Amours à la finlandaise : polyamour, mode d’emploi

Amours à la finlandaise : polyamour, mode d’emploi

La réalisatrice finlandaise Selma Vilhunen n’est pas très connue à li’nternational. Malgré tout, dix ans après une nomination à l’Oscar du meilleur court métrage (Pitääkö mun kaikki hoitaa?) et de multiples sélections pour ses longs métrages dans les festivals américains, nordiques et même à la Berlinale, Amours à la finlandaise, passés par les festivals de Rotterdam et Göteborg, arrive sur les écrans français.

Sans doute parce qu’il est porté par son actrice principale, Alma Pöysti, désormais connue des cinéphiles puisqu’elle nous a éblouis cette année dans Les feuilles mortes d’Aki Kaurismäki, prix du jury à Cannes.

Sur le thème maintes fois traité de l’infidélité dans le couple, Amours à la finlandaise ose un pas de côté, qui ne surprendra que ceux qui vivent avec des oeillères dans le confort des conventions.

Tout commence avec une scène de sexe : chaleureuse, complice, rieuse, planante (le poppers aide). De l’amour charnel, consenti, ouvert. « Et maintenant?« 

Mais la femme, politicienne progressiste promise à un avenir national, ignore que son mari, idéal et parfait en apparence, pasteur respecté par sa communauté, fils de hauts bourgeois très conservateurs, a une liaison régulière avec une autre femme. Et maintenant, le couple va se désagréger. Même si l’amour est toujours présent, la trahison, le mensonge et la confiance détruite vont éparpiller, dans un premier temps, cette famille classique. Nul divorce possible pourtant. Et nulle envie de se séparer : « Ne pars pas. Je veux récupérer ma vie« .

Sexe, mensonges et idéaux

C’est ici que la cinéaste dévie des clichés et choisit une voie plus audacieuse et assez réjouissante. En jeu, la posséssivité. Est-elle si essentielle? Tout le brio du film provient de l’interprétation subtile et nuancée d’Alma Pöysti. Même dans les creux du scénario, elle parvient à habiter le récit par sa seule présence.

Sans divulgâcher l’évolution des relations, on comprend vite que la réalisatrice veut nous emmener sur des terrains sentimentaux plus mouvants, et plus ouverts. Triolisme, échangisme, couple libre, polyamour : tout est possible.

Surtout, tout est rendu possible et fluide grâce à l’humanité qui se dégage de chacun des personnages. Au couple, vont s’ajouter une maîtresse, mère célibataire et qui tombe enceinte, un drag queen non binaire et bisexuel, lui-même en partenariat avec un autre homme. Chronique d’une saison d’amours compliqués, le film flotte ainsi entre les battements de cœurs, la liberté des possibles, et la générosité intime, qui va tout emporter.

Ces amours à la finlandaises sont à coup sûr loin du conformisme, et de la zone de confort habituelle. C’est ce qui rend le film si attachant, malgré quelques creux causés par un montage qui parfois se relâche. Entre l’effondrement, la résilience, et finalement la résistance aux diktats sociétaux, chacun cherche sa voie pour ne rien détruire. C’est le récit sensible d’une construction menacée par la peur, la jalousie, le jugement, la méfiance et les conditionnements.

À l’orgasme fusionnel du début répond alors en écho une satisfaction, une plénitude plus collective. Une nouvelle famille à multiple facettes. Avec un certain classicisme, trop scolaire, la cinéaste veut aborder toutes les limites d’un tel assemblage, avec ses inégalités et ses angoisses, son degré d’acceptation et son fragile équilibre. Selma Vilhunen se pose alors en anthropologue du couple, forcément imparfait. Et pourtant, ses amours nous laissent une saveur sucrée dans cette atmosphère chaleureuse.