Wolfs : les vieux loups sont fatigués

Wolfs : les vieux loups sont fatigués

Un professionnel est chargé de nettoyer une scène de crime lorsqu’un second professionnel intervient sur les lieux. Les deux loups solitaires se trouvent contraints de faire équipe et embarquent pour une nuit infernale où rien ne se passe comme prévu.

Le fric, c’est chic. À n’en point douter, Apple a mis du budget dans sa nouvelle production cinématographique, Wolfs. Ne serait-ce que dans le cachet de ses deux stars, George Clooney et Brad Pitt, qui célèbrent leurs retrouvailles seize ans après Burn after reading des frères Coen.

C’est d’ailleurs la promesse de cette réunion d’anciens qui séduit et attire nos regards. Un couple de cinéma, mélange d’alchimie flagrante et de charisme indéniable, ça fait le buzz. Résultats : une audience en progression de 30% pour la plateforme Apple TV+, au moins 4 à 5 millions de spectateurs à domicile (ou nomades), et une suite déjà officialisée.

Deux « nettoyeurs » sont commandités par deux clientes distinctes pour effacer un accident a priori fatal dans une suite de luxe new yorkaise. C’est le pitch. Et ça n’ira pas beaucoup plus loin. Il y a bien une mafia croate et quelques albanais, pour pimenter un peu la longue nuit blanche. Une victime qui ressuscite pour opérer un twist. Tout le reste est meublé par les dialogues passifs agressifs entre deux frères ennemis.

Flegme puissance 1000

Par conséquent, Wolfs ne permet pas aux deux stars de briller comme on le voudrait. L’impression d’un jeu mécanique, se réduisant à ce qu’ils savent faire (très bien). Deux vieux loups un peu las, pour ne pas dire vieillis, usés, fatigués, qui errent dans une thriller nocturne sans profondeur.

On regrette le temps où Clooney et Pitt s’envoyaient de belles piques, se chamaillaient de façon ludique et dévoilaient une évidente complicité dans la trilogie des Ocean’s de Steven Soderbergh. Là, on voit juste deux potes qui se sont perdus de vus et qui tentent de retrouver la saveur de leurs souvenirs d’antan.

La faute à une paresse scénaristique. Jon Watts, réalisateur du dernier triptyque triomphal autour de Spider-Man, aurait peut-être du solliciter un regard extérieur. Trop occupé à mettre en scène de manière élégante et sophistiquée une histoire à dormir debout, trop fasciné par ses deux vétérans roublards et polis à la fois, il a mis de côté son histoire. Les quelques ellipses (comme le combat des deux clans) s’avèrent plus frustrantes qu’intéressantes. Reste la partition d’Amy Ryan, impeccable, et la course imprévisible poursuivant Austin Abrams en slip, efficace.

Sexys sexas

Déjà vu, le récit ne s’embarasse d’aucun second degré, de lectures multiples ou d’originalités. Linéaire de bout en bout, pompant ici et là des recettes déjà éculées, de Mr et Mme Smith (le jeune homme malmené par le destin et par le duo) à Heat (duel au sommet) en passant par Collateral Damage (errance nocturne meurtrière). À chaque fois, le film n’a jamais le même brio que ses références.

Si bien qu’on consomme le film comme on ne s’attarde pas devant une belle expo photo vide de sens. On peut prendre un peu de plaisir à observer ces deux sexagénaires toujours séduisants (et assez vaillants). Cela ne suffit pas à en faire un film de genre singulier ou un polar décalé. Pour une suite, il faudra assurément écrire un suspense plus étoffé et des personnages un peu moins stéréotypés.

Wolfs
Festival de Venise 2024. Hors compétition.
Sur Apple TV + le 27 septembre.
Durée : 1h48
Avec George Clooney, Brad Pitt, Austin Abrams, Amy Ryan...
Réalisation et scénario : Jon Watts
Musique : Theodore Shapiro