David Lynch, Lion d'or et Palme d'or, n'a pas tourné de long métrage depuis 2006. Une longue absence. Heureusement il nous a offert une suite à Twin peaks pour la télé. Et on peut voir ses photos fétéchistes dans l'exposition de Louboutin au Palais de la Porte dorée. Il vient aussi de terminer un court métrage. Elephant Man ressort cette semaine en salles.



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LE VISIONNAIRE





James Cameron aime avant tout les challenges. Faire du cinéma pour du cinéma est une chose, mais construire une œuvre cinématographique en l’inscrivant dans une modernité à même de faire avancer les modes de représentation, en est une autre. On peut le dire sans exagération, c’est La motivation du père de Terminator, le pourquoi il fait du cinéma, au-delà du simple divertissement, fut-il merveilleux, exaltant, intelligent. Depuis le succès planétaire de Titanic, James Cameron n’a plus tourné de film de fiction en 10 ans. La raison est simple. Les motivations du cinéaste devaient être stimulées par ce fameux challenge qui, depuis Titanic, était difficile à trouver. Ce fut donc Avatar. Méga-projet de quatre années qui représente en un seul film les raisons qui motivent et ont toujours motivé Cameron. Proposer un voyage fantastique hors du commun en repoussant les limites d’une technologie en passe de franchir un cap décisif : celui de la diffusion de masse. Sans perturber une seule seconde son talent de conteur, Avatar offre de nouvelles possibilités technologiques en plongeant le spectateur dans un monde imaginaire bluffant de réalisme. La 3D met en forme son rêve de film de façon inédite, faisant de Cameron le visionnaire du cinéma d’Entertainment (divertissement) qui, lorsqu’il est élevé à ce niveau d’exigence, n’a rien à envier au cinéma d’auteur.

Un novateur

Depuis ses débuts, montre mécanique homme Cameron a toujours attaché une extrême importance à la technique cinématographique. Pour lui, la technologie n’est pas un artefact sans âme façonnant de l’illusion à la pelle, mais bien un appendice essentiel à la construction d’une mise en scène. Vu sous cet angle, la part créative est bicéphale : d’un côté l’histoire avec ses personnages, son univers, sa narration et ses enjeux, de l’autre la représentation visuelle de l’œuvre désirée. L’intégration des effets visuels revêt donc toute son importance. Pour James Cameron elle est constitutive à l’histoire, lui donnant une crédibilité et une texture favorisant l’immersion, le spectaculaire, le sensible. De Terminator à Avatar en passant par The Abyss, chaque évolution technique a toujours correspondu à un objectif de cinéma. Ni plus, ni moins.

James Cameron fut, avec d’autres cinéastes, au cœur d’une époque charnière (toute fin des années 80 et durant les années 90) qui marqua l’avènement des effets numériques. Comment ne pas se rappeler de cette scène incroyable dans The Abyss ou un « serpent d’eau » déambulait dans la station sous-marine et prenait les traits des visages de ceux qu’il croisait. Nous sommes en 1989. La scène était tout simplement unique, les effets aussi. Deux ans plus tard, Cameron persiste et signe avec Terminator 2 un film pivot dans l’utilisation des effets numériques. L’innovation puis l’intégration parfaite des images de synthèse créent la sensation. Le film est un triomphe et devient rapidement une référence du genre. Pour réussir ce pari Cameron travail, crée une société d’effets spéciaux inventive (Digital Domain) et applique le dur labeur de la persévérance.

