Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes.



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The Proposition


Australie / 2005

16.12.2009
 



LE CREPUSCULE DES COLTS





«- Je suis là pour civiliser le pays. Par la force si nécessaire. »

The Proposition, tourné en 2005 par John Hillcoat, réalisateur australien de La Route – actuellement sur les écrans –, débarque en salles seulement maintenant. Peu importe, car l’essentiel est ailleurs et l’occasion de voir sur grand écran un western aussi étrange, opaque, langoureux et viscéral, doit l’emporter.

Scénarisé par le chanteur Nick Cave (qui se charge également de le mettre en musique), The Proposition nous subjugue d’entrée de jeu par son décor lourd, beau, rude : l’outback australien de la fin du XIXe siècle. Celui-ci pèsera de tout son poids sur l’histoire, devenant un partenaire à part entière, rythmant la vie quotidienne et jouant sur les nerfs des différents protagonistes dans une implacable confrontation à la barbarie originelle, entre règlements de compte et rédemption finale. Si le western change de continent et procède à quelques transferts (des indiens d’Amérique nous passons aux aborigènes d’Australie), il n’oublie pas sa filiation. Univers macho, petite ville perdue au milieu de nulle part, hors-la-loi, chasseur de prime, justice incarnée par l’ordre en place. Pourtant ce nouveau cadre impose une lecture différente qui, guidée par une force tellurique quasi mystique, se rapproche de l’œuvre métaphysique. Les personnages se retrouvent en face de leur contradiction dans une nature imposante capable de magnifier cette violence schizophrène d’hommes sur d’autres hommes.

Des images stupéfiantes de beauté
La confrontation se concentre autour d’un trio lié par le sang, la vengeance et la mort. L’autorité militaire – celle de sa Majesté – incarnée magistralement par un Ray Winstone tout en puissance se voit opposer à celle des deux bandits, condamnés et frères de sang, dont le destin commun prendra des trajectoires différentes. Au-delà du triangle scénaristique d’un film âpre mélangeant plusieurs thématiques (racisme, inégalités, violence dans les rapports sociaux), Hillcoat interroge le bien fondé d’une logique civilisationnelle dans cet enfer désertique. L’âme humaine n’est ni bonne ni mauvaise, elle évolue au-delà des frontières qui définissent communément la morale pour naviguer vers l’insondable. Le capitaine Stanley en proie aux doutes n’est pas cette brute que laissait présager l’ouverture du film. De même que Charlie Burns (interprété par un Guy Pearce envoûtant) ne peut continuer à légitimer les actes barbares de son frère aîné, Arthur Burns (parfait Danny Huston). Le récit s’efforce d’arpenter les chemins de chaque personnage pour composer une symphonie humaine complexe où la violence des uns répond à l’inaction des autres.

Pour retranscrire une telle atmosphère, louons la puissance de certaines images stupéfiantes de beauté . Elles s’inscrivent dans le cours d’un récit à la chaleur étouffante magnifiant une étendue de terre aride virant continuellement au confinement des sens. L’horizon crépusculaire devient le juge de paix d’un affrontement tout aussi physique que symbolique. La caméra du cinéaste capte ainsi les brisures d’un monde à l’héroïsme tragique dont la morale, bafouée par ceux qui la défende, fait penser au cinéma d’un Sam Pekinpah. La posture presque contemplative de ces antihéros, tous embarqués dans le tourbillon d’une nature belle, sauvage, inégalitaire, ne peut faire oublier la violence quotidienne d’un monde en construction. Malick n’est plus très loin, Pollack non plus. Culture et nature sont indissociables. Par cette imbrication quasi organique, The Proposition se livre tel qu’il est, à savoir un grand western hanté par la place de l’homme sur cette terre.
 
geoffroy

 
 
 
 

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