Mikado, un film émouvant réalisé par Baya Kasmi, raconte l’histoire d’une famille vivant dans un van en marge de la société qui, suite à une panne mécanique, est accueillie pendant quelques semaines dans la propriété d’un professeur de français et sa fille. Cette rencontre inattendue va susciter des moments de joie, mais aussi réveiller des douleurs.
Mikado (Félix Moati) et Laetitia (Vimala Pons) mènent une vie de vagabondage à bord de leur vieux camion avec leurs deux enfants, Nuage (Patience Munchenbach) et son petit frère, Zéphir (Louis Obry). Mikado et Laetitia, qui ont grandi dans des foyers d’accueil, n’ont qu’une crainte : que leurs enfants, qui ne sont pas scolarisés, leur soient ravis par les services sociaux. Dès qu’ils croisent la police sur la route, Nuage et Zéphir doivent se cacher pour éviter ce risque.
Les deux enfants s’accommodent plus ou moins bien de cette situation jusqu’au jour où, à la suite d’une panne de moteur, ils sont hébergés avec leurs parents dans une bastide provençale par un professeur de français, Vincent (Ramzy Bedia) et sa fille Théa (Saül Benchetrit). Nuage, qui est adolescente, réalise au contact de Théa que sa vie d’errance la tient éloignée des jeunes de son âge. Elle commence à remettre en question le mode de vie marginal que lui imposent ses parents, en la tenant à l’écart de la société, alors que Mikado est terrorisé par une possible dislocation du cocon familial…
Des personnages marqués par des blessures diverses

Le titre du film fait référence au jeu d’adresse, le Mikado, dont le personnage incarné par Félix Moati ne se sépare jamais, ce qui lui a valu son surnom. « Très vite, j’ai voulu relier ce personnage à son enfance et le mikado sert à ça, je l’imagine comme un objet transitionnel, quelque chose qui le rassure et qui lui donne l’impression que la vie est régie par des règles qu’il maîtrise », souligne Baya Kasmi, dont Mikado est le troisième long-métrage après Je suis à vous tout de suite (2015) et Youssef Salem a du succès (2023). Baya Kasmi est aussi la co-scénariste du film de Michel Leclerc, Le nom des gens (2010), inspiré de sa propre vie.
Dans son nouveau long-métrage, elle met en scène des personnages marqués par des blessures diverses, dont la rencontre va provoquer des bouleversements dans la vie de chacun. En s’appuyant sur un scénario bien construit, elle décrit avec sensibilité l’évolution des personnages, dans une succession de scènes très réalistes, notamment lors d’un repas où l’on sent la jalousie qu’éprouve Mikado -écorché vif en raison des traumatismes qu’il a vécus pendant son enfance- à l’égard de Vincent.
Bien que d’autres séquences du film soient moins crédibles, on se laisse emporter par le jeu des acteurs, tous très justes, de Félix Moati à Vimala Pons, en passant par Ramzy Bédia et Patience Munchenbach, qui incarne avec sensibilité une jeune fille tiraillée entre l’attachement à ses parents et son désir de s’émanciper, de suivre une scolarité normale et de fréquenter d’autres adolescents. Outre la qualité de sa distribution, le long-métrage de Baya Kasmi bénéficie aussi d’une magnifique lumière dans de très beaux décors naturels du sud de la France. Une réussite.
Pierre-Yves Roger
Fiche technique
Mikado de Baya Kasmi
Avec Félix Moati, Vimala Pons, Ramzy Bédia, Patience Munchenbach, Louis Obry, Saül Benchetrit… 1h34
Sortie française : 9 avril 2025
Distribution : Memento