Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes.



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Dark Water


USA / 2005

31.08.05
 








AMÉRIMAKE

« - Pourquoi la porte était-elle ouverte ?
- Elle était fermée. Quelqu’un a dû l’ouvrir »


Les remakes ne se sont pas forcément une mauvaise chose en soi, ils peuvent participer à la constitution d’une mémoire du cinéma (De battre mon cœur s’est arrêté a pu ressusciter l’envie cinéphile de revoir Mélodie pour un tueur de James Toback dont il est inspiré) mais lorsqu’ils sont réalisés moins de trois ans après la sortie du film original, une suspicion légitime peut naître autour de l’idée que ces répliques sont uniquement tournées à des fins économiques.
Dans le cas de Dark Water, reprise du quasi chef d’œuvre d’Hideo Nakata sorti en France en 2003, nous entrons typiquement dans cette démarche mercantile. Comment un film japonais peut-il être transcrit dans l’univers New yorkais en convaincant le public américain ? Sur un plan comptable, les producteurs se sont manifestement fourvoyés dans leurs calculs puisque la copie totalise seulement 24 millions de dollars de recettes en 20 jours d’exploitation, marquant les limites de la mode Ring. Il pourra bien être avancé, pour sauver la face, que le film original n’était même pas sorti aux USA, pays dans lequel la diversité de l’offre cinématographique pour les oeuvres étrangères ne semble pas constituer une priorité pour les distributeurs.

Toutefois, au-delà d’une hypothétique bonne affaire financière providentielle, ce remake aurait au moins pu se doubler d’une réussite artistique. Réalisé par Walter Salles, l’attente du spectateur était légitime pour que le réalisateur brésilien nous révèle un peu plus sa personnalité soit par une réappropriation totale de l’œuvre (pensons aux Body snatchers de Don Siegel à Abel Ferrarra en passant Philip Kaufman), soit par une pure recherche formelle et conceptuelle, à l’instar de Gus Van Sant dans Psycho qui avait alors revendiqué l’Art Wahrolien au secours de son entreprise. Cependant, que l’on se place de l’un ou de l’autre côté du miroir, l’échec de la tentative du réalisateur de Carnets de Voyages est patent.

Deux défauts principaux peuvent être relevés dans ce film, l’un d’ordre scénaristique et l’autre tirant plus du côté de la mise en scène.

En premier lieu, la transposition de l’action aux Etats Unis ne fonctionne pas, la Société japonaise reste toujours aujourd’hui dominée par les mâles ; donc, la lutte du mari pour récupérer sa fille Ceci n’a pas le même poids et la même importance dramaturgique que dans l’œuvre originale. Le sentiment de désespoir résigné de la mère dans le film japonais qui participe au climat languissant et angoissant de film de Nakata ne trouve pas d’écho dans la société américaine où les batailles juridiques pour la garde d’enfants représentent une norme des plus banales.
Le second défaut réside dans le parti pris par Walter Salles de se préoccuper plus de la terreur de Jennifer Connelly que de celle de sa fille Ceci. Nakata avait accentué les phénomènes étranges liés à l’appartement mais ne les avait rendus perceptibles qu’à travers l’œil de la petite fille. Le décalage existant entre les perceptions de la mère et de son enfant procurait au spectateur un surcroît de terreur qui n’existe pas dans la nouvelle version.

Certes, on pourrait objecter que Walter Salles a creusé un sillon plus proche de ses préoccupations en investissant le champ psychologique des personnages. On pourrait même en déduire qu’il a réalisé un remake intelligent, distillant des touches personnelles dans un canevas basique de film d’angoisse classique. Toutefois, le mélange des genres n’est pas harmonieux et les motivations de Salles, d’ailleurs toujours trop soulignées, occultent l’intérêt du spectateur pour l’histoire principale du film.
Le jeu de poupées russes, faisant remonter le trouble psychologique de Ceci à la jeunesse délaissée de sa mère Dahlia, que l’on voit abandonnée sur un banc pluvieux à la sortie de son école, nous paraît un peu trop cousu de fil blanc. Nakata laissait la porte ouverte aux interprétations multiples alors que Walter Salles la referme soigneusement.
L’entreprise, confiée à un faiseur d’Hollywood de l’acabit de Gore Verbinsky qui avait avec The Ring respecté les règles de ce genre cinématographique, aurait pu atteindre son but simple ; effrayer le public dans un horror flick bien ficelé. Mais, choisir Walter Salles, plus habitué aux drames et à la description introspective des sentiments, s’impose comme une erreur de casting des producteurs de ce film.
Cela constitue d’ailleurs la seule erreur de distribution des rôles de ce film tant les acteurs, et plus particulièrement les seconds rôles sont justes et convaincants. John C Reilly en agent immobilier compose un personnage mi protecteur mi délateur parfait de bout en bout, Tim Roth, en avocat des causes perdues, reste décidément trop rare sur les écrans tant il réinsuffle de la vie aux films dans lesquels il s’investit. L’actrice principale Jennifer Connelly, qui fut une actrice culte obsédant les nuits d’adolescents pré pubères dans le film Hot Spot, touche également par sa sincérité dans l’amour qu’elle essaye de transmettre à sa fille Ceci.

Sans être trop dur avec Walter Salles qui se verra sans doute confier par les studios des films plus en adéquation avec son talent, l’évidence reste, au travers de ce premier film hollywoodien, qu’il échoue dans son examen de passage artistique comme ont pu y arriver quelques illustres prédécesseurs sud américains tels que Alejandro Gonzales Inarritu pour ne citer que le plus récent.
 
Redrum

 
 
 
 

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