Cannes 2021 |  Les Olympiades, chroniques érotico-romantiques anecdotiques

Cannes 2021 | Les Olympiades, chroniques érotico-romantiques anecdotiques

Comptant sur la maîtrise de sa mise en scène, son esthétique, sa musique et ses acteurs, Jacques Audiard signe un film pourtant très superficiel sur les femmes et leurs désirs à l’époque #metoo.

Jacques Audiard signe son Bande à part (de Godard) avec Les olympiades, film urbain en noir et blanc sur un trio parisien. En filmant l’émancipation des femmes, à l’ère #metoo, le cinéaste a choisi opportunément un scénario pour tenter une œuvre féministe et contemporaine, sous la forme d’un drame romantique. 

Fiche technique
Les Olympiades, 1h45
Sortie en salles le 3 novembre 1945
Réalisation : Jacques Audiard
Scénario : Jacques Audiard, Céline Sciamma, Léa Mysius, d'après trois nouvelles d'Adrian Tomine
Musique : Rone
Photo : Paul Guilhaume
Distribution : Memento films
Avec Lucie Zhang, Makita Samba, Noémie Merlant, Jehnny Beth
En compétion au Festival de Cannes 2021

Hélas, cela ne l’empêche pas de tomber dans le piège du « male gaze » dès qu’il s’agit d’érotisme. Son voyeurisme n’est pas avare en corps féminins dénudés et en positions du Kamasutra. Tandis que son personnage masculin a toujours la pudeur de cacher ce sexe qu’on ne saurait voir. Même la dick pic exhibée sur un site de rencontre est floutée. L’égalité des sexes n’est pas un objectif, encore moins un sujet.

Ce regard masculin et hétérosexuel se double de quelques répliques un peu sentencieuses sur l’éducation ou les réseaux sociaux qui feraient presque passer Les Olympiades pour un film faussement progressiste avec son métissage assumé et l’érudition de ses personnages. En cochant toutes les cases, Audiard évacue assez vite le contexte social et survole les clivages modernes, empêchant le film de gagner en profondeur. Tout le monde il est beau, tout le monde il est (presque) gentil.

Plus fin psychologiquement, le film se focalise sur quatre personnages : un homme (sensible, bon amant, respectueux, éduqué) qui subit les atermoiements et les indécisions de ses deux amoureuses ; soit une jeune chinoise à la libido insatiable, qui se protège en étant orgueilleuse, odieuse et dans le déni ; et une trentenaire qui fuit une relation toxique et sa frigidité, et cherche à repartir dans une nouvelle vie. Cette dernière est intriguée par une camgirl sur suie payant porno qui lui ressemble furieusement… Trois histoires qui se succèdent pour mieux se croiser, jusqu’à trouver leur propre voie.

Masculin-féminin

Il n’en ressort pas grand chose à part le portrait de jeunes filles qui ont le feu dans le sang et décident par elles-mêmes quels désirs elles veulent assouvir. Les Olympiades se focalise sur des femmes insécures, qui doutent de leurs attirances et un homme qui sert de fil conducteur à cette chronique romanesque, mais si convenue dans sa construction narrative. Ces histoires d’amour sont le seul moteur d’une thèse sur le féminin des années 2020, à la fois gender fluid et cherchant le plaisir à tout prix, entre sororité et sentiments offensés.

Pour tenter de se singulariser, Jacques Audiard sur-esthétise son histoire. Pas seulement avec ce noir et blanc élégant qui maquille la laideur du béton (il n’y a qu’une apparition en couleur, sans que l’on sache vraiment pourquoi). La splendide musique de Rone créé le rythme et façonne l’atmosphère de ce récit lui permettant de ne pas être complètement conventionnel. Le casting est impeccable. Quelques répliques cinglent pour donner au film un peu de relief.

Pour le reste, les scènes s’enchaînent comme dans une pièce de théâtre, avec des personnages attachants et bien écrits. Dans cette œuvre douce-amère, les protagonistes cherchent à remplir un vide insatisfaisant, à exprimer des sensations confuses. Jamais le cinéaste ne résout vraiment ces questions. Malgré tout le talent d’Audiard, Les olympiades aboutit à une belle coquille aussi vide que ses personnages et qui ne produit aucune émotion. Comme s’il s’était emparé d’un sujet qu’il ne comprend pas autrement que par les yeux de son héros, Camille, à la fois naïf et passif, romantique et dépassé. Un film propre, mais au final, très anecdotique.