L’incroyable épopée d’un robot – l’unité ROZZUM 7134 alias “Roz” – qui après avoir fait naufrage sur une île déserte doit apprendre à s’adapter à un environnement hostile en nouant petit à petit des relations avec les animaux de l’île. Elle finit par adopter le petit d’une oie, un oison, qui se retrouve orphelin.
La résurrection de Dreamworks Animation? Avouons-le, on n’y croyait plus. Depuis la création de la saga Dragons en 2010, rien d’excitant ne sortait des studios, autrefois grand rival de Pixar. Une flopée de suites et spin-offs, des histoires copiées collées sur des succès de concurrents, une esthétique souvent trop flashy, des scénarios trrès convenus et même conformistes.
Avec Le robot sauvage, réalisé par Chris Sanders à qui l’on doit le premier Dragons, Dreamworks Animation semble prendre un nouveau virage. Après Vice-Versa 2 qui rassurait les fans de Pixar quant à la créativité du studio, on pourrait même espérer qu’un vent nouveau souffle sur l’animation américaine. Toutes proportions gardées, car il n’y a aucune révolution nulle part. Mais au moins les producteurs, réalisateurs, scénaristes et animateurs ont retrouvé le goût des belles histoires. Au point, d’ailleurs, de surclasser les films en prises de vues réelles tant Hollywood semble tourner à vide ces derniers temps avec ses grosses productions et autres franchises.

I, Robot
La bonne surprise avec ce Robot sauvage, ou plutôt cette « robote » affranchie, provient d’un retour à quelques fondamentaux. Soit une histoire universelle d’émancipation, des protagonistes attachants et touchants, une direction artistique de haute volée, et un scénario maîtrisé, alternant émotion, action et délire. Sans oublier quelques dialogues cocasses et parfois acides.
« Tu dois mourir plus vite. la méningite prend du temps ».
Tel Robinson, Rozzum, aka Roz, débarque par accident sur un territoire déshumanisé et dénué de toutes technologies. Le robot hyper-évolué, intelligence artificielle haut de gamme, est confrontée au monde du vivant, primitif, où seule la loi de la nature règne. À partir de ce préambule, le récit déroule une série de quiproquos dans ses situations et de petites histoires servant la fabrication de liens anthropomorfiques. Le film alterne ainsi avec une belle harmonie les moments burlesques (avec de beaux clins d’exil aux Looney Tunes), les scènes plus dramatiques et son message de tolérance et de vivre ensemble.

Dans ces paysages subtropicaux splendides, le robot est condamné à soliloquer et s’adapter. Le langage puis l’intégration viendront avec le temps. On pense immédiatement à deux grandioses films d’animation : Wall-e (cousin finalement assez proche d’un point de vue narratif, proche du plagiat à certains endroits) et Le géant de fer (inspiration évidente quant à la psychologie de Rozzum).
« – Je ne suis pas programmée pour être une mère. – Personne ne l’est. »
Ce qui fait la singularité de ce conte futuriste (et survivaliste) est ailleurs. Dans cette fable que La Fontaine n’aurait pas renié : un renard tient autant à un œuf que son ancêtre à un fromage (ou même que Sid à son gland dans L’âge de glace) et une oie handicapée par sa petite taille et orpheline par un mauvais hasard sont les héros involontaires de cette aventure animalière aux caractères bien trempés. Rarement un film familial a su aussi bien manier la cruauté et l’impertinence sous son apparence bienveillante et consensuelle.
Bad robots
L’éloge de l’amour, même sans les liens du sang, fera le reste pour séduire le jeune public comme les accompagnants plus adultes. Chacun trouvera sa place, à l’instar de cette bande animalière et du robot hors-système, qui va progressivement s’ensauvager (dans tous les sens du terme). Comme pour Wall-e, les auteurs ont évidemment imaginé un voyage plus explicatif pour comprendre les origines de Rozzum et l’absence d’humains sur ce bout de terre vierge. Un arrière-plan au sous-entendu apocalyptique, climato-catastrophique, qui permet d’ouvrir sur une suite (on voit mal Dreamworks, spécialiste de l’exploitation de ses filons jusque’à l’usure, ne pas être tenté par l’idée) avec une éventuelle guerre de robots (les dociles et les évolués).

Mais ce que l’on retient, par delà les références induites (Gravity, 2001, etc.) et le sentimentalisme un peu prévisible, c’est l’émotion qui se dégage de l’ensemble. Difficile de résister à tant d’affections et de petites attentions dans cette production aux petits soins pour ses spectateurs. Sans être bouleversant ou audacieux, Le robot sauvage est une magnifique mécanique du divertissement américain. Il cible les cœurs sans nous décerveler. Et pourrait même nous interroger sur notre rapport au vivant et aux technologies si l’histoire avait eu un peu plus d’ambitions…
Le robot sauvage (The Wild Robot)
Durée : 1h42
Réalisation : Chris Sanders
Scénario : Chris Sanders, d’après le roman Robot sauvage de Peter Brown
Musique : Kris Bowers
Avec les voix de Lupita Nyong'o, Pedro Pascal, Catherine O'Hara, Bill Nighy,
Kit Connor, Stephanie Hsu, Mark Hamill et Ving Rhames
Distribution : Universal Pictures