Le nouveau 32ème Dinard Festival du Film Britannique a été programmé avec surtout 6 sections thématiques différentes (musique, adolescence, nature, film d’horreur, mélodrames…), et c’est parmi ces sections que certains titres ont constitué la sélection des 6 films qui étaient en compétition. Du coup à côté des fictions attendues il y avait donc aussi 1 film d’horreur, 1 biopic, 1 documentaire; soit une mission délicate pour les départager pour attribuer le Hitchcock d’or. Le jury était comme d’habitude composé d’une variété de profils franco-britanniques : les actrices Laura Smet et Eye Haïdara, l’acteur Finnegan Oldfield, le réalisateur Mohamed Hamidi, les producteurs Paul Webster et Jean des Forêts autour de la présidente Bérénice Bejo.
Creation Stories de Nick Moran : biopic de vie turbulente de Alan McGee avec la création du petit label de musique ‘Creation Records’ qui vivotait avec des dettes avant d’être intégré à 50% à la major du disque Sony. En fait Alan McGee a eu à la fois l’envie et la chance de faire signer certains groupes qui sont devenus ensuite importants comme en particulier les écossais de Jesus and Mary Chain et de Primal Scream. Un jour à Glasgow un groupe de jeunes anglais inconnu est arrivé pour un petit concert dans un bar où Alan McGee se trouvait par hasard après avoir raté un train, il leur a fait signer un contrat et plus tard leur premier album est devenu le disque de l’année le plus vendu : c’était Oasis ! Alan McGee est joué par Ewen Brémmer et il y a Irvine Welsh au scénario soit l’équipe de Trainspotting et c’est réalisé par un ex-acteur de Arnaques Crimes et Botanique : malheureusement ils n’ont résisté à faire de ce film un sous-ersatz de leurs succès d’antant, tout en n’étant pas assez convaincant pour remporter l’adhésion.
Ride the Wave de Martyn Robertson : c’est un documentaire tourné à différents moments sur une durée de 3 ans, avec des images en Ecosse, Japon, Portugal, Irlande. On y découvre le jeune ado et champion de surf Ben Lang qui grandit depuis ses 12 ans au fur et à mesure de ses différentes compétitions où il accompagné par sa famille et surtout par son père. On y voit la famille soudée autour de lui pour l’encourager et l’entrainer, sa passion du surf se révélant aussi une échappatoire de l’école où il est rejeté des autres. Au delà des compétitions internationales où malgré son jeune âge il est assez bien classé (en catégorie -18ans) il se prépare a surfer les plus myhtiques grosses vagues qui sont aussi un réel danger…
The Power de Corinna Faith : ça aurait dû être un bon film film d’horreur et ça en avait toutes les promesses, mais à l’arrivée c’est un film efficace qui recherche trop à faire peur et à faire sursauter. Tout le début et l’installation de l’ambiance est remarquable avec le contexte des grêves de 1974 qui font qu’il y a des grosses coupures de courant éléctrique dans Londres, une nouvelle infirmière est embauchée dans un hôpital et pour sa première nuit il fera noir… Ensuite c’est des couloirs sombres, des portes qui grincent, une enfant malade qui voudrait s’échapper, peut-être une force démoniaque qui se manifeste…, et un peu tout le catalogue d’images surnaturelles angoissantes (sans être toutes justifiées), et tout cela repose sur une énigme du passé qui sera assez vite résolue en fin de film.
Wildfire de Cathy Brady : une femme qui avait disparue depuis tellement longtemps qu’on la croyait morte revient dans son village en étant hébergée par sa soeur à la vie bien rangée. Le choc des retrouvailles va peu à peu faire dérailler le quotidien jusqu’à réveiller des traumas comme la mort mystérieuse de leur mère, avec en toile de fond aussi les violences entre partisans de l’Irlande du Nord et celle du Sud. La revenante a des comportements imprévisibles et sa soeur va la soutenir contre tout les autres, le duo livre en effet une ‘masterful performance’ pour ces deux personnages.
Sweetheart de Marley Morrison : une jeune fille de 17 ans suit de mauvaise grâce sa famille (sa mère, sa soeur enceinte, son beau-frère, sa petite soeur) en vacances dans un holiday-park. Les autres s’amusent sauf elle qui s’ennuie jusqu’au moment où elle croise une jolie employée surveillante de baignade qu’elle s’imagine séduire sans avoir aucune chance que ça se produise. Contre toute attente cette jolie nana très différente s’intéresse aussi à elle… Le film est centrée sur les deux jeunes demoiselles mais il donne aussi beaucoup d’importances aux autres personnages de la famille dont en particulier celui de la mère (Jo Hartley), ce qui fait qu’on dépasse ici la romance de teen-movie pour aller plus loin avec à la fois de l’humour et de la mélancolie. Avec ce premier long-métrage la réalisatrice Marley Morrison s’impose déjà comme nouveau talent à suivre.
Limbo de Ben Sharrock : Une groupe de réfugiés se retrouvent isolés sur un epetite île écossaise en attendant des éventuels papiers de régularisation, et l’attente est longue. Ils reçoivent quelques cours d’intégration (respecter le ‘non’ d’une femme, quoi dire à un entretien d’embauche…) qui sont inconvenant, et bien que venant de pays différents pour différentes raisons certains sympathisent entre eux. Le film s’intéresse surtout à quatre d’entre eux, et en particulie Omar qui ayant fui la Syrie s’inquiète désormais de son avenir sans horizon. Ben Sharrock a fait le choix d’une suite de séquences plus ou moins ironiques toujours face à sa caméra en plan fixe sans bouger (ambiance un peu façon Aki Kaurismäki), ce qui est à la fois déroutant tout en donnant son originalité au film.
Il est apparu assez vite que Sweetheart était un favori logique pour figurer dans le palmarès (et il y est), le jury a d’ailleurs indiqué lors de la cérémonie de clôture que eux ont eu plusieurs favoris au moment de débattre et rendre leur palmarès :
Hitchcock d’or : Limbo de Ben Sharrock
Prix spécial du jury : Sweetheart de Marley Morrison
Prix d’interprétation : ex-aequo pour Nora Jane-Noon et Nika McGuigan, les deux actrices de Wildfire
Prix du Public : Limbo de Ben Sharrock
Hitchcock du meilleur court-métrage : Bound de Joe Carter
A noter que Limbo de Ben Sharrock avait été avant sélectionné pour le Festival de Cannes 2020 qui n’avait pas eu lieu. Le prix d’interprétation aux actrices était une évidence pour le duo Nika McGuigan (avec une pensée hommage à elle ayant été emportée par un cancer foudroyant durant la post-production de Wildfire) et Nora Jane-Noon (d’ailleurs déjà venue à Dinard en 2005 pour The Descent).