C’est un des films les plus attendus de l’année, et cela pour une raison logique : ce n’est ni un début de franchise (Dune , où Denis Villeneuve doit faire la suite pour 2023) ni la fin d’une saga (Mourir peut attendre, où Daniel Craig range au vestiaire son costume de James Bond 007), c’est simplement parce que cest Edgar Wright. Le scénariste-réalisateur a gagné ses galons de cinéaste cool avec surtout sa ‘trilogie cornetto’ ultra-british (Shaun of the Dead, Hot Fuzz, Le dernier pub avant la fin du monde) et ensuite avec son goût pop de mixer images et musiques (Scott Pilgrim, Baby driver…). Son nouveau projet réunit enfin ses différents ingrédients préférés tous ensemble dans un même film ! Last night in Soho est donc utlra-british et ultra-musical et avec cette fois en plus une sophistication ultra-délirante où deux époques avec leurs rêves et leurs fantômes se confondent pour un troublant mystère…
Edgar Wright vous invite à voyager dans le temps…
Avec ses films précédents il joué avec les codes de plusieurs genres (zombies-movie, cops-movie, aliens-movie, teenage-movie, heist-movie…) avec à chaque fois une certaine distanciation plein d’humour. Pour la première fois ce nouveau film Last night in Soho est très très sérieux (sauf quelques dialogues ironiques), ici il n’y a plus de légereté et c’est dans le but de mieux immerger le spectateur dedans cette mystérieuse histoire. Avant il faisait voir les aventures de ses amis Simon & Nick et les autres, et dans ce nouveau film il faut partager les peurs de Eloise dans sa découverte de Londres qui va se révéler effrayante. On était alors devant ses personnages, il a l’ambition ici de nous emmener avec son héroïne…
Dans Last night in Soho, notre héroïne Eloise part en voyage. D'abord de la campagne à la ville, puis à une autre époque... Moi-même, les acteurs et l'équipe aimerions vous demander, à vous nos premiers spectateurs, de garder les secrets du film pour vous afin que d'autres puissent les découvrir plus tard. Nous aimerions que tous ceux qui le voient découvrent l'histoire en compagnie de Eloise. Alors, s'il vous plaît, si vous le pouvez, gardez l'expérience intacte pour les prochains spectateurs afin que ce qui se passe dans Last night in Soho reste à Soho…
Edgar Wright, et l’équipe de Last night in Soho
On peut seulement dire qu’il s’agit d’une jeune femme passionnée de mode qui arrive aujourd’hui dans la capitale Londres pour y intégrer une école mais elle sera amenée à plonger mystérieusement dans les années 60 en compagnie d’une éblouissante jeune star montante. Mais le Londres des années 60 n’est pas ce qu’il parait, et le temps semble se désagréger entrainant de sombres répercussions dans sa vie présente… C’est en fait un éblouissant labyrinthe fantastique où Edgar Wright nous emmène.
Vous croyez aux fantômes ?
Edgar Wright développe tout ses talents de narration avec son sens du cadrage et du montage pour jouer avec les différents codes du film fantastique, et même un peu de l’horreur. C’est alors tout un champs de possibles qui s’ouvre avec quantités d’hypothèses passionantes : rêve, trouble de la personalité, fantômes, folie, et si… La réalité du présent devient moins tangible au fur et à mesure que des illusions du passé se matérialisent à la fois dans la tête de Eloise et autour d’elle. Il y a certainement quelque chose qui se passe et il y a sans doute quelque chose qui a eu lieu, mais quoi ? Le spectateur est amené à s’interroger tout comme l’héroïne, et même à douter de certains indices. C’est toute la maestria de la mise en scène somptueuse de ce récit extravagant, le film à le pouvoir de nous perdre dans un suspense qui devient oppressant tout en nous guidant avec malice vers la résolution de l’énigme.
Last night in Soho s’affiche comme un véritable puzzle avec plein de petites pièces à rassembler, et plusieurs d’entre elles sont aussi différentes obessessions du cinéaste Edgar Wright. Il y a bien sûr la musique des sixties qu’il adore (qui d’ailleurs ambiance déjà son Baby driver) et ici ses fantastmes de l’époque du ‘swinging London’, il s’agit de toute une nostalgie d’un monde inconnu sauf justement à travers des films et des disques. Ce n’est évidement pas un hasard si on y retrouve par exemple à l’image Diana Rigg et Terence Stamp et si on y entend les mélodies de The Kinks et Petula Clark et tout ce que ça pourrait évoquer… Edgar Wright nous propose un retour vers le passé flamboyant (le directeur de la photographie Chung Chung-hoon est d’ailleurs celui de Park Chan-wook…) qui se confronte à notre quotidien moins chic au service bien entendu de la construction d’un coup de théâtre final et en même temps d’un complexe portrait de femme. Et c’est d’ailleurs la première fois dans sa filmographie où le personnage principal est une femme, et avec plusieurs points de vue de femme (en particulier Thomasin McKenzie et Anya Taylor-Joy).
Edgar Whright suit ainsi la trace d’autres cinéastes qui sont parvenus à faire pénétrer les spectateurs dans leur univers où pendant qu’on y cherche le fin mot de l’histoire le film se révèle être avant tout un fabuleux voyage de cinéma. A l’instar de Quentin Tarantino et son Once upon a time in Hollywood, de David Lynch et son Mulholland Drive, de Dario Argento et son Suspiria, de Roman Polanski et son Répulsion, il se joue quelque chose de cauchemardesque entre le sexe et la mort. Et si Edgar Wright leur fait ici où là à tous un clin d’oeil il signe là lui aussi une oeuvre très personnelle appelée à hanter des souvenirs.
Fiche technique Last night in Soho Réalisation : Edgar Whright Scénario : Edgar Whright et Krysty Wilson-Cairns Avec : Thomasin McKenzie, Anya Taylor-Joy, Matt Smith, Diana Rigg, Terence Stamp... Durée : 1h57 Sortie en salles : 27 octobre 2021