Berlin 2016
18 films en compétition pour le jury de Meryl Streep. Le grand chelem des festivals est lancé pour la saison 2016, avec, au programme Denis Côté, Jeff Nichols, André Téchiné et Mia Hansen-Love.


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 (c) Ecran Noir 96 - 24






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Palmarès
* Grand Prix du Long Métrage (Licorne d’Or) 10 canoës, 150 lances et 3 épouses de Rolf de Heer (Australie)
* Prix spécial du jury pour le long métrage Rêves de poussière de Laurent Salgues (Burkina Faso, France)
* Prix d’Amiens métropole Un mundo maravilloso de Luis Estrada (Mexique)
* Prix d’Interprétation Féminine Gina Pareno (Kubrador)
* Prix d’Interprétation Masculine Damian Alcazar (Un mundo maravilloso)
* Mention spéciale pour le long métrage Daratt de Mahamat-Saleh Haroun (Tchad)

* Prix du public long métrage Un mundo maravilloso de Luis Estrada (Mexique)

* Prix Fémis, décerné par des élèves actuels et anciens de La fémis (Jeunes auteurs en Europe) Conte de quartier de Florence Miailhe (France) et Dormir au chaud de Pierre Duculot (Belgique)
* Prix SIGNIS (Association catholique mondiale pour la communication) Agua de Veronica Chen (Argentine/France)
Mentions spéciales : Rêves de poussière de Laurent Salgues



UN VOYAGE EN CINEPHILIE





Le festival international du film d’Amiens qui s’est déroulé du 10 au 19 novembre 2006 a, une fois de plus, confirmé sa place parmi les rendez-vous cinématographiques incontournables de la région. Avec environ trois cents films de courts et longs métrages, fictions et documentaires, il a accueilli plus de 68 000 spectateurs. Un festival en pointe, convivial et chaleureux, auquel a participé un jury Signis composé cette année de quatre membres : Mme Marie Campagne, Cinzia Quadrati, Mark Teglazi,et l'auteur de ses lignes, rédacteur pour Ecran Noir depuis quelques mois, Pierre Vaccaro.

UNE EXPLORATION DU CINEMA MONDIAL
Cocktail étonnant de films aux origines lointaines et diverses, ce festival offre la chance de voir des films rares et pointus en France. Il permet également de rencontrer en toute simplicité des professionnels accessibles et disponibles. Ainsi, plus qu’une simple rencontre cinématographique, cette manifestation permet de partir en explorateur de la cinématographie mondiale actuelle et de sa culture. Une exploration des genres tout d’abord. Des films du sud aux accents engagés et sociaux, une traversée du cinéma thaïlandais, des films d’horreur à travers une relecture des réalisations des studios Hammer, un hommage à Guillermo Del Toro, des raretés du cinéma arménien naissant, des documentaires comme le brillant Allez Yallah ! de Jean-Pierre Thorm, des films d’animation, la liste est longue… ! Seul un festival comme celui-ci pouvait faire se croiser Blade II de Del Toro et Dheevari du srilankais Salinda Perera en passant par un film muet arménien de 1927, Chor et Chorchor.
Exploration du monde aussi. A chaque séance embarquement immédiat pour des pays méconnus ou parfois méprisés par les circuits commerciaux actuels: Afrique, Argentine, Colombie, Arménie, Maroc, Italie, Sri Lanka...
Ce festival donne donc l’occasion de reprendre conscience d’une chose aujourd’hui souvent oubliée mais tout simplement merveilleuse: le cinéma est un voyage, une manière de « découvrir le monde », comme aimait à le dire Henri Agel. Le septième art saisit l’homme dans son univers, il offre une vision entière et réaliste de l’humain dans son milieu naturel ou dans sa communauté de pensée et de religion. Découvrir par exemple un film tel que Fils du Nord-Est réalisé en 1982 par Vichit Kounavudhi permet d’avancer dans une plus grande compréhension des racines du peuple thaïlandais, dans sa manière d’être et de vivre, un peuple caractérisé par le courage, le dynamisme et une frénétique joie de vivre malgré sa pauvreté. « Notre époque n’a jamais connu autant de préjugés et de haine » fait dire le réalisateur Jamil Dehlavi à l’un de ses personnages dans Infinite Justice. Constat réaliste mais paradoxal car jamais le cinéma n’a autant permis d’accéder à cette dimension multiculturelle du monde d’aujourd’hui ainsi qu’à une telle connaissance des peuples. Le festival offre aux artistes, aux publics un terrain de libre expression artistique et culturelle détachée de la logique financière. Voilà pourquoi il détient une importance capitale à l’heure où l’expression cinématographique s’est majoritairement « calquée » et alignée, pour des raisons commerciales, sur les modèles occidentaux de représentation et notamment sur celui, prédominant, issu des Etats-Unis.

