Wes Anderson à la Cinémathèque française : de lumineux objets plein de désirs

Wes Anderson à la Cinémathèque française : de lumineux objets plein de désirs

L’exposition consacrée à Wes Anderson, qui s’ouvre à la Cinémathèque française jusqu’au 27 juillet, tient toutes ces promesses d’un voyage explorateur de l’œuvre esthétique du cinéaste. De Bottle Rocket jusqu’à Asteroïd City, on flâne ainsi dans son cinéma, parfois excentrique, souvent mélancolique, toujours romantique. Son ironie et son inventivité sont assez frappantes au fil des salles qui ponctuent ce dédale haut en couleurs.

Les fans seront ravis tant l’exposition dispose de nombreux objets, maquettes, archives et autres documents autour de ses films. Ce grand cabinet de curiosités pourrait ravir collectionneurs et brocanteurs. De ses carnets de notes à des photos de tournage, des costumes aux accessoires, tout l’univers de Wes Anderson éclate sous nos yeux. Mention spéciale pour ses deux films animés – Fantastic Mr Fox et L’île aux chiens – avec les décors miniatures et les figurines des personnages plus vraies que nature.

On saisit ainsi toute la précision et le sens du détail de ce Texan globe-trotteur pour mettre en scène ses protagonistes anticonformistes, loin d’être parfaits, souvent déglingués par leurs névroses dans un monde idéalisé, artificialisé et ultra-référencé.

La splendeur de l’Anderson

Mais c’est aussi l’occasion de contempler 75 Polaroïds personnels sur les coulisses d’un fim, les créations artistiques qui nourrissent ses films ou celles qui leur rendent hommage, la manière dont il dessine un film, avec style, sous forme de croquis. À la manière d’un rédacteur en chef fabriquant son chemin de fer dans The French Dispatch.

Pourtant, ce cinéaste de la famille – celle qu’on subit comme celle qu’on choisit – et du voyage – proche ou lointain – ne se livre pas réellement dans ce parcours. Sa pudeur légendaire est à son max en nous offrant ses petits secrets et ses jolis souvenirs. On n’en apprendra pas plus sur son goût exquis pour la cruauté et le cynisme, son empathie réelle pour les âmes tourmentées, ni sur ses motivations à aller chercher des récits empreints de nostalgie. Les dialogues, la musique ou encore ses influences artistiques demeurent des spectres qui ne font que hanter cette frise chronologique.

Il ne s’agit pas ici de décrypter Wes Anderson (et après tout des livres le font très bien) ou même d’analyser les thèmes et les obsessions de son cinéma, toujours en proie à un dilemne existentiel dans un monde absurde.

Wes Side Story

Ici, on répond juste à une belle invitation calligraphiée avec style, et envoyée par la poste, pour plonger, errer, s’évader dans un cocon fantasmé où les rêves semblent réels. Tout y est si raffiné qu’on pourrait revoir sa filmographie sous un angle proustien.

L’amour de la symétrie, le souci du détail. Rien n’est anodin. Tout doit paraître authentique. C’est ce qui permet à l’exposition d’exercer une forme de fascination. Cet artisanat au service du cinéma se déploie majestueusement au gré des « bulles » rouges qui enveloppent avec bienveillance et élégance ses histoires romanesques et vivifiantes, souvent des fresques autour de la résilience et de la résistance.

Si l’aventure continue en boutique avec goodies et autre merchandising, les cinéphiles attendront surtout la suite de cette histoire de près de trente ans, avec la sortie de son nouvel opus, The Phoenician Scheme, sorte de film d’espionnage à sa façon, attendu au Festival de Cannes et dans les salles le 28 mai. On peut aussi profiter de la rétrospective du cinéaste à la Cinémathèque, du 22 mars au 25 mai. En attendant, peut-être, cette année ou plus tard, un Prix Lumière amplement mérité.