Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes.



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Une nouvelle amie


France / 2014

05.11.2014
 



VIRGINIA ANYWAYS





"Les garçons naissent dans les choux, les filles dans les fleurs et bien moi je suis né dans un choux fleur."

Le corps, cette machine que l'on nous donne à la naissance sans nous demander notre avis, est une question qui hante depuis des siècles. On Le camoufle sous des vêtements, sous un masque de narcissisme qui reflète en réalité un mal être humain, naturel. Imaginez que ce mal être soit plus profond et qu'il n'y ait pas que des bourrelets ou des côtes qui vous gène. Imaginez que ce n'est plus uniquement votre enveloppe charnelle qui vous met mal à l'aise mais votre identité corporelle tout entière. Une meilleure amie soulève cet éternel problème. L'acceptation de soi, l'amour de notre moi. Claire (Anaïs Demoustier) en fait l'expérience à la mort de sa meilleure amie. Promettant à cette dernière qu'elle prendra soin de son mari David (Romain Duris) et de sa fille Lucie, elle va faire une découverte surprenante qui va bouleverser sa vie: David aime se travestir. Il avait arrêté pourtant. Mais la mort de sa femme a réveillé ce doux plaisir inavoué.

Touchant, parfois drôle, mais souvent insaisissable, Une nouvelle amie est une fresque intime signée François Ozon. Il commence lentement, mais surement, avec un montage rapide de la vie de deux petites filles: Claire et Laura (Isild Le Besco). Enfance, adolescence, premiers flirts, mariages et puis la maladie pour l'une d'entre elles. Ce cancer qui dévastera la vie de ces protagonistes et va ternir la luminosité du film.

Une complicité échangée à travers un sourire, une caresse imagée par des mains éloignées, François Ozon aime songer pour mieux faire rêver. En abordant un tel sujet, il frappe fort et parvient à nous toucher. Joueur cet Ozon. Il a toujours aimé s'amuser : transformer un père en rat, mettre des ailes à un bébé, alors pourquoi pas déguiser un homme en femme. Devant sa caméra, on y voit un Romain Duris qui nous foudroie par sa justesse. Car chez Ozon, le genre est confus. L'homme est féminin, prédateur, absent. La femme peut se révéler chef de bande, solide solitaire ou même meurtrière. Il n'y a aucune règles.

Une nouvelle amie ne fait pas exception: il travestit un corps pour mieux nous troubler et nous faire voir la réalité sous un autre angle. C'est à la fois divertissant et ravissant. Peut-être manque-t-il un peu de profondeur. Avec un personnage central à la fois absent et présent - comme dans Sous le sable le deuil hante les vivants - il va déclencher toute une mécanique qui va entraîner des situations émouvantes.

En partant d'un postulat psychanalytique (le remplacement d'un être défunt), Ozon filme un duo en quête de liberté. Loin des préjugés. Loin des schémas écrits. C'est un peu le thème qui traverse toute sa filmographie: se sortir d'un piège, laisser sa différence s'exprimer. Il le fait avec son amour pour l'ambiguïté, son style ironique, son désir de transgression. Cela n'empêche pas la fantaisie, ni la gravité. Le réalisateur n'épargne pas les personnages conformistes, un peu trop binairement d'ailleurs. Mais surtout, l'écriture du film manque d'une approche plus réelle, plus sociale: le regard que l'on porte, l'assimilation rejetée, les mystères du désir interdit. A trop vouloir être hitchcockien ou flirter avec Preminger, il manque de chair. Certes, Une nouvelle amie a tout d'un film qui charme, d'une oeuvre cohérente et bienvenue loin des sujets prémâchés et des esthétiques aseptisées. Mais pourquoi Ozon, film après film, explorant les grands classiques et les genres, curieux de tout, persévère à filmer des passions trop muettes, des amours contrariés souvent trop frigides, des libertés individuelles qui ne peuvent pas s'inscrire dans le collectif?
Cette aspiration à filmer des romances trop froides empêche de se laisser aller jusqu'au bouleversement. Le cinéma de Ozon n'est jamais meilleur que lorsqu'il n'est pas cérébral mais sensoriel. Avec ce film, il reste au milieu de la rivière.
 
cynthia

 
 
 
 

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