Tony Gatlif est connu pour ses films évoquant les différentes communautés de gens du voyage, ou plus précisément de gens qui ont voyagé parfois sous la menace ou par obligation. Il a su inviter dans ces univers des acteurs connus (Romain Duris, Marc Lavoine, Daphné Patakia…) que de nombreux non professionnels. Son corpus cinématographique en fait l’un des plus cohérents du cinéma français, primé à Cannes et aux César, présenté dans les plus grands festivals, de Berlin à Locarno.
Un an après le sensible Tom Medina, injustement ignoré, le cinéaste revient en salles avec un film qui a 20 ans. Restauré, Swing, passé par le festival de Berlin en 2002, est un film tendre qu’il faut (re)découvrir. Le film cristalise un peu la plupart des composantes du cinéma de Gatlif (la liberté, la musique, les traditions…), tout en étant une porte d’entrée pour un large public (y compris les enfants) vers sa filmographie.
« Ceux qui ne sont pas Manouche ils se marient aussi avec des filles Manouche ? »
C’est une histoire portée par un petit garçon blondinet dans une zone pavillonnaire de Strasbourg qui se lie d’amitié avec une jeune fille manouche habitant un peu plus loin en périphérie. Français et manouches sont voisins et la rencontre va se faire naturellement avec ces regards d’enfance.
En vacances d’été chez sa grand-mère, Max, 10 ans, se prend de passion pour le jazz manouche. Après quelques aventures pour trouver une guitare, Miraldo, virtuose en la matière, accepte de lui donner des cours de guitare. Ces leçons amènent Max à rencontrer la communauté manouche et plus particulièrement Swing, une jeune fille farouche au tempérament explosif qui a tout du garçon manqué…
Le petit garçon en quête d’aventures essaie d’apprendre à jouer de la guitare mais surtout son initiation va aller beaucoup plus loin : aider à écrire une lettre administrative, aller à la pêche au poisson, sortir quand-même en cachette alors qu’on a été puni, une complicité avec cette fille bizarre pas comme les autres… L’apport de l’autre devient une richesse, au-delà des préjugés.
« On nous a fait du mal au début de la guerre, on n’avait plus le droit de voyager, ni de faire de la musique… »
Les petites péripéties de l’enfance sont ponctuées par le cours de guitare. Ces parenthèses musicales sont autant de moments où le jeune garçon est face aux adultes Manouches. Ce qui est raconté est alors plus délicat avec, en creux, les drames de la seconde guerre mondiale ou la maladie.
La place de la musique dans Swing devient de plus en plus présente au fil du récit. Au début elle est comme un prétexte à la rencontre entre le petit français et les Manouches, avec une rythmique maladroite qui correspond aux hésitattions des uns et des autres. Puis la mélodie devient plus harmonieuse. La rencontre des deux mondes a eu lieu. Enfin la musique devient une véritable fête avec des danses et un petit concert improvisé, symbole de la fraternité retrouvée. Les différentes sonorités de guitares manouches façon Django Reinhardt sont tantôt porteuses d’émotions dramatiques ou complètement joyeuses et emballantes.
Swing de Tony Gatlif se révèle être autant un film initiatique qu’un film d’apprentissage, avec la musique comme langage commun entre les cultures, les personnages et les spectateurs.
Pour les plus curieux, l’acteur et guitariste Tchavolo Schmitt se produit toujours en concert en tant que musicien : il sera fin juin sur scène au festival Django Reinhardt de Fontainebleau.
Swing Réalisation et scénario : Tony Gatlif Durée : 1h27 Distribution : Malavida Avec Oscar Copp, Lou Rech, Tchavolo Schmitt, Mandino Reinhardt, Abdellatif Chaarani, Fabiène Mai