, il s'offre un simple plaisir de cinéaste, comme cerre scène de dîner familial qui vire du burlesque au tragique. Ou encore, il s'amuse à reconstituer cette époque folle et créative, bourrée de névrosés qui échangeaient des théories au carrefour de plusieurs utopies. L'idée était d'aller plus loin dans l'Art. Au delà de Miro et Picasso, justement...
L'énergie du film provient sans doute de cette symbiose entre le sujet, le comédien, la musique et les oeuvres de Pollock. Jamais Harris n'hésite face à la légende : on le sent désemparé face à une toile vierge et on comprend pourquoi il pisse dans la cheminée de son hôte. Le réalisateur met la même fougue à nous dépeindre la manière de peindre d'un grand artiste qu'à nous exhiber les travers de cet esprit torturé. "On dirait un animal pris au piège". C'est en effet un clodo alcoolo totalement déchéant à certains moments, et un brillant génie qui atteint le nirvana de ses maîtres.
L'autre aspect passionnant de ce film est la relation maritale, opportuniste et intéressée, stérile et féconde, cynique et sincère, isolée et connectée, amoureuse et pragmatique entre sa femme et lui. Quand il accepte le mariage, il porte une croix. Tout est dans le symbole. Nous plongeons à la fois dans l'intimité de Pollock, mais Harris a voulu aussi dessiner les contours de cette étrange personnage.
Cette passion entre l'acteur et le peintre pourrait être envahissante. Bizarrement, la scénarisation un peu lourde nous donne plutôt l'impression d'un film qui ne sait pas faire la synthèse de certains éléments biographiques. Cela rend le final ni captivant ni marquant. Pour ne pas dire légèrement ennuyeux. Durant tout le film, nous avions été transportés par son énergie créatrice, nous voilà laisser en plan à observer la mort lente de l'artiste. Marcia Gay Harden, parfaite, n'est plus là pour le réveiller. Jennifer Connelly paraît si fade à côté. On venait de nous vanter que peindre c'était comme faire l'amour. Et là nous sommes largués sans pinceaux ni sexe. Harris nous avait convié à un ballet de traits liquides et colorés. Nous voici assoiffé par une vie sans tableaux.
Sa souffrance ne suffira pas à nous émouvoir, d'autant qu'elle est trop insignifiante sur ses derniers jours comparativement à celle de ses débuts, quand il subissait l'incompréhension ou l'indifférence. Tout a moins de caractère, d'intensité. Comme si Harris avait préféré baclé la période du requiem de son objet. Comme si son film épousait les hauts et les bas de cet homme fragile.
 
vincy

 
 
 
 

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