
Le cinéaste Ari Aster est sélectionné pour la première fois en compétition à Cannes avec son film Eddington (en salles le 16 juillet). Cette fois-ci il suit la confrontation entre un shérif et le maire d’une bourgade américaine. De quoi metre le feu aux poudres en montant les habitants les uns contre les autres. Dans la petite ville de Eddington, en 2020, pendant la période de pandémie du Covid-19, vont donc s’affronter Joaquin Phoenix, Pedro Pascal, Emma Stone, Austin Butler. D’abord via les réseaux sociaux puis plus physiquement avec l’objectif d’une élection.
C’est le quatrième film de Ari Aster, et il est très différent des autres où il était question d’un deuil à surmonter.
Révélation avec Hérédité
Le premier long-métrage de Ari Aster sort en salles en 2018, avec Toni Collette dans l’ un de ses meilleurs rôles. Le film est perturbant à plusieurs niveaux : des membres d’une famille en deuil vont découvrir que leur étrange imagination ou des événements pourraient être liées à une sorte de malédiction familiale… Hérédité dépasse le film d’horreur très malin pour devenir un véritable film d’angoisse oppressant. Avec un budget modeste de 10 millions de dollars, le film va rapporter plus de 82 millions, soit le film le plus rentable du distributeur A24 (qui sera dépassé en 2022 par le succès surprise de Everything Everywhere All at Once qui gagnera des Oscars). Ari Aster est devenu d’emblée un nouveau talent à suivre.
Confirmation avec Midsommar
En 2019 arrive ce deuxièle film d’Aster, Midsommar, porté par la jeune Florence Pugh pas encore propulsée dans la catégorie actrice bankable. Un petit groupe d’amis fait le voyage jusqu’en Suède pour un pittoresque festival païen qui se déroule tous les 90 ans dans un petit village isolé. Il s’agit avant tout de se changer les idées après un deuil (again), mais ce festival prépare un mystérieux rituel… Cette fois l’aspect étrange met beaucoup plus de temps à se développer (encore plus dans la version longue du film), mais l’horreur qui se prépare pour la fin est bien plus marquante pour les spectateurs. Même si Midsommar est un succès moindre que le précédent, Ari Aster est désormais installé comme un des nouveaux réalisateurs cultes du moment.
Déception avec Beau is afraid
En 2023 arrive son troisième film, Beau is afraid, avec en vedette Joaquin Phoenix. Le réalisateur s’éloigne du registre de l’horreur pour proposer le labyrinthe psychologique d’un homme fragile après un décès (ça devient un gimmick). L’échec au box-office est sévère puisque le film atteint péniblement que 11 millions de dollars (le distributeur A24 subira un déficit de plus de 35 millions de $). La malédiction du Phoenix? Joaquin subit en effet une succession d’échecs et de déceptions avec Napoléon de Ridley Scott et Joker: Folie à deux de Todd Phillips… Peu importe, Joaquin Phoenix sera de nouveau la tête d’affiche d’Eddington, en compétition à Cannes en 2025.
Ari Aster est aussi un producteur original
Fort de ses deux premiers films Hérédité et Midsommar, qui évidemment sont synonymes de reconnaissance en tant que producteur/scénariste/réalisateur, Ari Aster a aussi désormais une casquette de producteur pour accompagner d’autres projets que les siens.
Si lui s’est éloigné du fantastique, il continue de s’intéresser au genre. Il a ainsi contribué à la production de Dream Scenario de Kristoffer Borgli (où le personnage de Nicolas Cage apparaît dans les rêves de plusieurs personnes) ; de Sasquatch Sunset (une famille de yétis primitifs dans une forêt) ; Rumours de Guy Maddin (avec Cate Blanchett au milieu de dirigeants politiques livrés à eux-mêmes face à des zombies. Le film est sorti en salles le 7 mai) ; Death of a Unicorn (Jenna Ortega et Paul Rudd face aux conséquences d’avoir écraser une Licorne que d’autres veulent exploiter pour ses pouvoirs magiques…) ; ou encore Bugonia de Yorgos Lanthimos (le kidnapping d’une cheffe d’entreprise qui pourrait être une extraterrestre…) attendu au prochain festival de Venise.
Les films préférés de Ari Aster
À plusieures occasions, il a été demandé à Ari Aster de citer ses films préférés, ceux qui l’ont influencé et les films qu’il recommande de voir absolument. Sans surprise, il y a évidement des films où des personnages sont confrontés à la fois à un trauma personnel et à du fantastique effrayant, mais il y a aussi aussi des histoires de famille. Ses grandes influences sont Roman Polanski (il cite en particulier Cul de sac, Répulsion, Rosemary’s baby, Macbeth) et Mike Leigh dont il loue sa direction des acteurs en particulier (pour Naked, Topsy-Turvy, Another year).
Côté grands classiques, il est admirateur de Igmar Berman (pour Persona, Cris et chuchottements, Fanny et Alexandre, Sonate d’automne) autant que de Kenji Mizoguchi (pour L’Intendant Sansho, Les Contes de la lune vague après la pluie, La vie de Oharu). Il admire aussi le duo Michael Powell et Emeric Pressburger (pour Le narcisse noir, Les chaussures rouges, Une question de vie ou de mort, Je sais où je vais) tout comme les œuvres de Satyajit Ray (pour La complainte du sentier, L’invaincu, Le monde d’Apu).