Sara Forestier
Sara Forestier. Elle trouve que son nom est passe-partout, alors elle emprunte celui de Bahia BenMahmoud pour Le nom des gens. Rencontre avec une actrice nature et généreuse.



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 (c) Ecran Noir 96 - 24



William Oldroyd boit tranquillement son verre d'eau puis nous offre un sourire à faire pâlir n'importe quel dandy anglais lorsque nous arrivons à sa rencontre. Doux, gentil et talentueux, son charme "so" british nous a fait perdre notre latin (de Shakespeare) et a détraqué notre dictaphone. Sweet meeting...
Ecran Noir: The Young Lady est une adaptation littéraire d'un livre de Nikolaï Leskov, avez-vous changé certaines choses en dehors du cadre anglais qui remplace le décor russe?




William Oldroyd: Nous avons changé beaucoup de choses pour la fin sinon c'est très fidèle au livre. Mais, par exemple, nous voulions que le personnage de Katherine qui est déjà très puissant - encore plus grâce à son interprète - soit féministe.
Le livre est génial et d'ailleurs nous étions même surpris qu’il n’ait pas déjà donné lieu à plus de films (trois versions à ce jour, ndlr). Nous savions qu’il avait inspiré un opéra, et certains performance théâtrales. Nous avons discuté du synopsis avec Alice Birch (chargée du scénario). Le scénario s’est alors mis à prendre forme petit à petit. Il faut tout de même dire que l’histoire du roman est une bonne histoire, mais ça s’arrête là, dans le sens où l’intrigue est assez simple. Il est vrai qu’au bout du compte, ce qu’il y a dans le film correspond à ce qui était dans le livre - avec seulement quelques changements, notamment la fin qui est tragique dans le livre- , mais là où Alice a fait un travail brillant, c’est qu’elle est parvenue à créer de vrais personnages à partir de l’intrigue, en développant bien leur psychologie.


EN: Pouvez-vous nous parler un peu des paysages splendides du film et qui alimentent à la perfection le récit?
WO: Beaucoup de paysages se trouvent en Angleterre, comme l'université de Darmouth et son château. D'autres paysages se trouvent à l'est du pays, des paysages justes magnifiques qui semblent ne pas avoir changé depuis tout ce temps et donc ils créent l'illusion de l'époque de The Young Lady.


EN: L'une de mes scènes favorites est sans nul doute celle où Katherine est ivre... Cela commence dans l'humour mais ça se termine dans la tristesse avec le personnage d'Anna et l'humiliation dont elle souffre à cause du comportement de sa maîtresse. Comment tourne-t-on une scène comme celle-ci?
WO: C'était une scène sur laquelle nous étions pressés de travailler lorsqu'on la voyait sur le papier. La structure était magnifique tout en étant épineuse et ça a été une leçon pour moi car, je le rappelle, c'est mon premier film. De prime à bord ça semblait tellement facile dans ma tête: voilà deux personnes autour d'une table puis une autre qui intervient...mais non! Il fallait tourner la caméra de sorte à ce qu'elle suive elle-même le scénario. Les acteurs sont superbes mais nous ne pouvions pas nous focaliser uniquement sur le jeu car ce n'est pas du théâtre.


EN: Il fallait que la caméra créé l'illusion que nous soyons témoins de la scène...
WO:Exactement, en particulier la partie avec Anna qui se met à genoux et qui marche part terre.


EN: Si vous deviez prendre le thé avec l'un de vos personnages, lequel vous choisiriez-vous?
WO:> Ooooh (rires)! Ce serait Katherine, car je pense qu'elle est la plus drôle mais j'éviterais le petit-déjeuner et surtout les champignons avec elle (rires)! J'aimerais aussi me faire une bonne balade avec le personnage de Teddy, je pense que ça serait génial!


EN: Vous avez travailler au théâtre et The Young Lady est votre premier film: quelle est la différence entre le théâtre et le cinéma et qu'est-ce que vous préférez le plus?
WO: C'était une super expérience de faire du cinéma donc j'aimerais faire beaucoup de films. Je pense que le cinéma est plus difficile car au théâtre j'ai le temps de remettre les choses en place, je guide les acteurs qui jouent et dont la performance peut varier selon les représentations. Au cinéma, il y a, bien évidemment, une préparation au préalable mais pas aussi longue que pour le théâtre. Nous avions 3 heures pour filmer. Nous devions faire cet angle, cet angle et puis cet angle et nous n'avions pas le temps de vérifier ou d'essayer d'autres possibilités car nous devions enchaîner avec une autre scène. Pour l'avenir, j'espère pouvoir avoir plus de temps pour filmer afin que je puisse essayer, expérimenter.
L'autre difficulté, c'est qu'au théâtre je n'avais qu'à m'asseoir et à regarder les acteurs; au cinéma je dois choisir comment mettre la caméra et pourquoi. Je dois choisir où le spectateur va regarder. C'est très difficile. La caméra devient un acteur à diriger. Vous ne faites pas ça au théâtre et c'est tellement plus facile (rires).


EN: Pour vous, quelles sont les qualités d'un bon film? Qu'est-ce qui fait qu'un film est bon?
WO: J'aime la combinaison d'un beau travail de la caméra et de la complexité des personnages. J'aime les films complexes comme Canine de Yorgos Lanthimos ou encore Funny Games de Michael Haneke. Des films qui soulèvent des questions aux spectateurs.


EN: Quel conseil avez-vous envie de donner à une personne qui veut faire un film?
WO: Soyez certain de le faire avec les bonnes personnes. Tout le monde veut de l'argent pour faire un film mais il faut vérifier que la personne qui met l'argent ne décide pas de tout sur votre film. Vous devez rester le capitaine de votre film sinon ça pourrait tuer la vision de votre œuvre.


EN: La mode du moment sont les séries TV, seriez-vous intéressé pour réaliser une série?
WO: Seulement si c'est moi qui l'ait écrite et que cela vienne de mon cerveau. Je ne veux pas diriger une histoire que l'on m'aurait imposé.


EN: Avec quels acteurs ou actrices vous aimeriez travailler?
WO: Isabelle Huppert, elle est juste magnifique, Daniel Day-Lewis ce serait tellement génial et Adèle Exarchopoulos ce serait tellement super de travailler avec elle...(réfléchis) imaginez juste un film avec ce casting ce serait super (rires)!


EN: Justement quels sont vos projets?
WO: J'ai une pièce de théâtre que je dois diriger et qui se jouera à Londres. Quant au domaine du septième art je vais bientôt m'occuper de l'adaptation du livre de Walter Mosley,A man in my Basement. Je travaille actuellement sur le scénario et je réaliserai le film dont le tournage se déroulera à New-York.


EN: Un casting déjà prêt?
WO: Non pas encore...


EN: Vous n'avez plus qu'à contacter Isabelle Huppert...
WO: (Rires) Oui, exactement, je vais faire ça!


   Cynthia