Deauville 2023 :  Le cinéma américain de Carole Bouquet

Deauville 2023 :  Le cinéma américain de Carole Bouquet

Doit-on encore présenter Carole Bouquet ? Luis Buñuel, Werner Schroeter, Dino Risi, Francis Ford Coppola et un James Bond côté films étrangers. Bertrand Blier, Michel Blanc, Patrice Leconte, Claude Berri, Pierre Jolivet, Cédric Kahn, Christophe Honoré dans sa filmographie française. Un César la meilleure actrice en 1990, pour Trop belle pour toi. Sex and the City et En Thérapie pour les séries. Phèdre et Bérénice sur les planches.

Cette année Deauville a proposé une Conversation avec Carole Bouquet : «Mon cinéma américain».

Quelques jalons de sa filmographie outre-Atlantique :
1977: révélation à 20 ans tant en France qu’à l’international dans Cet obscur objet du désir de Luis Buñuel
New-York: formation au jeu et à l’anglais, amie avec l’actrice Clio Goldsmith et familière avec Andy Warhol et Peter Beard
1981: notoriété mondiale dansle rôle d’une ‘James Bond girl’ avec l’agent 007 Roger Moore dans Rien que pour vos yeux de John Glen
1989: apparition dans le segment réalisé par Francis Ford Coppola dans le tryptique New York Stories
1986-1990: égérie pour Chanel, avec notamment une publicitée dirigée par par Ridley Scott
2004: guest dans un épisode de la série Sex and the City
2008: présidente du jury du 34ème Festival du cinéma américain de Deauville.
2014: membre du jury du Festival de Cannes présidé par Jane Campion (avec aussi Sofia Coppola, Nicolas Winding Refn…); apparition dans la mini-série Rosemary’s Baby

Pour cette conversation Carole Bouquet a choisi 11 films américains qui sont emblématiques à ses yeux. À partir de quelques extraits, elle a évoqué ses goûts pour le cinéma américain et plus largement sa passion pour les films : l’écriture du scénario, la préparation des cadrages, son goût pour le cinéma italien, son rapport aux scènes de violence…

La définition du cinéma

« Regarder un film sur une tablette n’a rien à voir avec l’expérience de le voir au cinéma. Je vis ce que je vois à l’écran. Le cinéma c’est comme regarder à travers le trou d’une serrure ce qui se passe chez quelqu’un. Le cinéma est un langage particulier, c’est plus grand que le quotidien, c’est transcender la réalité. Le cadrage est essentiel au cinéma, hier comme aujourd’hui. Un storyboard très détaillé, ça rend service au film. Cadrer ne devrait pas s’improviser sur un plateau, c’est un énorme travail de construction. Il y a des grands metteurs en scène dans chaque époque. »

Les 11 films choisis par Carole Bouquet montrent – coïncidence ? – un point commun : c’est en majorité des réalisateurs qui pour la plupart ne sont pas foncièrement américains. La plupart ici (Fred Zinnemann, Billy Wilder, George Cukor, Elia Kazan…) ont émigrés aux Etats-Unis depuis l’Europe où ont des influences européennes… Et hormis deux comédies, ce sont plutôt des films dramariques, sociaux et même assez durs qu’elle a retenus.

  • Le train sifflera trois fois, de Fred Zinnemann (avec Gary Cooper et Grace Kelly), 1952
  • Les Affranchis, de Martin Scorsese (avec Ray Liotta, Robert De Niro, Joe Pesci), 1990
  • Shining, de Stanley Kubrick (avec Jack Nicholson, Shelley Duvall), 1980
  • Les Désaxés, de John Huston (avec Marilyn Monroe, Clark Gable, Montgomery Clift), 1961
  • La Garçonnière, de Billy Wilder (avec Jack Lemmon et Shirley MacLaine), 1960
  • My Fair Lady, de George Cukor sorti (avec Audrey Hepburn), 1964
  • Le Port de l’angoisse, de Howard Hawks (avec Lauren Bacall et Humphrey Bogart), 1944
  • America, America, de Elia Kazan, 1963
  • Panique à Needle Park, de Jerry Schatzberg (avec Al Pacino), 1971
  • Meurtre d’un bookmaker chinois, de John Cassavetes (avec Ben Gazzara, Seymour Cassel), 1976
  • Drive, de Nicolas Winding Refn (avec Ryan Gosling, Carey Mulligan), 2011

Le port de l’angoisse, de de Howard Hawks

Scorsese et Nicholson

« Pour moi Scorsese fait partie des grands metteurs en scène du 20e siècle. L’écriture cinématographique est très particulière, elle doit être faite pour le cinéma. Un bon livre de fait pas forcément un bon film. Scorsese est une cinémathèque ambulante, ce qui n’est pas le cas de nombreux autres metteurs en scène ! Kubrick aussi est un génie. Jack Nicholson est un acteur très très libre, chose qui n’est pas évidente chez les acteurs américains, beaucoup n’aiment pas ça et attendent des directives très précises avec une préparation façon Actor’s Studio comme aller avant travailler chez un boucher pour jouer le rôle d’un boucher. Nicholson a une possibilité de jeu qui n’est pas construite à l’avance.»

Question de genres

«Ce que Buñuel m’a appris quand j’avais 18 ans c’est d’être très précise sur la posture du corps et ma position dans le cadre, mais il n’avait rien à dire sur l’aspect psychologique du personnage. C’est ce qu’on voit pour Humphrey Bogart dans Le port de l’angoisse, chaque geste et manière de bouger c’est travaillé. Le western c’est beaucoup de films très masculins avec que des garçons, pas mon genre de film préféré, sauf quand c’est très très bien filmé comme Le train sifflera trois fois. La comédie musicale c’est un type de film particulier que les américains savent bien faire, ce qui est extraordinaire en fait dans My Fair Lady ce sont les costumes : aujourd’hui il n’y a plus vraiment ce grand travail de costumier. Si vous enfilez le bon costume, il n’y a quasiment plus rien à faire pour un acteur