Sara Forestier
Sara Forestier. Elle trouve que son nom est passe-partout, alors elle emprunte celui de Bahia BenMahmoud pour Le nom des gens. Rencontre avec une actrice nature et généreuse.



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Elle est l'invitée d'honneur du Festival du Film Brésilien à Paris, l'année où le Brésil est en fête dans toute la France.
Fernanda Montenegro serait chez nous l'équivalente d'une Moreau ou d'une Deneuve. Nommée à l'Oscar de la meilleure comédienne et prix d'interprétation à Berlin pour son personnage dans Central do Brasil, l'actrice a conquis les planches, les petits écrans et les plus grands. Elle est l'emblème d'un 7ème Art en plein essor, tournant avec des jeunes cinéastes comme avec les plus réputés.
Cette grande dame du cinéma latino-américain nous reçoit dans un prestigieux palace parisien, où le Président Portugais a installé ses quartiers, en visite officielle. Il est évident que le Brésil s'est longtemps affranchi de ses racines européennes. Mais l'élégance de la dame nous rappelle aussi que le Brésil n'a jamais été aussi proche de notre civilisation. Le soleil en plus.
EN : Qu’est-ce que vous a inspiré Diarios de Motocicleta de Walter Salles ? Et quels sont les films brésiliens, récents ou plus anciens, que vous conseilleriez à un spectateur français ?

FN : Diarios... est un grand film pour les jeunes, car Walter a adopté une vision très juvénile du mythe Ché Guevara. C’est très intelligent de sa part d’avoir évité tout ce qui concerne la fin de vie du Ché, sa mort en Bolivie, l’homme abandonné, désenchanté voire trahi. Walter a opté pour une épopée où un jeune adolescent comprend que sa vie peut devenir soudainement très différente. Cette façon très douce et très simple de regarder l’Amérique du Sud à travers les yeux du Ché est très émouvante. C’est aussi le magnifique portrait d’un homme qui sort de son petit monde pour aller vers les autres. Walter n’a pas voulu être plus grand que son héros. Il le regarde comme un adolescent contemplerait un héros dont on lui a parlé. Pour les films brésiliens, j’en conseillerai d’abord quatre : Macunaima (1969) de Joaquim Pedro de Andrade, Ils ne portent pas de smoking (1981) de Leon Hirszman, Le rédempteur (2004) de Claudio Torres (à découvrir tous les trois au Festival du Cinéma Brésilien de Paris, NDLR) et Pixote, la loi du plus faible (1981) d’Hector Babenco.

EN : En 1998, Walter Salles était quasi inconnu avant Central do Brasil. Comment vous a-t-il convaincu de participer à ce film ?

FN : Walter s’est énormément préparé pour faire du cinéma. Ce n’est pas qu’un intuitif, il a beaucoup travaillé. Il m’a tout simplement présenté un scénario que je n’avais aucunement le droit de refuser. Il voulait faire un petit film avec une équipe réduite de techniciens et d’acteurs très motivés et solidaires. Que ce soit à la télévision, au cinéma ou au théâtre, je n’ai jamais eu peur de travailler avec des "débutants" car ne pas avoir de passé peut, parfois, être une bonne chose. C’est pour cela que j’ai travaillé avec Walter ou Marco Bernstein (De l’autre côté de la rue) comme je l’ai fait avec Hirszman lorsqu’il n’avait que 24 ans. Et, de toute façon, à chaque film le réalisateur est nouveau et, en quelque sorte, on repart de zéro, alors peu importe son vécu. On fait les présentations et… on tourne. C’est le mystère de la création. Vous mettez ensemble une bande d’inconnus et le résultat peut s’avérer absolument merveilleux. Prenez A cidada de Deus : il s’agit de mômes qu’on est allé chercher dans la rue.

EN : Le Brésil change. Lula est devenu Président de la République, Gilberto Gil, ministre de la Culture. Quelle est votre vision de cet élan populaire ?

FN : Seulement deux années ont passées. Je ne connais pas les résultats sur le long terme. Nous vivons tous un temps d’adaptation et de propositions. Le gouvernement a parfois le bon sens de reculer ou de faire une pause. Comme pour une scène au cinéma, il faut expérimenter, faire des choix. Quand l’Histoire sera racontée à nos petits-enfants, c’est là que nous saurons ce que tout cela a réellement apporté au Brésil. C’est mon point de vue en tant que citoyenne et en tant que femme qui a voté Lula. Il existe au Brésil des visions très différentes, grâce à Dieu nous vivons en démocratie et tout ce qui est fait nous est présenté comme une proposition et nullement imposé. Tout cela est très nouveau.

EN : Quel est le plus beau souvenir que vous ayez de la ville de Paris ?

FN : Je n’avais jamais rêvé visiter aussi souvent Paris. A l’âge de 16 ans, j’ai découvert cette ville dans Les enfants du paradis de Marcel Carné. Quel choc ! Ce film est sans doute le plus magnifique des résumés de la vie des gens du théâtre, de l’univers de la musique d’une certaine époque, d’une ville et d’un pays.


   jean-françois

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