Pourtant il n’oublie jamais de proposer une histoire authentique fonctionnant ainsi sans l’apport d’effets visuels. Ceux-ci ne doivent en aucun cas perturber la cohérence narrative mais, au contraire, l’enrichir, la moduler, la booster et, comme dans Titanic, lui porter le coup de grâce en créant l’illusion parfaite d’un naufrage scénarisé trois heures durant. Avec Avatar, le cinéaste a franchi une nouvelle étape respectant une certaine logique dans la continuité. En effet, la logique est respectée car le monde d’Avatar est lié aux images de synthèse, à leur rendu, leur texture, leur capacité à retranscrire les rêves les plus fous d’un grand réalisateur.
Quatre ans de travail, la création d’une caméra unique baptisée la « fusion » et le perfectionnement de la technique en Motion Capture. Elaborée pour filmer les scènes live, la fusion est composée de deux objectifs reproduisant très fidèlement les diverses fonctions d’un œil humain. Il n’en fallait pas moins pour Cameron, toujours à la pointe de la technicité, de l’innovation et de la recherche (il travaille très régulièrement avec la NASA) pour que son cinéma d’évasion prenne une nouvelle dimension.

Un perfectionniste

Si, pour Avatar, sa démarche n’est pas unique, elle démontre son souci de perfection. C’est d’ailleurs l’essence même d’une filmographie sans concession (pendant le tournage de Terminator, il n’hésita pas à envoyer sur les roses son producteur de l’époque parce que celui-ci voulait que le film se termine par le crash du camion-citerne), façonnée par un obsessionnel compulsif, perfectionniste dans l’âme, sorte de démiurge brillant au service de son art. Cette qualité, que certains pourraient qualifier de borné, n’est pas sans rappeler un autre maître du cinéma américain, lui aussi perfectionniste et amateur de technologie : l’immense Stanley Kubrick. D’ailleurs c’est en regardant, adolescent, 2001 l’Odysée de l’espace, que Cameron a eu comme une révélation. Outre la splendeur des images, la perfection des détails ou la précision de la mise en scène, Kubrick a toujours exprimé son attachement à la liberté créatrice, contre le dictat des producteurs, pour l’éclosion sur pellicule des images du film désiré.

Un artiste se doit d’aller au bout de sa logique créatrice quitte à ne pas pouvoir réaliser son film. Ceci explique beaucoup de chose et sans doute les raisons pour lesquelles à 55 ans, James Cameron n’a réalisé que huit longs-métrages (en prenant en compte Piranha 2). 12 ans séparent Titanic d’Avatar, 12 ans pour parfaire une technologie et proposer un divertissement unique digne du rêve d’images du réalisateur d’Alien le retour. James Cameron aurait sans doute pu nous offrir Avatar 2 ou 3 ans plus tôt mais, se faisant, il aurait du renier sur plusieurs mois de perfectionnement, de recherches et d’avancées techniques. Au lieu de cela il travailla sur sa caméra, sur les rendus de la Motion Capture et sur le « Volume », immense studio six fois plus grand que celui de Robert Zemeckis dans Beowulf. Rien n’est trop beau et au même titre que la construction du bassin de Titanic ou du travail novateur sur les effets dans Terminator 2, les progrès réalisés sur Avatar témoignent d’une vision à la fois cinématographique, technologique et symbolique d’un géant du septième art.

Son perfectionnisme ne serait rien sans un degré d’investissement hors du commun. Bourreau de travail, James Cameron contrôle tout de A à Z, de l’écriture au marketing du film. C’est simple, quand il s’agit de son bébé personne ne doit se mettre en travers de son chemin. Considéré comme un petit dictateur des plateaux, de nombreux épiphénomènes de tournages entachèrent sa réputation. Mais qu’importe, le plus important reste le résultat, quel que soit le sacrifice.

