Sara Forestier
Sara Forestier. Elle trouve que son nom est passe-partout, alors elle emprunte celui de Bahia BenMahmoud pour Le nom des gens. Rencontre avec une actrice nature et généreuse.



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 (c) Ecran Noir 96 - 24



Présenté hors compétition au dernier Festival de Dinard, The survivalist était probablement le meilleur film de cette 26e édition. Ce premier long métrage perpétuellement sur le fil, qui flirte à la fois avec ultra-réalisme et fantastique onirique, se déroule dans une période terrible de famine et de pillages.

Il s'agit d'une oeuvre forte, violente et intense qui décortique le mécanisme fragile des rapports humains et propose une version minimaliste et épurée du film de survie post-apocalyptique. Un long métrage envoûtant qui n'a pas (encore) de distributeur, mais qu'il serait impossible de ne pas découvrir prochainement en France.

En attendant, nous avons rencontré son réalisateur Stephen Fingleton, présent à Dinard, et encore sous le choc au cours de l'interview d'un autre film présenté dans le cadre du festival...

EN : Comment avez-vous travaillé avec les acteurs ?

SF : Il y a eu des moments extraordinaires sur le tournage. Une alchimie parfaite entre les acteurs. Par exemple, la scène où la jeune femme rase le personnage masculin. La scène de massage. La conversation entre les deux femmes, quand elles se demandent si elles vont le sauver ou pas. Nous avons seulement filmé cette scène une fois. Une prise, deux caméras. Le dialogue, puis elles rentrent à l’intérieur, la caméra les suit et elles vont le retrouver.

Je vois ce que font les acteurs et je les suis. Nous avions très peu de temps pour tourner car c’est un film à petit budget. Tout devait être fait dans la précipitation. La seule chose pour laquelle je n’ai pas économisé mon temps, c’est pour le travail avec les acteurs. La seule manière de faire était de parler avec eux. J’ai énormément parlé. On a passé tout le week-end à parler des scènes avec chacun. Le plus grand challenge, c’était probablement Martin [McCann] qui n’était pas à l’aise avec les scènes de nudité. Mais quand on les a tournés, il y avait une intensité qui m’a marquée. Je m’en souviendrai toujours.

EN : La nature semble elle-aussi un personnage à part entière…

SF : Quand j’ai préparé le casting, j’ai dit : « il y a 4 acteurs dans ce film, et le 4e c’est la forêt. » En vrai, j’ai eu un choix très limité pour la forêt. Les producteurs m’avaient prévenu que je devais absolument tourner dans cette forêt. Elle n’était pas si grandiose, cela m’a obligé à plus me concentrer sur les personnages. Ce que j’ai pu faire, c’est un grand travail sur le son. Presque tout le son du film a été remplacé en post production. Je pense que l’une des raisons qui fait que le film est aussi efficace, c’est grâce au design sonore.

EN : C’est comme si la nature prenait une revanche…

SF : Sans doute le film ne parle-t-il pas seulement du viol de la jeune fille, mais de celui de la nature également. Les êtres humains sont profondément non naturels. Il y a une série télévisée britannique des années 80 qui m’avait beaucoup ému, c’est Age of Darkness. Cela parlait d’une conspiration incluant des armes nucléaires. Dans la série, il y a un homme qui essaye de résoudre le meurtre de sa fille. Mais à la fin elle réapparaît, sous la forme d’un fantôme, et lui dit qu’on retourne tous à la terre et que la terre continuera sans nous. C’était très touchant.

EN : Dans la dernière partie du film, il y a un montage parallèle très fort entre une séquence où un personnage est sur le point de mourir, et une séquence où on voit ce qui lui arrive après sa mort…

SF : Cette scène n’était pas écrite ainsi au départ. Au départ, elle était plus sur le personnage masculin et ses réactions en voyant la femme accepter la mort, ce qui bien sûr l’amène à considérer sa propre mort. Mais Mark trouvait la scène très éprouvante à jouer. Donc en post production, avec mon monteur, on a décidé de resserrer la scène sur elle. Il se dégage une incroyable intensité d’elle quand elle imagine ce qui va arriver à son corps après… J’ai trouvé les choix du monteur très émouvants, notamment celui de n’entendre aucun son à part son souffle.


   MpM

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