LA VIE COMME COMBAT ET DEPASSEMENT
La sélection officielle a réuni des films qui, au cœur de leur éclectisme, se rejoignent à travers la thématique de l’existence comme lieu de combat pour la dignité et la justice. 10 canoës de Rolf de Heer (grand prix cette année) montre, à travers un peuple d’aborigènes du nord de l’Australie, combien le vivre ensemble et l’attachement aux traditions permettent à l’individu de rester un homme debout et social. Rêves de poussière de Laurent Salgues et Agua de Veronica Chen (qui a obtenu ici le prix Signis après l’avoir obtenu une première fois au festival de Locarno) mettent au cœur de leurs problématiques le thème de la transmission, du don de soi au-delà des difficultés passées. Le court métrage Menged de l’éthiopien Daniel Taye Workou rappelle, lui, par la légèreté de la fable combien il est essentiel d’arriver à penser par soi-même, au-delà des influences extérieures et des carcans sociaux, afin de garder son identité. On pense aussi au très beau Daratt du tchadien Mahamat-Saleh Haroun qui pose le thème du pardon comme seule issue possible et humaine face à l’engrenage de la vengeance.
Des combats aux multiples visages donc qui n’éludent pas la violence, la dureté sociale et qui font de ce cinéma un cinéma résolument engagé. L’univers cinématographique de tous ces films est composé de pauvretés et d’injustices économiques, également de combats intérieurs plus psychologiques. Mais loin d’en rester au triste constat misérabiliste, c’est justement au cœur de ces conditions d’existence que les cinéastes évoquent les luttes sociales, politiques et religieuses des individus comme des communautés. Ils y font surgir la noblesse humaine. Les œuvres révèlent que la grandeur et l’humanité de chaque individu s’expriment dans le combat. Bien qu’issu de cultures parfois lointaines, le panorama cinématographique présenté a touché le public car il détient une dimension universelle. Chaque spectateur peut en faire sa propre lecture et même « son pain », nourri par ce cinéma du réel.

AMIENS, UN LABORATOIRE DU CINEMA
Outil de communication sociale, moyen de voyager, le cinéma que l’on a pu voir à Amiens reste vivant, bouillonnant de pensées et de recherches. Une sorte de laboratoire de la cinéphilie. De nombreux réalisateurs comme Mario Brenta se questionnent sur la représentation du réel, la manière qu’a le septième art de transcrire la réalité du monde et de l’individu. Comment faire en sorte également que tous les pays puissent avoir accès aux techniques cinématographiques et aux financements nécessaires ? On a pu constater cette année que le cinéma africain vit aujourd’hui à l’heure du numérique. Plus économique, plus rapide, plus adapté aux conditions de vie difficiles, ce cinéma vit un essor important comme l’ont prouvé des films comme l’Ultime Hommage de King Ampaw ou, en dehors de l’Afrique, Infinite justice du pakistanais Jamil Delhavi. Au Burkina Faso, le réalisateur et journaliste Boubakar Diallo – qui faisait partie du jury pour cette édition 2006- s’est lancé en 2003 dans la réalisation de films populaires grâce à la vidéo : polar, mélodrame, western (Traque à Ouaga, Sofia, Dossier brûlant, L’Or des Youngas)... Il est considéré comme le fer de lance du cinéma en numérique dans son pays. Il a pu ainsi créer sa propre maison de production « les films du Dromadaire».
Laboratoire de recherche au niveau des techniques mais aussi plus que jamais au niveau du sens. Les films présentés témoignent de cette quête de vérité et de significations dans une existence régie par les lois économiques et l’essor des technologies. Quelle est la véritable et authentique place de l’homme dans le monde ? Comment vivre dans une société de l’éphémère, de l’immédiat et du profit ? Des questions soulevées par le cinéma présenté à Amiens. Un cinéma qui s’est à nouveau et puissamment affirmé comme transmetteur universel des interrogations inscrites au cœur de l’humain.



Pierre