L’artiste et cinéaste Jacques Perconte, dont le travail se décline sous la forme de performances, tirages photographiques, installations et films depuis le début des années 2000, propose cet été une exposition inédite intitulée Marée Métal, créée spécialement pour le Lieu unique de Nantes. Il y présente un film de plus de trois heures découpé en six chapitres diffusés simultanément sur six grands écrans. Ses images, soumises au processus de compression vidéo qui est au centre de son travail, sont d’une beauté fulgurante : une usine affiche des bleus et des roses en technicolor, la forêt est d’un vert profond, de l’or semble couler d’une cascade…
Le dispositif, qui incite les spectateurs à se déplacer dans le vaste espace du Lieu unique, ancienne usine Lu réhabilitée depuis l’an 2000, joue sur les points de vue et les perspectives, mais aussi sur les rencontres entre les images d’un écran à l’autre. « L’enjeu était vraiment que l’oeuvre se déploie dans l’espace et dialogue avec le lieu« , explique Jacques Perconte. « Je souhaitais aussi que les choses coexistent à des régimes différents. C’est ce niveau d’interaction entre les images qui m’intéresse. Ainsi que l’idée d’offrir à chaque visiteur une expérience différente. »
Les films étant de durée inégale, les combinaisons sont en effet sans cesse renouvelées, offrant sans cesse de nouveaux jeux d’échos et de correspondances, ou au contraire d’oppositions. A un instant T, une éolienne dans la brume côtoie une usine chimique d’un côté et des vagues de l’autre. Plus tard, des excavatrices creusent la roche, tandis que la mer semble tout à coup charrier des déchets de toutes les couleurs. Un peu en retrait, un incendie rougeoie comme au ralenti.
Nouveauté dans l’œuvre de Perconte, trois points d’écoute accompagnent les images et les sons. Chacun propose un monologue personnel, qui aborde des thèmes intimes, politiques et universels. Celui écrit par Jacques Perconte vient de son film Le Progrès. Il y est question à la fois de son rapport au cinéma et de sa vision du monde pensé comme un tout, dans lequel chaque élément – minéral, végétal, animal et humain – est appelé à cohabiter.
Les questions environnementales sont en effet au coeur de sa réflexion, dans une démarche qui ne se veut ni didactique ni punitive, mais sensible, sensorielle, et même communicative. Rien n’est jamais asséné au spectateur qui est libre de choisir son propre parcours, physique comme émotionnel. Il suffit de passer la porte de l’exposition pour se laisser entraîner par cet indéniable moment de poésie à la fois hors du monde et profondément ancré dans le réel.