Agnès et Xabi Molia redonnent espoir en l’école avec « Un bon début »

Agnès et Xabi Molia redonnent espoir en l’école avec « Un bon début »

L’école est un sujet d’actualité, et pas seulement en France. Le cinéma, sous la forme de fictions, s’en est souvent emparé. Essentiellement pour valoriser des enseignants aux méthodes pas forcément conventionnelles, mais dont la passion et l’engagement permettent de faire grandir les élèves. On ne compte plus les films sur ces profs formidables, du Cercle des poètes disparus à Esprits rebelles, de Bad Teacher à Plus beau métier du monde, de Sister Act 2 au Maître d’école, en passant par Les 400 coups.

En France, ces dernières années, l’école était une option de comédies familiales, où l’enseignant était plutôt rabaissé (L’élève Ducobu, La guerre des boutons, Le petit Nicolas, Les profs), de portraits réalistes ou optimistes d’un monde regretté ou fantasmé (Les Choristes, L’école pour tous, Les beaux gosses) ou de films engagés pour la défense d’une profession maltraitée ou méprisée (Ça commence aujourd’hui, Entre les murs, La vie scolaire).

Dans ce domaine, le documentaire de référence reste Être et avoir, portrait compassionnel d’un prof en milieu rural, film à la fois réaliste et engagé, teinté de nostalgie et clairement hagiographique. Deux semaines après la comédie sociale (utopique?) La cour des miracles, où une directrice d’école se bat pour attirer les enfants de bobos s’installant dans sa banlieue mais préférant l’école privée du coin, Haut et Court distribue Un bon début, signé Agnès et Xabi Molia.

Un bon début
Documentaire écrit et réalisé par Agnès et Xabi Molia
Sortie en salles le 12 octobre 2022
Durée : 1h39
Distribution : Haut et Court
Production : Moteur s'il vous plait

Ici, l’empathie n’est pas feinte et le message pourrait illuminer les esprits les plus inquiets sur l’avenir de la société. En plantant leur caméra dans un lycée de Grenoble, au cœur du dispositif « Starter », les cinéastes montrent que rien n’est irréversible, pas même des ados ayant décroché scolairement, paumés socialement, fragiles humainement.

Le programme « Starter » sert à des adolescents jugés « irrécupérables » par le système éducatif. Ils sont pris en main par Antoine Gentil (ça ne s’invente pas), aussi patient que déterminé, pouvant être autoritaire mais jamais brutal, à l’écoute permanente et à la sensibilité intelligente. Cet homme a su installer une école dans une prison. Il sait, depuis dix ans, sauver des gamins et leur offrir une issue de secours (formation, réintégration, etc.).

Le documentaire, sans voix off en commentaires, suit une année de classe, où l’on suit des jeunes aux profils très différents. C’est une observation de la méthode de « Starter » comme la description d’une adolescence troublée et tourmentée. Tout sonne juste, et on se prend à sourire devant la fierté des devoirs accomplis, pour Antoine Gentil comme pour les élèves. Cela remet du baume au cœur, alors que le film n’a rien de naïf ou de complaisant. La dureté sociale, la violence intérieure, les contradictions intimes, la pudeur palpable tendent les enjeux et les relations.

Ce cinéma vérité, non dénué d’émotions, saisit les difficultés d’un système normatif et éclaire la nécessité d’un schéma moins conformiste. « Starter » pointe les manques et les manquements de l’Education nationale tout en redonnant espoir (pour ne pas dire la foi) en un métier et une vocation à sauver des jeunes mis sur le bas-côté. Il y a de la joie à les voir s’étonner de leur propre réussite. Comme il y a de la désolation à comprendre qu’ils auraient pu être écartés de leur accomplissement.

Un bon début, en cela, se distingue largement des films sur ce sujet. Il se relie à Etre et avoir et Entre les murs par la figure d’un homme prêt au sacrifice, dont les compétences sont indéniables et la croyance en sa fonction inébranlable. Et ce malgré ses doutes ou sa marginalité. Parce qu’ils explorent autant le sensible que le politique, le social que le pédagogique, la fratrie Molia réussit à nous embarquer dans cette extension du domaine de la lutte contre le déterminisme et la fatalité. Pour ses élèves miraculés, c’est un bon début pour le reste de leur vie.