Bodyguard, The Recruit et The Night Agent : de bonnes recrues pour les séries

Bodyguard, The Recruit et The Night Agent : de bonnes recrues pour les séries

Trois séries qui n’ont a priori rien à voir par les métiers de leurs personnage principal : un garde du corps d’une politicienne britannique, un avocat de la CIA et un agent de bureau de la Maison Blanche. Pourtant, ces trois « thrillers » diablement efficaces et rafraîchissants, divertissants et captivants, ont en commun plusieurs éléments qui forment, au final, un genre en soi : le « bleu » à l’épreuve du feu.

Richard Madden Bodyguard

Gardien sans but

Bodyguard, qui a déjà cinq ans et prépare sa deuxième saison, a révélé au grand public Richard Madden, sexy et pas seulement pour son accent. Le rôle lui a valu un Golden Globe amplement mérité. Sergent de police, vétéran de guerre souffrant de stress post-traumatique, en dépression sévère, David Budd est un agent de protection au Metropolitan Police Service. Séparé de sa femme, il vit seul. La série débite par une attaque terroriste dans un train, qu’il réussit à empêcher. Le voilà promu à la protection de la Secrétaire d’État à l’Intérieur, une ambitieuse néo-conservatrice, jusqu’à finir dans son lit. La série, l’une des meilleurs dans le genre, flirtant avec l’esprit de Borgen, exploite toutes les facettes d’un métier sacrificiel où l’intime et le devoir font mauvais ménage, d’autant plus quand le garde du corps ne partage pas du tout les positions politiques de sa patronne.

Noah Centineo The Recruit

Recrue sans salut

Car c’est bien le défi, quand ce n’est pas la méfiance, à l’égard de la hiérarchie et des puissants qui sous-tend les trois séries. Dans The Recruit, réalisé par Doug Liman, c’est un jeune avocat tout juste embauché par la CIA qui se retrouve dans un maëlstrom infernal où la Loi et l’action ne sont pas forcément compatibles. La série, diffusée sur Netflix fin 2022 (et qui sera prolongée), a révélé un ancien mannequin pour sous-vêtements Calvin Klein, Noah Centineo, lui aussi assez sexy avec sa gueule de jeune premier. Il incarne Owen Hendricks, sorti de l’armée pour travailler à la CIA au service juridique. Zélé et malin, il flaire une affaire en débroussaillant le courrier accumulé par son service, fumiste et blasé. Il entre ainsi en contact avec un ancien agent non officiel venu de l’Est, Max Meladze. Incarcérée pour meurtre, celle-ci menace de faire des révélations si elle n’est pas libérée. Ce qui va mener le gentil Owen, qui, lui, vit dans une coloc à la Friends, à une série de confrontations musclées sur le terrain, avec, quelques pièges : des collègues malveillants, un patron qui tient à son poste, une mafia russe sans scrupules, des agents fainéants ou cyniques… Là aussi, l’avocat va franchir des lignes rouges, à commencer par cette liaison dangereuse avec la prédatrice Max, jeu de manipulation hautement inflammable, qui les conduira jusqu’au sexe.

On le voit bien, dans les deux séries, les ingrédients sont les mêmes : on couche avec « l’ennemie » (qui n’en est pas vraiment une), on désobéit à ses supérieurs, on s’affranchit des règles, on déjoue des complots, et on risque sa carrière (et sa vie) au nom d’un certain professionnalisme.

Gabriel basso The Night Agent

Agent pathologique

C’est exactement le même principe pour The Night Agent, série vedette du printemps sur Netflix, qui a déjà lancé le développement d’une deuxième saison. Cette fois-ci on découvre Gabriel Basso, artiste plutôt doué à ses heures, boxeur patenté, et lui aussi sexy (et pas très pudique). Il interprète Peter Sutherland, agent du FBI, sous les ordres du Bureau fédéral mais aussi de la cheffe de cabinet de la présidente des USA, dévolu lors de « shifts » nocturnes, au sous-sol de la Maison Blanche, à recevoir des appels (inexistants) sur un téléphone d’urgence. Mais , une nuit, il reçoit un appel d’une inconnue dont l’onlce et la tante viennent d’être tués sous ses yeux. Commence alors une double traque : celle d’une chasse à l’homme où il est la cible avec cette victime malgré elle, et celle d’une vérité qui va les entraîner dans une conspiration nationale. Il est intéressant de voir que Peter Sutherland partage beaucoup de points communs avec David Budd dans Bodyguard. Tous deux célibataires vivants dans des appartements sans âmes, ils sont également écrasés par leur trauma respectif (Peter vit sous le poids de la réputation d’un père déshonoré et injustement condamné) et, avant tout, doivent leur « promotion » à un acte héroïque face à un attentat terroriste. The Night Agent commence avec la menace d’une bombe prête à exploser dans le métro de Washington.

Si Bodyguard est la plus réaliste des trois séries, The Recruit a l’avantage d’assumer complètement son côté fictionnel. Mais The Night Agent creuse plus loin l’idée de la paranoïa et du complot, proche de films comme Sens unique, Dans La ligne de mire, Un crime dans la tête ou même les Jason Bourne. Dans tous les cas, le héros, mâle blanc hétéro de moins de trente ans, est mal en point aussi bien sous son crâne que dans sa position sur l’échiquier. Qu’il soit ambitieux ou talentueux importe peu. Cela les aide à « résoudre » l’enjeu (criminel), mais pas forcément à trouver des solutions à leurs problèmes (personnels). Ils incarnent surtout un archétype du héros qui s’en prend plein la tronche : engueulades et brimades, coups tordus et coups durs, balles (pas forcément perdues) et coups de boule. Les femmes semblent bien plus puissantes (et le sont réellement), qu’elles soient leurs supérieures hiérarchiques ou leurs « associées » malgré eux. Ils n’ont pour eux que leur formation (militaire, juridique, policière) et leur intégrité (avec laquelle ils sont obligés parfois de composer).

https://youtu.be/-7rh0I0XTqs

Idéalistes et insoumis

Mais ce que montrent finalement Bodyguard, The Recruit et The Night Agent n’a finalement que peu de rapport avec leur genre ou leur récit. La vérité est ailleurs. Ce sont trois jeunes hommes qui partent au combat, dans les arcanes du pouvoir, contre un système complaisant dans les compromissions. Trois idéalistes finalement qui ne se résignent pas à mettre le doigt sur la couture du pantalon. Trois mecs qui, face à une réalité violente et mensongère, sont obligés de constater leur naïveté face à la pourriture du monde. Pire, on remarque que cela a un impact direct sur leur propre existence, pas franchement joyeuse et malheureusement solitaire. Ils ont autant de difficultés à séduire qu’ils ont de la facilité à survivre. Ce sont des êtres conditionnés pour être des bras armés de gens sans foi ni lois. Pas sûr qu’ils acceptent ce rôle très longtemps. En tout cas, clairement, David, Owen et Peter ont choisi le camps des insoumis. Et ça la rend irrésistibles au milieu de ces histoires irréalistes.