Un indépendant

Sans être allé aussi loin que Georges Lucas, James Cameron, grâce à ses nombreux succès au box office (tous ses films, à l’exception d’Abyss, ont marché en salles) et à son indéfectible désir de réaliser les films qu’il voulait voir au cinéma, a pu se doter d’une véritable indépendance financière comme artistique. Ce paramètre, plus important qu’il n’y paraît, est fondamental pour comprendre la démarche d’un homme dont le statut lui permet, aujourd’hui, de fédérer sur son seul nom au même titre qu’un Spielberg ou un Lucas. Le succès historique de Titanic n’y est pas étranger et comment refuser au roi du box office les fonds nécessaires à la réalisation de son dernier film (même si la production a été répartie sur plusieurs investisseurs afin d’en minimiser le risque).
A ce sujet, la dernière polémique en date sur les sommes dépensées reste bien veine lorsque l’on sait que Pirates des Caraïbes 3 aurait coûté pas loin des 300 millions de dollars. D’autre part, cette indépendance est assujettie, quoi qu’il arrive, aux résultats du film. C’est le prix à payer pour toute liberté même aussi conséquente. Louons quand même le ciel que des cinéastes de la trempe d’un Cameron aient réussi à obtenir une autonomie créatrice quasi intacte. Différent de ses autres films, Avatar est sans doute le plus attendu, le plus redouté et le plus décisif. L’industrie retient son souffle ayant peut être trouvée en Avatar une réponse, fut-elle incomplète, à l’évolution d’un art en danger avec le piratage et en concurrence avec le Home Cinéma et les jeux vidéos.

La fin justifie les moyens et rien n’est de trop pour concrétiser une filmographie parfaite entre le rêve de gosse et l’expertise du technicien. Sa liberté n’a pas de prix et à l’instar de son premier Terminator, Cameron est toujours prêt à dépenser son propre argent en cas de pépin. Même si celui-ci n’a plus besoin de vider les fonds de tiroirs, les producteurs savent pertinemment que l’argent ne sera jamais une contrainte pour un tel amoureux de cinéma. Le seul frein valable viendrait plutôt d’une impossibilité technique à pouvoir raconter honnêtement une histoire, de la mettre en mouvement pour, dans un dernier temps, l’offrir aux spectateurs.

Un visionnaire

Caractéristique la plus immédiate, elle lui colle à la peau depuis ses débuts. Sans doute à raison. Même si elle restera toujours un peu exagérée. Pourtant, James Cameron fait du cinéma avec ses tripes, revendique l’importance du jeu et des acteurs, ne peut s’empêcher de construire des histoires cohérentes, palpitantes et scénarisées à l’ancienne. Il ne faudrait pas oublier que Cameron, alors jeune cinéaste, a fait ses premières gammes chez Roger Corman. Bien lui en a pris et louons cet apprentissage.

L’art du cinéma est changeant et s’accommode à merveille des évolutions en tout genre, des ruptures, des innovations. De cela James Cameron en est conscient. Si, de fait, il reste un merveilleux conteur récitant à loisir un langage cinématographique soutenu, il n’a cessé, durant toutes ces années, d’expérimenter, de bouleverser les codes, les normes, les tendances. Cameron appartient au cinéma de l’Entertainment, celui des années 80 et des blockbusters, du fric et des paillettes. Mais, il a su garder la tête froide et traverser ces temps modernes en véritable locomotive. Son innovation n’a jamais été feinte ni de circonstance. L’industrie lui doit une fière chandelle, lui qui a toujours su associer innovation et classicisme. De fait, il appartient à la catégorie des « visionnaires classiques », c'est-à-dire de ceux qui ne renoncent pas au fond pour la forme.

Créateur généreux, Cameron vient d’inventer ex nihilo un film de SF avec sa faune, sa flore, son exo planète. Son Star Wars. Avec l'aide du studio de Peter Jackson, autre artisan mégalo. Il nous livre une pure jouissance de gamin, la texture 3D en plus. Le réalisateur ne s’est pas arrêté en si bon chemin et veut créer une dynamique autour d’une technique qui ne cesse de s’affiner. En somme, il pousse pour que les conditions d’utilisation puis de visionnage soient optimum. Il ne s’arrête pas sur l’acte de création, il en dessine les contours, les potentiels, les modèles économiques. Avatar ne sera sans doute pas son dernier film, mais représente ce cinéma inventif, passionné, de divertissement commencé 25 ans plus tôt avec un certain Terminator.

geoffroy


 
 
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